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L'envol des tourterelles

Titel: L'envol des tourterelles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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temps à autre, reprenant un air concentré uniquement quand les contractions augmentaient d’intensité. Nathaniel se tenait assis près du lit, les mains posées sur son bras ou sur son ventre, anticipant tous ses besoins.
    – Jan?
    – Oui, je suis là.
    – Mais je sais que tu es là. Pourquoi ne me fredonnes-tu pas le Debussy que nous avons chantonné lors de la naissance d’Adam?
    Jan ne fut pas étonné de sa requête, revivant cette nuit lointaine depuis leur arrivée à l’hôpital. Il savait qu’il était impossible à Élisabeth de taire ces souvenirs. Il fredonna discrètement la pièce tandis que Nathaniel battait doucement la mesure sur le lit et qu’Élisabeth essayait de rythmer sa respiration. Jan oublia sa rancœur occasionnelle envers Nathaniel, la joie de sa sœur, malgré la douleur, l’illuminant complètement. Il crut sincèrement qu’elle avait besoin de sa présence, ce qu’elle venait de lui confirmer en demandant de lui faire revivre un des rares moments tendres qu’ils avaient connus pendant la guerre.
    Elle fut finalement conduite à la salle de travail et Jan regarda battre les portes vitrées, s’y colla le nez et garda en mémoire la fréquence des contractions de sasœur. Il lui avait embrassé la main et avait longuement serré celle de Nathaniel, qui l’avait embrassé sur les deux joues. Le va-et-vient des infirmières dans la salle de travail était régulier, et, chaque fois que l’une d’elles en sortait, elle lui indiquait avec les doigts le nombre de centimètres de dilatation. Parfois, elles entrouvraient la porte pour lui parler un peu ou lui faire un message. Il apprit ainsi qu’Élisabeth était la première femme qu’elles voyaient qui pouvait garder un visage souriant même quand une contraction la déchirait.
    – Pour moi, c’est un enfant attendu, celui-là. Pis son mari lui essuie le visage en lui chantant des berceuses. Mon Dieu que c’est beau de les voir!
    Peu de temps après, Denis Boisvert arriva, s’arrêta devant Jan en toussotant et lui posa une main sur l’épaule.
    – Vous êtes toujours aussi près l’un de l’autre. Quand elle me parlait de vous, elle le faisait avec tellement de… de tendresse, de… d’admiration.
    – Elle ne m’a jamais parlé de vous. Jamais. Si ce n’est pour m’annoncer que votre femme était enceinte, et, plus récemment, pour me dire que vous seriez à l’accouchement.
    S’il avait envie de lui faire savoir que sa sœur avait terriblement besoin de son bonheur plus que mérité et que personnellement il espérait ne plus jamais entendre parler de lui, il s’entendit lui demander de bien la surveiller, de ne pas la brusquer ni lui faire de mal, de…
    – Monsieur Aucoin, votre sœur est la personne que j’aime le plus au monde. Je n’ai pas envie de lui faire de mal, croyez-moi.
    Il franchit les portes avec assurance, mais Jan le vit hésiter avant d’entrer dans la salle où se trouvaientÉlisabeth et Nathaniel. Une infirmière l’y suivit, puis ressortit quelques minutes plus tard et vint vers lui à la hâte.
    – Monsieur Aucoin, elle entre dans la salle d’accouchement. Elle vous demande d’aller chercher dans sa valise le chapeau de son mari. Est-ce que ça se peut? J’ai bien compris?
    Jan retourna dans la chambre d’Élisabeth, ouvrit la valise, en fit l’inventaire rapidement, aperçut enfin une kippa noire aux motifs bleus. Il hocha la tête en se répétant que la vie avait parfois de ces surprises, prit la kippa et alla la porter à l’infirmière, qui le pria de presser le pas.
    – Vite, ils sont rendus. Ah! c’est ça, son chapeau? Une calotte de juif? Est-ce que son mari est juif?
    – Oui.
    – Ça alors! C’est le premier que je vois dans une salle d’accouchement. À bien y penser, c’est le premier que je vois d’aussi près. Comment ça se fait que votre sœur n’a pas accouché au Montreal Jewish Hospital?
    – Je pense, madame, que vous êtes attendue dans la salle d’accouchement.
    – Oh! mon Dieu! Excusez-moi! Un père juif qui chante des berceuses puis une primipare de quarante et un ans qui sourit en accouchant, c’est trop pour moi.
    Élisabeth craignait que son bébé ne réussisse pas à se frayer un chemin sans se blesser. Elle souffrait maintenant énormément, ayant la désagréable impression que son périnée allait se déchirer. Denis pensa la même chose et s’empressa de faire une petite incision, mais elle n’en eut pas connaissance, tant

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