L'envol du faucon
serait bientôt résolu.
Dès qu'il aurait amassé un butin suffisant, il rembourserait sa dette et gagnerait l'Angleterre, laissant aux « Français » le soin d'expliquer leurs actes. Il lui faudrait agir vite et choisir son moment. Il devait se préparer à un départ rapide.
Il avait envoyé Davenport à Mergui immédiatement après son entrevue avec Phaulkon. Il avait affirmé à son secrétaire que ses inquiétudes étaient sans fondement, que Phaulkon l'avait entièrement lavé de tout blâme et que seule l'arrivée inopinée d'une éminente délégation du roi de France avait empêché le Barcalon de le recevoir plus tôt.
Avant de retourner à Mergui, White se sentait obligé d'aller voir Coates, ne serait-ce que pour lui assurer qu'il faisait tout son possible pour obtenir sa libération. Il voulait aussi enquêter discrètement parmi les marchands anglais pour découvrir exactement ce que les Français préparaient. Il était capital de vérifier s'il y avait du vrai dans les propos de Thomas Yale, qui soutenait que Phaulkon entendait remplacer les Anglais par les Français. Vu la situation, ce n'était guère une question qu'il aurait pu poser à Phaulkon directement. Si quelqu'un devait être au courant, c'étaient les marchands anglais de la région.
Il rendit bien visite à Coates et lui offrit quelques maigres consolations, mais les marchands anglais se révélèrent de peu d'utilité. Ils semblaient penser que Phaulkon avait été aussi surpris que tout le monde par la taille de l'armée française. Peut-être, songea Samuel, s etait-il agi d'une ruse de Yale pour l'obliger à céder Mergui à la Compagnie.
White jeta un coup d'œil aux immenses collines boisées qui servaient de toile de fond à Mergui. C'était bon d'être de retour. Il donna un gros pourboire aux porteurs et aux bateliers souriants — il valait mieux rester en bons termes avec la population du cru — et gagna le sommet de la colline avec trois de ses porteurs. Son secrétaire sortit pour l'accueillir.
« Soyez le bienvenu, mon Seigneur.
— Merci, Francis, quelles sont les nouvelles ?
— La situation a été remarquablement calme pendant votre absence, mon Seigneur. Presque trop calme. J'ai l'impression qu'il y a quelque chose qui cloche, mais je n'arrive pas à mettre le doigt dessus.
— Que voulez-vous dire ?
— J'aimerais bien le savoir, mon Seigneur. Les choses sont trop calmes, voilà tout.
— Pourquoi la situation ne devrait-elle pas être calme pendant notre absence ? fit observer White en souriant. Nous sommes les seuls à faire bouger les choses ici. Où sont Wilkes, Jamieson et Farley ?
— Le capitaine Jamieson est ici, mon Seigneur. Wilkes et Farley sont en mer. Oh ! A propos, il s'est tout de même produit un événement pendant votre absence.
— Lequel ?
— Le gros temps a amené le Sancta Cruz à s'abriter dans les îles au large. Il a subi également quelques avaries légères.
— Le Sancta Cruz ? Le bateau du frère de Demarcora ?
— Oui, mon Seigneur. Quelle merveille ! C'est à mon avis un bateau encore plus magnifique que La Nouvelle-Jérusalem. Je suis allé lui rendre visite hier. »
La curiosité de White fut immédiatement en éveil.
« Qu'est-ce que le Sancta Cruz faisait donc par ici, Francis ? demanda-t-il.
— Il se dirigeait apparemment vers Sumatra ; vers Atjeh, je crois. Il était chargé à bloc, et avec une cargaison plutôt précieuse car il y avait beaucoup de gardes à bord. J'ai vu le... », Davenport s'interrompit pour observer White. Il connaissait ce regard vitreux. Il l'avait déjà vu. C'était signe que White tramait quelque plan monstrueux. Mon Dieu, non ! Pas le Sancta Cruz !
« La reine d'Atjeh est immensément riche, n'est-ce pas ? demanda White, l'œil fiévreux.
— Oui... oui, monsieur. Je crois bien. »
White éclata de rire. D'un rire qui parut à Davenport celui d'un dément. « Alors, comme ça, le magnifique Sancta Cruz transporte une cargaison digne d'une reine ? »
Davenport ne répondit pas.
« Le Sancta Cruz est toujours là, n'est-ce pas, Francis ?
— Euh... je n'en suis pas certain, mon Seigneur. Il était là hier, mais il se préparait à lever l'ancre. »
White se leva d'un bond. « Je doute qu'il ait déjà appareillé avec ce vent. Francis, allez me chercher le capitaine Jamieson. Je veux lui parler immédiatement. »
Davenport sentit ses forces l'abandonner. Il lui faudrait prévenir Ayuthia. « Très bien, mon
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