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Les amants de Brignais

Les amants de Brignais

Titel: Les amants de Brignais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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qui se soulevait lentement, mais sous lequel battait un cœur affolé. Elle appuya ses mains sur cette main en conque.
    –  J’ai douté de Dieu quand ils m’ont prise et abandonnée à Eustache. Je doute encore plus de Ses bienfaits et miséricorde après ce que j’ai vu.
    Comme, sous l’étoffe rude, ce sein semblait beau, tiède et doux !… Il fallait qu’il le sentît mieux encore ; qu’il insinuât sa main dans l’encolure étroite et l’eût tout entier sous sa paume, nu, avec juste au milieu des lignes où les Egyptiennes lisaient l’avenir, le tétin dur et tendre.
    Le soupir qu’Oriabel exhala prouvait tout le plaisir qu’elle prenait à ce tâtonnement. Jamais, murmura-t-elle, on ne l’avait attouchée ainsi.
    – Pourtant, dans le châtelet où j’étais…
    Il lui ferma la bouche d’un baiser : Tiercelet venait de remuer. Etait-il aux aguets de leurs pauvres ébats ?
    – Nous serons unis bientôt, et je t’aimerai comme nul homme n’aima son épouse… Peu me chaut que ce gros presbytérien qui nous unira vive parmi des malfaisants !
    Il lui importait beaucoup, au contraire, mais à quoi bon le révéler. D’ailleurs, d’honnêtes inquisiteurs n’étaient-ils pas pires que certains bourreaux de Brignais ? Il se pouvait qu’Angilbert le Brugeois appartînt à l’espèce ecclésiale bonne et craintive, qu’il s’apitoyât sur le sort effrayant des victimes et les bénit avec une ferveur sincère tout en vouant leurs tourmenteurs aux gémonies.
    J’étais chambrière à Montaigny, chuchota la pucelle. Mes parents, il y a un mois, m’ont confiée à la baronnesse qui est veuve, en secondes noces, d’un chevalier occis à Poitiers… Elle a près d’elle une cousine : Marie… et autour quinze hommes d’armes commandés par un chef déplaisant : Panazol.
    Tout cela, pour Tristan, semblait sans intérêt. Au diable le passé !
    – Un grand seigneur, trois fois, leur a rendu visite. Je ne sais rien de lui sinon qu’il s’appelle Arnaud et que Marie en était toute estorbée (2) 15 … Une nuit, la semaine dernière, j’ai vu passer les Tard-Venus par l’archère de ma chambre. Ils éclairaient à grands feux leur chemin. J’ai pris peur. J’ai voulu revenir chez les miens… d’autant plus hâtivement que ce Panazol m’effrayait… À l’aube, quand le pont-levis tomba, j’ai couru… Je me suis cachée le jour, j’ai marché la nuit. Quand j’étais proche de Caluire, des malandrins m’ont prise. Les uns ont voulu abuser de moi, mais la plupart ont préféré m’offrir à Garcie du Châtel… Ils se sont arrêtés chez Eustache. Lui et sa sorcière les ont incités à boire. En pleine buverie, Eustache a offert à leur chef de me jouer aux dés… Ce chef n’était pas parmi ceux de ce soir.
    – Qu’importe… Tu fus bien inspirée de quitter cette baronne… Quinze hommes, c’est peu pour soutenir un siège…
    – Ils n’ont pas assailli le château (2) 16 lors de leur pas sage, et cela m’ébahit encore !… Panazol les a vus passer sans même crier « À l’arme »…
    C’était effectivement une étrangeté, mais cette nuit, le silence était préférable aux confidences.
    Abandonnant le sein palpitant des battements d’un cœur empli d’émoi, Tristan glissa sa main sur la hanche dure et descendit vers la cuisse immobile, pinçant parfois la robe afin de la remonter. Tout devait paraître innocent dans cette approche à laquelle consentait la pucelle. Certes, il se refusait à se livrer complètement. Les événements qui les avaient angoissés, indignés, l’obligeaient, en dépit de la présence de Tiercelet, à un redoublement de vigilance : Nadaillac pouvait les avoir vendus.
    Pourtant, comme il était agréable, après un jeûne d’amour extrême, de toucher cette fiancée inattendue !… De baiser ses yeux clos, ses lèvres succulentes… Opulence du plaisir… Bien qu’il fût affamé d’elle, c’était nue qu’il voulait l’avoir entre ses bras… « Plus tard… Seuls ! » Toutefois, avant ce plus tard, il pouvait couvrir de sa main, doucement, un genou qui remuait à peine et, prudent, attendre.
    Quel visage avait-elle à présent ? Souhaitait-elle qu’il devînt plus hardi ? Etait-ce la première fois qu’elle consentait à de pareils effleurements ? Elle tremblait. De crainte ? De froid ? Al lez-t-elle, d’un soupir ou d’un léger déglutissement lui signifier son contentement d’oublier pour un

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