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Les amants de Brignais

Les amants de Brignais

Titel: Les amants de Brignais Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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temps… Mais qu’allait-il penser ! Tout comme lui, elle ne pouvait rien oublier ! Ils se creusaient tendrement, dans l’horreur, un gîte doucereux aux limites pourries, éphémères… Leur amour ne pouvait les guérir de la peur… Il s’était demandé quel était le visage d’Oriabel. Eh bien, il émergeait de la jonchée de ses cheveux épars avec une sorte de force, comme pour exorciser les démons éparpillés dans cette obscurité toute pleine des odeurs confondues, épaisses, presque charnelles, des herbes assemblées là. Et ses yeux cillaient, attentifs, tandis qu’il dépassait son genou…
    Ses gestes, partout ailleurs qu’en ce fenil, eussent témoigné de sa passion solide, ardente ; leurs nudités les eussent encouragés, elle et lui, à cet emportement, cette fièvre où rien n’existe que deux corps, deux âmes, deux cœurs en sursis de se confondre. Ils eussent chu dans des abîmes de délices d’où ils seraient remontés pâmés, émerveillés, le sang aux joues… Mais à Brignais, après ce qu’ils avaient vu !… L’abandon d’Oriabel, cette nuit, semblait plus près de celui d’une captive que de celui d’une pucelle attendant, espérant cet orage de plaisir auquel elle avait rêvé certains jours et surtout certaines nuits. Lui-même y avait aspiré à Montierneuf et Fontevrault. Sa culpabilité, son remords empoisonnaient sa conscience… Pas cette nuit… Non, pas cette nuit !… Il buvait à petites gorgées un bonheur si délectable qu’il en reprenait confiance : on ne pouvait mourir lorsqu’on aimait autant.
    Oriabel saisit sa main. Pour la repousser ? L’accompagner où il voulait aller et l’immobiliser longtemps avant de…
    – Oyez…, chuchota-t-elle. Des gens bougent au-dehors…
    Il eut soudain comme elle conscience d’un remuement dans cette nuit massive et qui semblait rassasiée de feux et de fumées, de rumeurs et de cris. Il cessa son étreinte ; Oriabel rabattit sa robe.
    Quelque chose se préparait : il y avait, lointains, des bruits de conversations et des rires. Bien que volontairement assourdis ou trahis par une porte demi-close, ils trouvaient un écho sur le ciel et les murs. Cette effervescence nouvelle, insuffisamment maîtrisée, divulguait sans la moindre équivoque les apprêts d’un assaut nocturne lors d’un siège ou d’une embuscade. Cette impression de menace en germe, qui ne cessait de se dilater, fut si douloureusement perçue par Oriabel que repoussant la main immobile sur sa hanche, elle ceintura Tristan à pleins bras. Du côté de Tiercelet, la paille crépita.
    – Tu ne dors pas, Castelreng ?
    – Non.
    Tristan se gardait de laisser percer sa fureur et son inquiétude.
    – Ils vont venir. Ils se sont tus mais leurs pas les dénoncent… Qui sait ce qu’ils nous veulent… Tout de même pas que vous fassiez comme les rois et les reines, les princes et les princesses…
    – Que font-ils, Tiercelet ? chuchota Oriabel.
    – Hé ! Hé ! Ils forniquent devant témoins afin de prouver que leur union est consommée.
    Tristan sentit la tête de la jouvencelle s’appuyer contre sa poitrine.
    – Surtout, compère, tire ton épée, recommanda le brèche-dent. Et toi, la fiancée, enfonce-toi au plus profond de ta couche et ne bouge pas !
    Déjà quelqu’un frappait à la porte et la voix de Naudon de Bagerant passait à travers l’ais de bois tendre :
    – L’as-tu chevauchée, Castelreng ? Es-tu heureux et fier de ta copulation ? Etait-elle vierge ou a-t-elle déjà servi ?… Il serait étonnant que tu dormes… Vas-tu répondre ?
    –  Laisse-les en paix, Naudon, dit Tiercelet.
    Il y eut un silence marquant la déception et la surprise, pendant que Tristan se demandait si toutes leurs nuits seraient ainsi troublées.
    – Ton indiscrétion me touche, Bagerant, dit-il. Va donc besogner tes concubines !
    – Je voulais seulement savoir si tout se passait bien !… Tiercelet n’a pu se rincer l’œil… J’aurais dû vous fournir un flambeau… Moi, compère, j’aime voir ce que je fais !
    – Moi aussi !
    C’était la voix du Petit-Meschin.
    – Et moi donc !… Laisse-nous voir son cul et nous te laisserons en paix.
    Celui-là, c’était Thillebort.
    – Vous connaissant parfaitement, mes beaux sires, dit Tiercelet, j’ai pris mes précautions. Nous avons tous les deux notre épée dans la main. Entrez, et quelques-uns d’entre vous ne verront point l’aube prochaine.
    Il y eut un

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