L'ennemi de Dieu
du pays de Cadwy, puis prit d’assaut le prince
rebelle dans l’ancienne place forte romaine d’Isca. Les murs s’étaient écroulés
et les vétérans de Lugg Vale s’étaient engouffrés dans les brèches afin de pourchasser
les rebelles dans les rues. Le prince Cadwy s’était fait prendre dans un
sanctuaire romain et taillé en pièces. Arthur ordonna que les différentes
parties de son corps fussent exposées dans les villes de Dumnonie, et que sa
tête, avec ses tatouages bleus sur les joues reconnaissables entre tous, fût
expédiée au roi Marc de Kernow qui avait encouragé la révolte. Le roi Marc
renvoya un tribut de lingots d’étain, un baquet de poisson fumé, trois
carapaces de tortue polies échouées sur les côtes de son pays sauvage, tout en
se défendant candidement de toute complicité avec les insurgés.
Lorsqu’il prit
la forteresse de Cadwy, Culhwch y trouva des lettres qu’il fit parvenir à
Arthur. Les lettres étaient du parti chrétien de Dumnonie. Elles avaient été
écrites avant la campagne qui s’était terminée à Lugg Vale, et elles révélaient
toute l’ampleur des plans concoctés pour débarrasser la Dumnonie d’Arthur. Les
chrétiens l’avaient pris en grippe du jour où il avait révoqué l’édit du roi Uther
qui exonérait l’Église d’impôts et de prêts et ils s’étaient convaincus que
leur Dieu menait Arthur au-devant d’une grande défaite entre les mains de Gorfyddyd.
C’était la perspective de cette défaite quasi certaine qui les avait encouragés
à coucher leurs réflexions par écrit. Et ces missives étaient désormais en
possession d’Arthur.
Les lettres
révélaient une communauté chrétienne inquiète qui désirait la mort d’Arthur,
mais redoutait aussi l’invasion des lanciers païens de Gorfyddyd. Pour se
sauver, eux et leurs richesses, ils s’étaient montrés disposés à sacrifier
Mordred, et les lettres encourageaient Cadwy à profiter de l’absence d’Arthur
pour marcher sur Durnovarie, tuer Mordred et livrer le royaume à Gorfyddyd. Les
chrétiens lui promettaient de l’aide et espéraient que les lances de Cadwy les
protégeraient sous la férule de Gorfyddyd.
Cela leur
valut plutôt d’être châtiés. Le roi Melwas des Belges, roi client qui s’était
rangé aux côtés des chrétiens hostiles à Arthur, devint le nouveau maître de
Cadwy. Ce qui n’était guère une récompense, car cela éloignait Melwas de son
peuple pour un endroit où Arthur pouvait le tenir à l’œil. Nabur, le magistrat
chrétien qui avait reçu la tutelle de Mordred et avait profité de sa fonction pour
rassembler les adversaires d’Arthur, mais aussi l’auteur des lettres suggérant
de mettre Mordred à mort, fut cloué en croix dans l’amphithéâtre de Durnovarie.
De nos jours, naturellement, on le fait passer pour un saint et martyr, mais je
ne garde de lui que le souvenir d’un homme doucereux doublé d’un menteur. Deux
prêtres, un autre magistrat et deux propriétaires terriens furent également mis
à mort. Le dernier des conjurés était l’évêque Sansum, bien qu’il eût été trop
malin pour laisser écrire son nom. Cette habileté et son étrange amitié avec
Morgane, la sœur païenne et estropiée d’Arthur, lui valurent la vie sauve. Il
jura à Arthur une indéfectible loyauté, mit la main sur un crucifix et jura n’avoir
jamais comploté la mort du roi : ainsi demeura-t-il le gardien du
sanctuaire de la Sainte-Épine, à Ynys Wydryn. On pourrait le mettre au fer avec
une épée sur la gorge, il se débrouillerait encore pour s’éclipser.
Morgane, son
amie païenne, avait été la prêtresse la plus proche de Merlin jusqu’au jour où
la jeune Nimue avait usurpé cette place, mais Merlin et Nimue étaient bien
loin, et Morgane était de fait la maîtresse des terres de Merlin à Avalon. Avec
son masque d’or dissimulant son visage brûlé et sa robe noire qui enveloppait
son corps déformé par les flammes, Morgane reprit les pouvoirs de Merlin, et c’est
elle qui acheva la reconstruction de son antre sur le Tor. C’est encore elle
qui organisa la collecte des impôts dans le nord du pays d’Arthur. Elle devint
ainsi l’une des conseillères les plus écoutées de son frère ; de fait,
après qu’une fièvre eut emporté l’évêque Bedwin cet automne, Arthur suggéra
même, contre toute préséance, qu’elle fût nommée conseillère de plein droit.
Aucune femme n’avait jamais siégé au
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