L'envol du faucon
levant de son bureau pour l'embrasser. Je suis vraiment content de te voir de retour. C'est la seconde bonne nouvelle de la journée. »
Il offrit à Thomas la chaise récemment occupée par son adjoint, John Nicks, le chef comptable.
La perspective de ce qu'il devait annoncer à son frère pesait d'autant plus à Thomas qu'il remarqua son allégresse. Serrant nerveusement son sac, il prit la chaise offerte. Elihu le regarda de près puis jeta un regard soupçonneux au sac.
« Tu as l'air mal à l'aise, Thomas. Le voyage n'a pas été agréable ?
— Si, Eli. Le voyage ne s'est pas trop mal passé. Nous avons eu un peu peur quand quelques tigres ont tué un de nos buffles d'eau. Un porteur a été entraîné en hurlant quand il a essayé d'intervenir. Et ce fut une bataille constante pour tenir les nuées de moustiques à distance, mais je dois dire que ces nouveaux serpentins insecticides que les Siamois utilisent sont tout à fait efficaces si l'on arrive à les garder allumés toute la nuit. »
Elihu hocha la tête d'un air distrait. « Nous avons perdu John Simmonds la semaine dernière dans un accident de bateau, dit-il. Les indigènes ont prétendu qu'il était ivre, mais je soupçonne quelque chose de louche après l'introduction de ce nouvel impôt. J'ai dû les punir quand même. Cela m'a fait horreur, mais j'ai dû pendre leur chef pour l'exemple. C'est le seul moyen de maintenir l'ordre. »
Thomas garda le silence, heureux pour l'instant de parler de tout sauf des résultats de son voyage. « Mais tu as l'air satisfait à part ça, Eli. Quelle est la bonne nouvelle que tu mentionnais plus tôt ? »
Le gouverneur arbora un large sourire. « Le courrier annuel est arrivé d'Angleterre pendant ton absence, Thomas. Et il apportait en effet quelques excellentes nouvelles. L'approbation d'une politique que je prône depuis des années. » Il frappa son bureau du plat de la main. « Nous avons un nouveau roi, Thomas, et avec lui une nouvelle politique. Vive le roi Jacques II ! » Le gouverneur ouvrit un petit meuble sous son bureau et en sortit une bouteille de cognac et deux verres. Il les remplit et en tendit un à Thomas. « A Sa Majesté le roi Jacques, dit-il en levant son verre, et à notre défunt roi Charles II, paix à son âme. »
Ils vidèrent leur verre d'un trait. « Pendant des années, Thomas, nous avons reçu des ordres d'un groupe de dandys à Londres qui n'émergeaient que rarement de leurs clubs et avaient encore moins mis les pieds en Inde. Ils n'ont aucune idée des conditions de vie dans cette région, comme la politique qu'ils prônent ne l'indique que trop clairement. Peut-on imaginer d'ordonner à une poignée d'Anglais de saigner à blanc des milliers d'indigènes appauvris pour pouvoir construire un autre fort à quelques milles plus bas sur la côte ? Ils devraient puiser les ressources nécessaires dans leur propre bourse trop bien remplie. » Yale hocha la tête. « Si les indigènes renâclent, font-ils remarquer jovialement, exécutez-les. »
Yale se pencha en avant. « Mais maintenant, sir Joshua Childe commence à comprendre. Il semble qu'il ait enfin eu vent des actes de piraterie perpétrés dans le golfe du Bengale avec des Anglais à la barre. Sa Majesté le roi Jacques — puisse-t-il régner longtemps —, encouragé sans doute par les considérables contributions de sir Joshua Childe à la couronne, a fait une nouvelle proclamation. Tous les sujets de Sa Majesté en Orient se voient dorénavant interdire de servir un souverain étranger. Ceux qui sont au service d'un prince étranger doivent tous sans exception démissionner sur-le-champ et rallier l'avant-poste britannique le plus proche. » Yale jubilait. « Que va-t-il arriver, à ton avis, aux gens comme Sam White et John Coates, sans parler de tous les autres loups de mer qui servent un maître païen dans le golfe et au-delà ?
« Ecoute-moi ça, poursuivit Yale en sortant une lettre d'un tiroir. Nous vous demandons, conformément à la dernière proclamation de Sa Majesté, de faire passer en cour martiale tous les Anglais que vous découvrirez au service dudit roi de Siam ou de les garder en détention surveillée jusqu'à l'arrivée de notre Assesseur ! » Le gouverneur leva les yeux. « Nous avons en outre reçu l'ordre de nous saisir de tous les navires siamois croisant au large des côtes indiennes, à moins du versement d'indemnités satisfaisantes pour les dommages encourus dans le passé. » Il
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