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L'enquête russe

L'enquête russe

Titel: L'enquête russe Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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verre d’une gravure dont les morceaux tombent en tintant. Nicolas se jette à terre, saisit son pistolet de poche, l’arme et tire au jugé dans la pièce où allait pénétrer l’inspecteur. Il entend un cri, un bruit de chute et un gémissement. Il prête l’oreille, accablé de tant de pensées… Bourdeau… Bourdeau… Mon Dieu, pourvu que…
    Il entend au rez-de-chaussée un tumulte de voix et de piétinements. Des appels de Rabouine et de Gremillon lui parviennent. Il ne peut leur répondre tant sa gorge lui serre et le cœur lui bat. Il rampesur le sol vers Bourdeau sous la chaleur de la flamme. Il n’ose hurler de crainte que l’ennemi dans la pièce en face de lui ne découvre l’endroit où il se trouve. Il oublie que l’éclat de l’incendie fait de lui une cible de choix. À tout hasard, il recharge son pistolet et tire à l’aveuglette. Aucun bruit, aucun tir. Il palpe le corps de Bourdeau qui ne bouge plus. Soudain, il sent un liquide chaud sur sa main et cette odeur métallique qu’il connaît si bien. Le sang, du sang… Le sang de Pierre qui coule. Un immense désespoir le saisit et en un instant les années défilent, les jours heureux et les jours terribles. Il entend monter dans l’escalier. Rabouine, Gremillon et des exempts surgissent. Bruits de bottes, éblouissement, grésillements des torches qui éclairent la scène. Il leur désigne la pièce en face de lui en leur criant de prendre garde. Ils s’y précipitent. Nicolas se relève pour aussitôt se pencher sur le corps de Bourdeau. Le tumulte dans la pièce voisine le distrait un instant.
    Il perçoit des jurons, des cris aigus, et voit Gremillon et Rabouine qui traînent sur le sol un homme qui se débat. Que celui-ci soit couvert de sang lui procure une joie sauvage. Ainsi son tir au hasard n’a pas manqué sa cible. Les exempts s’évertuent à éteindre le feu qui a attaqué le parquet. À nouveau, Nicolas se consacre à Bourdeau. Ses mains tremblent et il n’arrive pas à faire les gestes nécessaires. Des mains amicales le saisissent aux épaules et le redressent. Il reconnaît Rabouine qui lui murmure des mots apaisants. Il regarde Gremillon penché à son tour sur le corps de Bourdeau. Pourquoi hoche-t-il la tête ainsi ? Pourquoi ? Il se tourne enfin vers Nicolas et lui fait un signe de tête. La vue brouillée, celui-ci ne parvient pas à en comprendre la signification. Maintenant il est debout ; il sent tous ses membres trembler, jamais il n’a ressenti cela. Il tend la main vers Gremillon, qui la saisit, le tire à lui, l’étreint et lui murmure à l’oreille :
    — Rassurez-vous, monsieur, il respire encore.
    Il entend la phrase qui devrait tempérer son désespoir ; cependant, seul le mot «  encore  » sonne, comme un glas. Tout se remet en marche dans sa tête. Il est lui-même étonné des propositions qui se présentent, se confrontent, s’accordent et finalement s’imposent.
    — Nous sommes à Meudon. Le plus utile et rapide est de transporter Bourdeau chez le docteur Semacgus à Vaugirard. Est-il gravement touché ?
    — Il a reçu, à première vue, une balle en pleine poitrine. Elle n’a pas touché le cœur et paraît avoir frôlé les côtes et être ressortie par le dos. Je vous le répète, il a perdu conscience mais respire.
    Nicolas écarte Gremillon sans ménagement. Il s’agenouille près du corps de Bourdeau.
    — Aidez-moi à lui enlever son habit et son pourpoint.
    Nicolas se relève, met bas son propre vêtement, dénoue sa cravate et enlève la chemise qu’il lacère avec une sorte de rage. Il constitue des tampons qu’il applique avec délicatesse sur la plaie. Il donne des ordres, qu’il hurle comme saisi d’une rage contre une fatalité qui le frappe au plus près.
    Ce n’est que lorsque Bourdeau a été déposé sur un brancard qu’il songe à s’inquiéter de ce qui s’est passé dans la chambre à côté. Il y pénètre et, à la lumière des flambeaux, il discerne, entravée sur le sol, une femme de massive constitution, échevelée, grimaçant et grinçant des dents. Elle est habillée avec des vêtements masculins. Le soulier et le basde la jambe gauche lui ont été ôtés et celle-ci est ensanglantée. Il a bien fait mouche quand il a tiré. Là encore l’action reprend le dessus. Il ordonne de faire un pansement de fortune et de faire transporter la blessée au Grand Châtelet, où le médecin de permanence la prendra en charge. Il s’approche

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