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L'envol du faucon

L'envol du faucon

Titel: L'envol du faucon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Axel Aylwen
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Celui-ci n'avait cessé de lancer des regards soupçonneux à la lettre et Ivatt s'était vu forcé de révéler à qui elle s'adressait. Les années passées au service de White semblaient avoir rendu Rodriguez méfiant à l'extrême. Cette fois, pourtant, ses soupçons étaient amplement justifiés, car la lettre demandait aux Maures d'envoyer un rapport indépendant sur les événements de Mergui directement à Ayuthia au lieu de passer par la voie normale. La voie normale n'était bien sûr autre que Sam White, qui s'assurait habituellement que le contenu de tous les rapports était inoffensif et qui les détruisait dans le cas contraire. Ivatt avait décidé qu'il ferait mieux de rassembler un maximum de renseignements pour Phaulkon. Davenport avait essayé d'apaiser les soupçons de Rodriguez en affirmant que le seigneur Ivatt avait écrit ce petit mot pour s'excuser de n'avoir pas eu le temps de les voir lors de son passage à Mergui. Lorsqu'il avait ensuite donné la lettre à Rodriguez, lui demandant de la remettre en personne, le capitaine de la garde avait paru convaincu que la lettre était bel et bien anodine. Ivatt n'avait plus qu'à espérer qu'il ne lui viendrait pas à l'esprit de mentionner sa présence à White.
    Le crépuscule tombait vite et les hauts arbres de chaque côté du fleuve semblaient se refermer sur lui. Quelques singes aventureux grimpèrent aux branches qui surplombaient la surface de l'eau pour voir les intrus de plus près et ajouter leurs cris au grand concert de la nuit.
    Le voyage avait été épuisant et la traversée du golfe la plus périlleuse qu'il eût connue. Ivatt n'oublierait pas de sitôt les vagues gigantesques qui avaient déferlé sur le bateau. Trois jours durant, rendus malades par le tangage et le roulis, ils avaient été secoués sans répit et incapables de faire autre chose que prier et s'accrocher à la vie. Mais le robuste vaisseau, dont la coque avait été renforcée pour le transport des éléphants, était sorti intact de la tempête, et ils avaient fini par apercevoir le havre de paix de l'archipel de Mergui au bout de seulement vingt-trois jours.
    Il se demanda comment le Curtana s'était tiré d'affaire. N'ayant quitté Madras qu'un jour ou deux avant eux, il devait avoir essuyé la même violente tempête. Dès qu'ils eurent atteint des eaux plus calmes, il avait à maintes reprises scruté l'horizon mais ne l'avait aperçu nulle part. Peut-être avait-il sombré. Plus vraisemblablement, il s'était abrité quelque part dans les îles Andaman. Tout retard dans sa mission ne serait que bienvenu : il donnerait à Phaulkon davantage de temps pour préparer une stratégie concernant Mergui.
    Un cri des bateliers lui fit lever les yeux. Ils avaient repéré un mouillage sûr. Il refusa toute nourriture — il était trop fatigué — et s'allongea au fond du bateau. Ici, dans la forêt vierge où tigres et rhinocéros abondaient, il était trop dangereux de camper à terre. Ils dormiraient au milieu du fleuve, à l'abri des bateaux amarrés aux rochers. Ce n'est que plus tard, lorsqu'il commencerait à y avoir des sentiers de jungle, qu'il y aurait des clairières permettant aux éléphants et aux hommes de passer la nuit à terre. Ivatt se roula dans sa couverture de coton pour se protéger des moustiques et s'endormit aussitôt.
    37
    Phaulkon exultait. Il venait de rentrer chez lui après une très longue audience avec Sa Majesté, et pour la première fois il n'avait pas entendu de sifflements en provenance du balcon supérieur. Il était désormais indéniable que la santé du roi était sur la bonne voie. Sa Majesté elle-même était d'excellente humeur, plaisantait comme avant, taquinait gentiment Phaulkon et, d'une manière générale, s'intéressait davantage à tout ce qui l'entourait. La renommée médicale du père de Bèze était justifiée. Le jésuite l'avait cependant prévenu de ne pas s'attendre à une guérison complète. Il ne s'agissait que d'un répit temporaire dans les souffrances du patient.
    Phaulkon était néanmoins enchanté et très soulagé par ces progrès pour des raisons à la fois personnelles et politiques : il avait été bouleversé de déceler de la souffrance dans la voix de cet homme qu'il admirait et respectait. Et cela étoufferait les rumeurs croissantes quant à la santé du Seigneur de la Vie. Sa Majesté avait accepté de recevoir tous les mandarins de première classe en audience le lendemain matin. Ils

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