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L'envol des tourterelles

Titel: L'envol des tourterelles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arlette Cousture
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anesthésiée, afin de figurer dans le premier tableau que verrait son enfant. Michelle l’avait traitée de tous les noms, necomprenant pas qu’elle veuille souffrir alors que la médecine lui offrait tout ce qu’il lui fallait.
    – Madame Warszawska.
    Elle se leva avec un élan étonnant pour une femme aussi lourde, portée par le bonheur de savoir qu’elle faisait sa dernière visite, certes, mais ravie de penser qu’elle n’avait pas accouché deux jours plus tôt, soit le 7 janvier, anniversaire d’Adam. Depuis cette date, elle avait compris que le mauvais œil l’avait perdue de vue, acceptant que son passé aille finalement rejoindre ses souvenirs, laissant à sa vie présente tout l’espace pour exister.
    On l’installa pour l’examen, et elle chuchota au bébé de ne pas s’inquiéter, son seul regret étant que Nathaniel fût retenu à Boston. Sa voix, douce comme un frôlement, lui manquait terriblement.
    «Est-ce que tu me permettrais de porter ma kippa à l’hôpital? Les grandes œuvres m’emportent toujours et j’aurai besoin de toute la voûte céleste pour me retenir sur terre.»
    Le médecin, stéthoscope au cou et un dossier médical à la main, venait d’entrer. Il la regarda en soupirant et hocha la tête d’un air de profonde déception.
    – Madame Warszawska! Ça fait maintenant cinq mois que je vous supplie d’accoucher avant le 10 janvier. Il ne vous reste pas vingt-quatre heures si vous voulez que ce soit moi qui vous assiste. Combien de fois vous ai-je répété que je partais pour la Floride le 10?
    – J’ai vraiment essayé. J’en ai parlé au bébé et il semblait d’accord. On dirait qu’il ne veut rien entendre.
    Le médecin éclata de rire avant de poursuivre, la rassurant quant aux soins qu’elle recevrait.
    – Mon remplaçant devrait arriver d’une minute à l’autre. Tiens, quand on parle du loup…
    La porte s’était ouverte et Élisabeth renversa les yeux pour voir le médecin qui entrait. Elle fut prise d’une subite moiteur, incapable de retenir ses tremblements, souffrant soudain intensément de l’absence de Nathaniel. Elle se demanda si Denis avait recommencé à faire de l’obstétrique ou s’il s’était offert par amitié pour son collègue. Elle devait se protéger, refusant par toutes les fibres de son corps que Denis vienne ternir le seul grand bonheur qu’elle connaissait depuis sa naissance. Ses pensées se chevauchaient en cascade et elle chercha comment elle aurait réagi si Marek avait fait une brusque irruption dans sa vie. Grâce à la grandeur de l’amour de Nathaniel, ses plaies, elle en était sûre, étaient toutes fermées, mais l’arrivée inopinée de Denis pouvait peut-être les raviver. Il s’approcha et lui pressa doucement la main en souriant. Elle la retira et la posa sur son ventre, qu’elle ne voulait pas inquiéter par sa respiration erratique. Son médecin traitant comprit qu’ils se connaissaient et offrit de sortir quelques minutes. Elle répondit qu’elle préférait qu’il reste, tandis que Denis le remerciait de sa délicatesse. Le médecin hésita, mais, devant le calme de Denis, se dirigea vers la porte.
    – Je vois une autre patiente et je reviens.
    Élisabeth s’assit sur la table d’examen et tira sur la robe d’hôpital qu’on lui avait mise, essayant de s’en recouvrir les genoux.
    – J’avais oublié combien tu es belle. Même enceinte, je suis certain que tu réussis à émouvoir les statues, y compris celles de saint Joseph.
    Denis avait la voix chevrotante, montrant qu’il était aussi troublé qu’elle. Des yeux, il lui demanda la permission de lui caresser la joue du revers de la main et elle fit signe que non avant de hocher la tête doucement. La caresse ne fut qu’un effleurement, mais elle lui avait signifié que cet homme était toujours amoureux d’elle. Il demeura silencieux, l’observant avec regret alors qu’elle soutenait son regard, refusant d’abaisser les paupières, par crainte de se rendre vulnérable. Il lui avait tant de fois répété que l’ombre de ses cils était irrésistible qu’elle voulait qu’il ne voie de son visage que la lumière reflétée sur son bonheur. Elle clignait rapidement pour empêcher les ombres d’apparaître, puis les larmes arrivèrent, non dans ses yeux mais dans ceux de Denis.
    – M’as-tu pardonné?
    Elle acquiesça lentement de la tête, se posant elle-même la question dans les mêmes termes.
    – Je ne pourrai

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