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Les amants de Brignais

Les amants de Brignais

Titel: Les amants de Brignais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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vivent à l’ombre de la Couronne… Tiens, pour en finir : Guillaume d’Agneaux a violé quatre filles et trois femmes mariées… Je ne sais si les filles étaient les enfants de ces femmes… On dit même qu’il a commis quelques encises (310) . Que crois-tu qu’on lui fît ? On lui a pardonné : il sert Jean de Vienne, l’amiral de France…
    – Ils violent, certes, ils ne tourmentent pas les femmes comme celles que j’ai vues dans votre aire du Mont-Rond !
    – Qu’en sais-tu ? Il paraît que Guesclin aime à turlupiner ses captives… S’il ne servait le roi et n’y trouvait son compte, il serait ce soir parmi nous… Et qui sait s’il n’y sera pas un jour !
    Cette éventualité tira un rire à Tristan. La gravité de Bagerant s’accrut :
    – Il y a une façon d’envisager toutes ces choses que tu trouves laides : se dire que l’homme est à peine plus élevé qu’un animal et partagé, pour ce qui nous concerne, en deux races : les nobles et les vilains… Certains dévorent la vie en mâchant du côté dextre, d’autres en mâchant du côté senestre, mais le fait est qu’ils la dévorent pareillement… Si les tenants du roi étaient à Brignais, livrés sans frein à la violence et à la luxure, tu ne saurais les reconnaître des malandrins que nous sommes !
    Ce fut à Bagerant de rire. Seul. Puis il prit le ton du commandement :
    – Espiote, la nuit nous couvre… Il est bon que tu nous laisses ton cheval : tout ignare qu’il soit, Bourbon a peut-être envoyé des gars en avant, et le bruit d’un galop te préjudicierait… Dis à Garcie du Châtel et à Aymery que nos gars se préparent… Qu’ils forment trois compagnies. La première s’étirera derrière les mottes de Janicu et du Bonnet jusqu’à l’étang du Loup ; la deuxième s’étendra de Brignais au Bois-Goyet, par les chemins. Au signal, elles prendront ce camp dans leurs tenailles qui se replieront à l’avancée des Barolles. Il y faut des archers et des guisarmiers en grand nombre. La troisième restera sur la motte du Mont-Rond. Un millier d’hommes suffira… Des archers encore et les frondeurs pour porter à ces gens, s’ils y viennent, les derniers coups. Avant l’aube, ma compagnie – la quatrième – donnera l’assaut.
    – Et le châtelet ? demanda Monsac.
    – La garnison m’y semble en suffisance ! Dans l’état où nous les aurons mis, les réchappés ne seront pas tentés d’en écheller les murailles !
    Tout cela paraissait aisé. S’il avait été son ami, Tristan se dit qu’il eût congratulé Bagerant. Espiote parut insatisfait et soucieux :
    – Nous devions attendre le Petit-Meschin !
    – Ne comprends-tu pas, compère, qu’il nous faut gagner cette bataille maintenant ? Nul capitaine, en bas, nul soudoyer… personne n’a l’idée ainsi que le souci que nous pouvons attaquer de nuit… Pas même l’Archiprêtre !
    – Tu te défies de lui !
    – Je me défie du Diable, même si je le sers bellement !
    Epiant les traits assombris de Bagerant, Tristan se dit qu’il était non seulement un homme à l’esprit fortement trempé, mais un guerrier de race. Dommage qu’il se fut dévoyé.
    – Pourquoi souris-tu, Sang-Bouillant ?
    – C’est tout à ton honneur, pour une fois. Je me disais que tu connaissais parfaitement ton affaire.
    La lumière lunaire, à travers les ténèbres légères encore, adoucit furtivement les traits du routier. Ses yeux pétillèrent d’une gaieté qui pouvait bien se mélanger à de la reconnaissance :
    – Ce qui corrompt l’esprit des seigneurs d’en bas, c’est l’orgueil. Ils savent tout, ils peuvent tout ! Jamais ils n’auraient dû venir s’échouer dans cette plaine, entre ces montagnes. Il leur fallait galoper, courir depuis Francheville et nous submerger comme une immense tempête… Nous ne nous serions pas défiés d’une manœuvre pareille, au lieu que ce qu’ils font est à la portée du moindre nicet (311)  !… Mais il se peut que cette bataille, malgré l’avantage que nous aurons en son début, soit plus cruelle, pour nous, que je ne l’imagine en ce moment… Tout dépendra du Petit-Meschin.
    – Crois-tu qu’il reviendra ?… Regarde tout autour : aucun feu ne s’allume.
    – Hé ! Hé ! Hé !… Serais-tu inquiet ?… Peut-être est-il trop loin. Peut-être est-il prudent. Va-t’en savoir !… S’il revient plus tard que je l’espère, il achèvera la bataille et nous

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