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Les 186 marches

Titel: Les 186 marches Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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avait tenu bon si longtemps et si courageusement, disparut ainsi. On se débarrassait en même temps de trente camarades environ. J’étais aussi sur la liste des « incurables », à cause des œdèmes qui se répétaient sans cesse. Par bonheur, cette action fut arrêtée assez tôt. La commission qui nous désigna pour un transport à Dachau me sauva.
    – Le 8 novembre 1942, nous étions dirigés sur Dachau. En passant les grilles de Mauthausen, je fixais avec mépris les yeux de Bachmayer qui m’avait jadis promis la mort dans la carrière. C’était la sensation la plus forte que j’aie jamais éprouvée, l’instant le plus heureux de ma vie. On changea à Dachau mon numéro de détenu de Mauthausen : 1 182 et je reçus le numéro 38 906. Je pesais 48 kilos y compris le poids de l’eau que j’avais dans les jambes. La situation pour nous devint meilleure et de la sorte, petit à petit, nous nous sommes retapés. Le 29 avril 1945, nous avons vu le jour de la Libération.

L’ÉVASION DE « FRITZ DEL BAUKOMMANDO »
    L ES évasions des camps de concentration sont rares. Nous suivrons l’extraordinaire tentative des condamnés à mort soviétiques du block 20 mais qui n’interviendra que dans les dernières semaines de l’existence de Mauthausen.
    Dans les premières semaines de 1942, un droit commun polonais, mécanicien au garage S. S., Hans Bonarewitz, imagina de s’évader en s’enfermant dans une caisse. Régulièrement, l’atelier mécanique S. S. réexpédiait au garage central de Vienne les pièces usagées pour un échange standard. Cette semaine-là, le responsable du garage avait décidé de se débarrasser de trois vieux moteurs. Bonarewitz amarra les deux plus petits dans une caisse de deux mètres de long en ménageant un espace libre suffisant pour qu’il puisse s’allonger. Le lendemain matin, après l’appel, il s’installa dans la caisse et vissa le couvercle, de l’intérieur. Une heure plus tard, le chargement quittait Mauthausen à bord d’un camion. Deux jours plus tard, Bonarewitz était enfermé au bunker. Il n’existe aucun témoignage sur les circonstances de son arrestation. Le Polonais, après une sévère correction, fut redescendu au garage. Là, dans un coin, l’attendait la caisse de son évasion. Le couvercle fut cloué sur lui. Bonarewitz devait rester dix jours dans son « cercueil ». Au matin du onzième jour, on le traîna à la douche. Un coiffeur le rasa. L’ensemble du camp avait été rassemblé autour du gibet. La caisse dressée sur une plate-forme à roulettes l’attendait à la porte du block. Bonarewitz monta sur le « chariot » qui, tiré par deux compatriotes, traversa la place d’appel. L’orchestre du camp jouait « J’attendrai ton retour… ».
    Quelques semaines plus tard, quatre droit commun allemands s’évadaient à leur tour.
    – Il y avait, parmi les quatre « criminels » allemands, le kapo Fritz du « Baukommando ». Il était très connu des Espagnols et apprécié pour sa conduite tout à fait différente des autres kapos. Fritz était d’un caractère assez renfermé et discret, à l’inverse de la plupart des « droit commun ». A l’intérieur du camp, comme sur les lieux du travail, il donnait l’impression d’être timide et élevait rarement la voix. Les S. S. le nommèrent kapo en raison de ses connaissances dans la construction, et dès 1940, lui furent confiés les travaux de construction des murailles, du portail d’entrée dans la cour des garages S. S., de la kommandantur, etc. Il n’était pas rare de le voir se faire tancer par les S. S. pour ne pas avoir châtié un déporté. Rien d’étonnant dans ces conditions à ce que les Espagnols cherchent, par tous les moyens, à être affectés à son groupe. Fritz était un des rares « bandits » un peu humains.
    – En 1941-1942, furent construits les passages souterrains destinés à recevoir les conduites du chauffage central de la chaufferie, qui se trouvait à l’intérieur de l’enceinte électrifiée, jusqu’aux baraques récemment construites pour l’hébergement des S. S. Entre le block « bunker » et l’emplacement de la baraque du « Bauburo », nous avions creusé une tranchée d’environ trois mètres de profondeur, qui accueillit plusieurs tuyaux conduisant l’eau chaude, les câbles électriques, etc. Le passage était très étroit et il n’était possible de le suivre qu’en rampant. Pendant tout le

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