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L'Église de Satan

L'Église de Satan

Titel: L'Église de Satan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnaud Delalande
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bouche.
    — Quinze jours, dit-il enfin, et nous
prendrons possession du château. Et nous voulons des otages en gage de votre
bonne foi. Nous voulons Arnaud-Roger et Jourdain de Péreille. Le fils et le
frère de votre chef.
    Quinze jours, se
dit Aguilah. Et je saurai enfin si nous avons eu raison, toutes ces années, de
craindre leur secret.
    Escartille était prostré devant les
montagnes.
    Assis en tailleur, il oscillait d’avant en
arrière. Il ne s’était pas encore remis du choc de cette révélation qui lui
avait été faite.
    Lentement, il se prit la tête entre les mains.
    Et il se souvint.
    Le cavalier inconnu qu’il avait croisé
autrefois rejaillissait à présent à sa mémoire. C’était au lendemain de la
prise de Béziers ; les soldats de l’ost venaient à peine de disparaître à
l’horizon, laissant derrière eux les ruines d’une ville fumante…
    — Qui êtes-vous ? demanda Escartille,
se redressant sur ses coudes, ne sachant toujours s’il rêvait ou non.
    Le chevalier, tout d’abord, ne bougea pas. Puis
il tourna lentement la tête en direction du troubadour, qui avait maintenant du
mal à distinguer son visage.
    Il finit par dire, d’une voix profonde :
    — Je viens de si loin que toi, petit
homme, ne saurais le concevoir. Je viens d’une terre de sang et de feu, d’une
terre vaincue et pourtant mille fois sainte…
    — Mais… que faites-vous ici ?
    À nouveau, le chevalier se tut. Il laissa
passer quelques secondes et reprit :
    — Une ville est tombée et ce n’est
encore que le début. Je vais en ce château que l’on construit, sur ce pic
imprenable. Je vais à Montségur.
    Il eut un sourire, qui s’effaça lentement
de son visage.
    — Montségur… dit Escartille. Qu’allez-vous
y faire ?
    Le chevalier ne répondit pas. Puis il dit :
    — As-tu idée de la raison véritable
pour laquelle on se bat ici ?
    Escartille hocha la tête, les traits de son
visage se tordant en une grimace amère.
    — Y a-t-il un motif suffisant pour
autoriser une telle horreur ? dit-il seulement.
    Le chevalier le regarda encore.
    Il posa sur sa besace noire sa main gantée.
    — Oh oui, dit-il avec gravité, les
yeux maintenant perdus dans le vide.
    Escartille releva la tête.
    Pouvait-il être sûr de l’authenticité de ces
reliques ? Fallait-il comprendre, fallait-il admettre ce que leur présence
semblait suggérer ? Escartille se pencha encore, faisant la grimace, son
nez touchant presque le sol, comme s’il se fut penché vers cette terre occitane,
pour soudain refuser de la baiser.
    Carcassonne… Carcassonne la grande… Il sortait
de la cité, malmené au milieu des chariots, des colonnes de cette population
hagarde, du flot des habitants s’échappant de la ville. Le jeune Trencavel, héros
et martyr, venait d’être fait prisonnier…
    — Vous ! Que faites-vous ici ?
    — Je ne pensais pas te retrouver là, troubadour.
    — Que faites-vous ici ?
    Le cavalier ne le regardait pas. Il dit
enfin :
    — J’ai accompli ma tâche, petit homme.
    — Comment ? Quelle tâche ?
    — Celle qui m’a fait traverser la
moitié du monde.
    — Vous êtes allé à Montségur, n’est-ce
pas ? Pourquoi ? Qu’avez-vous apporté là-bas ?
    Le cavalier regarda Escartille. Il
paraissait immense au-dessus du troubadour.
    — Oublie, mon garçon. Oublie que nous
nous sommes rencontrés.
    Son visage s’assombrit.
    — Il y a dans cette vie des choses qu’il
vaut mieux ne pas savoir, crois-moi. Des vérités bouleversantes, qui peuvent
ruiner à jamais l’espérance des hommes. Oui, il existe des lumières dont il ne
faut pas trop s’approcher. Lorsque l’on veut contempler Dieu en face…
    Escartille regarda un instant en direction
des colonnes qui s’échappaient comme une marée des portes de la ville. Lorsqu’il
se retourna, le cavalier avait disparu.
    Escartille hurla, adressant au ciel une
supplique qui alla se perdre dans les vallées alentour. Il eut une profonde
inspiration et chercha la bible à son côté. Il l’ouvrit lentement et la
feuilleta page après page.
    Le monde qui l’entourait n’existait plus.
    Puis, prenant du pain, il
rendit grâces, le rompit et le leur donna, en disant : « Ceci est mon
corps, livré pour vous ; faites cela en mémoire de moi. » Il fit de
même pour la coupe après le repas, disant : « Cette coupe est la
nouvelle Alliance en mon sang, versé pour vous. » (Luc, XXII, 19-20.)
    Quand ils l’eurent

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