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Les amants de Brignais

Les amants de Brignais

Titel: Les amants de Brignais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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ricana Bagerant. Il y a quelques jours, tu te serais dressé comme un coq prêt à lancer son cri. C’est à elle que nous devons ce petit miracle ?… Regarde-la… Elle sourit… Tiercelet, par ma foi, se met à fleureter… Peut-être l’aime-t-il plus encore que tu ne l’aimes.
    C’était une flèche de Parthe décochée au galop. Déjà, Bagerant, rejoignait Thillebort et, en s’ébaudissant, lui contait sa réplique.
    Tristan, les bras croisés, les défia de loin. Tiercelet  !… Le brèche-dent ne s’employait guère à des grâces malignes. Son visage âpre, son sourire noir, ses épaules massives n’incommodaient aucunement Oriabel. S’il l’admirait, c’était chose compréhensible.
    Ils revenaient vers lui. L’ancien mailleur décida :
    – Nous allons contourner le château. Regarde bien, compère, les fenêtres des maisons, les archers et les créneaux. Je verrai, moi, si l’on peut fuir par les terres ou en pataugeant dans le Garon… Tout ça, tu t’en doutes, pour le cas d’une déconfiture à Givors…
    Ils revinrent déçus : la campagne chenue leur avait paru lointaine. Des archers veillaient un peu partout, surtout sur le chemin conduisant au campement des ribaudes.
    – Essaie, Tristan, de leur montrer que tu as jeté ta présomption aux orties… Montons dans votre chambre : nous y serons à l’aise pour paroler…
    Ils franchissaient le porche de la première enceinte quand Tiercelet jura. Une femme courait en sens inverse, poursuivie par un homme. Demi-nue. La pâleur de son teint se trouvait aggravée par la broussaille noire d’une chevelure abondante.
    – Arrêtez-la !… Bon Dieu, arrêtez-la !
    L’homme, c’était Héliot.
    Oriabel s’écarta pour laisser passer la fugitive. Le temps qu’elle le frôla, Tristan vit sa robe en lambeaux, ses cheveux pailletés de fétus. « Cours, songea-t-il. Mieux vaut que tu sois percée d’une sagette plutôt que de subir la forcennerie de ce porc ! » Un cri le fit tressaillir alors qu’il se tournait vers Oriabel. Deux archers venaient d’empoigner la malheureuse.
    Héliot s’arrêta, attendant sa proie. Belle, assurément, bien qu’un coup lui eût bleui la pommette. Ses poignets gonflés portaient des marques rouges, et ces bracelets-là signifiaient qu’on l’avait attachée durement.
    Elle lança sur Tristan un regard effrayé que son tourmenteur surprit :
    – Holà, Margot… N’aie crainte : il ne te chevauchera pas. Il vient de se marier… De plus, il est honnête et sûrement bon chrétien !
    Tristan considéra l’écuyer avec plus de répulsion que s’il s’était agi d’un scorpion.
    – Ne me juge pas de ton haut, Castelreng ! Occupe-toi de ton épouse, sinon laisse-la-moi : elle ne te regretta pas !
    – Ne t’avise jamais, Héliot, de poser un seul doigt sur elle : je te couperais en morceaux !
    Rien. La menace était sans effet. Un regard glacé. Des yeux de poisson mort. Que valait ce garçon, une arme à la main ? Devrait-il un jour l’affronter comme dans son rêve ? Comme la fuyarde, affamée peut-être, posait une main sur son ventre, Héliot fit signe aux archers de l’accompagner.
    – Viens, dit-il à la captive. On va t’en donner à satiété !
    Oriabel pantelante avait baissé les yeux. Tristan ne put que l’étreindre sans mot dire. Toutes ses anxiétés assoupies s’éveillaient, lourdes et corrosives. Un rire le fit se retourner en même temps que Tiercelet : Naudon de Bagerant. Le gargouillis du Garon et les cris de la captive, tirée par Héliot et poussée par les archers, avaient couvert le pas de son cheval.
    – Ne t’échauffe pas le sang, Tristan, pour cette prisonnière. Elle se prête bien à nos solas (262) depuis qu’on les lui a enseignés, mais elle est assez lunatique.
    Répondre eût été perdre son temps. Bagerant s’offensa de ce silence inattendu. Son rire tinta : quatre notes brèves, coupantes.
    –  Tu n’es pas céans, chevalier, dans un châtelet hanté par de bonnes gens. Nous sommes différents des seigneurs que tu connais et de ceux de tes lectures… Fiers d’être des malandrins usant des droits que nous nous sommes arrogés par le tranchant de nos épées… Je t’apprécie… Franchement !… Tu es droit et l’on sait : à quoi s’en tenir avec toi… Je ne te crains pas au sens où nous nous craignons les uns les autres. Je préfère tes coups de goule à des propos cauteleux… Je dirai même qu’il est

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