Les 186 marches
dirige vers le kommando du Loibl-Pass avec comme dirigeant Maurice Colin. C’est à ce moment, mais 1943, que je remonte du Revier pour le block 5, puis pour le block 9 : travail provisoire au Baukommando, terrassement pour le nouveau Revier. Entre ceux qui restent au camp central, le premier comité français est formé ; il se compose de moi-même, comme ratifié par le C. C. chargé de l’orientation politique, Alby : Rüstung, Laffitte : block 16. Notre politique étant d’assurer le maximum d’unité entre les Français de toutes opinions, nous y adjoignons, à son insu, mais en le consultant régulièrement, notre camarade Corbin.
– Première tâche : organisation de la solidarité. La forme : demander à chaque déporté français de donner au moins, chaque semaine, une tranche de pain pour
les malades et les plus faibles. Cette forme durera jusqu’en 1945. La distribution est assurée par Willy Zupanzic, Yougoslave arrêté en France avec Tony Nupnik.
– Liaison internationale : connaissant depuis des années Franz Dahlem, c’est avec lui que j’entame la discussion sur l’organisation. Nous avons également des contacts avec des camarades belges (j’ai oublié leurs noms). Deux d’entre eux travaillaient au Baukommando au traitement de la chaux, et l’autre, sénateur communiste, était au Rüstung. Au block 9, j’ai pris également contact avec les camarades espagnols. Mes correspondants désignés étaient Pépé Perlado, Razola et Pagès, membres de la direction du groupe espagnol.
– Discussion sur le Comité international : c’est avec le camarade Dahlem que j’avais le maximum de discussions. La première fut l’organisation par collectifs nationaux. Nous préconisions de refaire le système des groupes de 3, montant en pyramide jusqu’au groupe de direction. Franz Dahlem y opposait le système d’hommes de confiance parce que, disait-il,, dans un cpmp d’extermination, une organisation structurée pourrait avoir de terribles répercussions. Notre collectif a décidé de maintenir, en ce qui concerne les Français, le système des triangles. La seconde discussion a eu trait à la présidence du Comité international. Étant entendu que celui-ci fonctionnerait par une liaison répartie entre les diverses nationalités, précaution indispensable. J’avais pour tâche le contact avec les Belges et les Espagnols. Mais en accord avec mes camarades français, j’exigerais que la présidence du comité soit confiée à un camarade autrichien, Mauthausen étant en Autriche, de la même façon qu’un Français présiderait les comités en France et un Allemand en Allemagne. Après discussions prolongées, j’eus satisfaction sur ce point : c’est le camarade
Léo Gabier, Autrichien, proposé par Köhl, qui fut chargé de la direction et du fonctionnement du comité.
– Informations et relations du moral : c’était aussi une de mes tâches particulièrement importante puisqu’un peu partout dans le camp, au fur et à mesure des événements militaires sur le front de l’Est, se répandaient ce que nous appelions « les bouteillons », c’est-à-dire les bruits d’un optimisme délirant, d’autres jours d’un pessimisme terrible, démentis le lendemain par une réalité loin d’être aussi belle ou aussi laide. C’est le camarade Heinrich Rau qui, chaque soir, à mon retour du kommando, me donnait les nouvelles exactes qu’il tenait des camarades du kommando des électriciens, lesquels pouvaient écouter les radios. La vertu de nos groupes de trois faisait qu’en quelques minutes, les nouvelles exactes étaient transmises à l’ensemble du collectif, aux déportés de toutes opinions ; cette méthode a contribué puissamment à éviter la démoralisation ; les informations pouvant être contrôlées ensuite, tous les Français ont fini par nous faire confiance.
– Mise en sommeil provisoire. Au début de 1944 ou à la fin de 1943 (mes souvenirs sont imprécis), j’étais parvenu, grâce à l’organisation internationale, à être affecté au Rüstung ; le groupe français s’est trouvé à l’époque, démembré par la formation du kommando Ebensee, auquel furent affectés notamment tous les rescapés du block 16, et parmi eux Jean Laffitte. Alby avait également été envoyé en kommando et Robert Dubois transféré à Paris ; à son retour il fut envoyé à Wiener-Neudorf où il est mort sous un bombardement. Je restais donc le seul
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