Les 4 vies de Steve Jobs

affiche des images à la place de mots, la souris permet de pointer sur des objets dessinés et de les déplacer à volonté…
    Effaré, Jobss’écrie :
    « Mais pourquoi ne commercialisez-vous pas cela ? C’est extraordinaire ! Vous pourriez pulvériser tout le monde ! »
    « C’était un de ces moments apocalyptiques… Dix minutes après avoir vu cette interface graphique, j’ai su que tous les ordinateurs au monde fonctionneraient un jour de cette manière. C’était évident dès le premier abord. Cela ne demandait pas un intellect exceptionnel. C’était d’une totale clarté », a témoigné Jobs. « Lorsque j’ai vu l’Alto au Xerox Parc, c’était comme si, soudainement, un voile avait été levé de mes yeux. Il y avait la souris et les caractères d’imprimerie de toutes les tailles sur l’écran… Instantanément, j’ai réalisé que cela allait attirer un nombre de gens exponentiellement plus élevé que l’Apple II. Je parle des gens qui ne voulaient pas apprendre à utiliser un ordinateur – ceux qui voulaient juste l’utiliser. Une couche entière de ce qu’il fallait apprendre pour se servir de cet outil avait été éliminée 26 . »
    Steve Jobsrevient de Palo Alto avec la ferme conviction qu’il vient d’entrevoir l’ordinateur du futur. Il a intuitivement compris ce que les cadres de Xerox n’ont pas su déceler : les laboratoires du Parc recèlent des trésors inexploités. C’est ainsi qu’il faut concevoir les ordinateurs pour le marché de masse. Puisque Xerox ne compte pas s’y atteler, Apple va le faire !
     
    L’un des projets en cours au sein des laboratoires de Cupertino s’appelle le Lisa – ironie de la chose, Jobsa donné à cet ordinateur le nom de la fille dont il n’a pas voulu reconnaître la paternité un an plus tôt !
    Lisa est un ordinateur qu’Apple entend vendre aux grandes entreprises et dans ce but, la société n’a pas hésité à recruter quelques vétérans de l’informatique. L’équipe compte des transfuges du Stanford Research Institute et de Hewlett-Packard. En conséquence, la population des ingénieurs du Lisa est bien plus âgée que la moyenne des gens d’Apple.

    Le Lisa, ordinateur Apple lancé en 1983 et qui préfigurait le Macintosh. Vendu à près de 10 000 dollars, il n’a pas trouvé son public. © Roger Ressmeyer/Corbis
    Le premier responsable du projet Lisa, Ken Rothmuller, a été débauché de Hewlett-Packard. Au bout de quelques mois, Rothmuller commet l’erreur de dire à Jobsque le délai qu’il escomptait ne pourrait jamais être tenu. Jobs l’a immédiatement remplacé par un autre transfuge de Hewlett-Packard, un ténor de l’informatique qu’il a recruté lui-même, JohnCouch.
    D’avoir vu de ses yeux l’Alto a rendu Jobscomplètement fébrile. Il exige que la conception de Lisa soit revue de fond en comble. Il faut bâtir une machine qui puisse fonctionner avec une souris, afficher des icônes et des fenêtres…
    Pour abattre les réticences des ingénieurs en charge de Lisa, Jobsorganise une nouvelle visite du Parc au cours de laquelle il fait venir Couchet ses acolytes. Suite à la démonstration de l’Alto, ces ingénieurs venus d’univers plus classiques se laissent gagner par les arguments de Jobs : en effet, il pourrait être bon que Lisa s’inspire de la station Alto de Xerox…
    Il reste à convaincre le géant de la photocopie d’autoriser l’usage des trouvailles du Parc. Jobsa une idée brillante : offrir à Xerox des parts d’une société en pleine croissance : Apple. Le message que Jobs fait alors passer aux cadres de Xerox est clair : ils disposent d’une fabuleuse technologie et Apple est taillé pour la mettre à la disposition du grand public. Un deal est envisagé par lequel Xerox obtiendra un énorme paquet d’actions Apple en échange de l’usage de sa technologie.
     
    Sept mois après sa première visite au Parc, Steve Jobsrecrute Lawrence Tessler, du Parc. Une quinzaine d’autres ingénieurs de Xerox vont bientôt rejoindre Apple. BillAtkinson, pour sa part, est affecté au développement de l’interface graphique de l’ordinateur.
    Fait rare pour l’histoire de la jeune Apple, une cinquantaine d’employés travaillent à l’élaboration de Lisa. À défaut de diriger les opérations, Steve Jobss’immisce dans les réunions et, comme à son habitude, ne cesse d’ébranler le planning de l’ordinateur Lisa en soumettant idée sur idée sur