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Les Amants De Venise

Titel: Les Amants De Venise Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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acceptée, je l’exécuterai, avec cette
seule atténuation qu’un assassinat me fait horreur, et que j’ai
confiance dans l’issue du duel que je vous propose. »
    L’inconnu parlait avec une gravité solennelle.
    Dandolo comprit qu’il n’avait plus qu’à essayer de défendre sa
vie. Il jeta son manteau, tira sa dague et se mit en garde.
    L’inconnu en fit autant.
    L’instant d’après, les deux adversaires marchaient l’un sur
l’autre, et la lutte dans la nuit, au fond de cette ruelle obscure,
commença, sans bruit, sans ce cliquetis qui anime les duels à
l’épée, avec seulement le sourd halètement des deux hommes.
    Cela dura cinq minutes.
    Tout à coup, Dandolo se rua sur son adversaire.
    Il y eut un corps à corps, une étreinte féroce…
    Un corps tomba.
    L’adversaire demeuré debout se pencha, tâta son poignard
profondément enfoncé dans l’épaule gauche et murmura :
    « Il en a pour dix minutes… »
    Alors le survivant ramassa son manteau, s’en enveloppa et
s’éloigna sans hâte.

Chapitre 24 OÙ L’ARÉTIN ÉCRIT ENCORE UNE LETTRE
    Ce soir-là, maître Pierre Arétin était rentré dans son palais
vers huit heures, de fort méchante humeur.
    En effet, invité à un dîner que devait suivre une fête, l’Arétin
s’était rendu à l’heure prescrite au palais de l’amphitryon.
    Bon appétit, surtout ! Maître Pierre n’en manquait
jamais.
    Il adorait ces sortes d’agapes : d’abord parce qu’il dînait
plantureusement sans bourse délier ; ensuite parce que dans
ces fêtes, il risquait toujours de se lier avec quelque généreux
Mécène à qui, moyennant finances, il dédiait une de ses poésies,
avec quelque patricien féru de gloriole dont il écrivait la
biographie.
    Pour ces biographies, l’Arétin avait établi des tarifs dont il
tenait compte scrupuleusement, en honnête commerçant.
    Telle épithète valait un écu, tel éloge en valait dix. Il faut
bien gagner sa pauvre vie.
    Et d’ailleurs, on aurait tort de trop blâmer le pauvre Arétin,
qui avait au moins pour excuse de vivre à une époque où le mot
« morale » n’avait pas du tout le même sens que de nos
jours.
    Or donc, ce soir-là, maître Pierre, invité comme nous l’avons
dit, avait trouvé le palais de l’amphitryon fermé. On lui avait
annoncé que fête et dîner étaient remis à plus tard.
    Il était donc rentré de fort méchante humeur, et on pense bien
que les Arétines durent essuyer des bordées d’injures, sauf
toutefois Perina, pour qui, depuis la scène de Mestre, il
professait une sorte de tendresse étonnée.
    « Que diable se passe-t-il à Venise ? grommelait
maître Pierre Arétin en achevant de dîner, solitaire, à sa table.
On ne voit que visages inquiets, mines longues d’une aune, regards
qui louchent, gens qui parlent à voix basse. Si cela continue, je
cesserai d’embellir Venise de ma présence, et je m’en irai. Voyons…
où pourrais-je bien m’en aller ?… À Rome ? Diable !
le cardinal Rospoli m’a fait bâtonner… À Paris ? François de
France est assez brutal pour me faire pendre… Je réfléchirai à la
chose… mais il est certain que Venise devient
insupportable. »
    Sur ce, l’Arétin gagna sa chambre à coucher, fit arranger le feu
dans la cheminée, bassiner son lit, et finalement, s’étant couché,
commença bientôt à rêver qu’il arrivait à Paris et que François
1 er venait au-devant de lui en le suppliant d’accepter
un coffre rempli d’or.
    « Monseigneur ! monseigneur ! » dit près de
lui la voix de ses valets.
    En effet, l’Arétin se faisait donner du Monseigneur ou tout au
moins de l’Excellence par ses gens. Il s’éveilla en
sursaut :
    « Qu’y a-t-il ? Le feu est-il au palais ?
    – Non, monseigneur, mais il y a sous nos fenêtres, du côté
de la ruelle, un homme qui gémit à l’agonie.
    – Maraud ! Pantoufle ! En quoi cela me
regarde-t-il ?… Tu oses me réveiller parce qu’un ivrogne
pleure sous mes fenêtres !
    – Pardonnez-moi, monseigneur, ce n’est pas un ivrogne.
C’est un homme de condition, blessé à mort, et qui demande à vous
parler.
    – Tu l’y as donc été voir ?
    – Oui, monseigneur. Ayant entendu des gémissements dans la
ruelle, nous nous armâmes tout à l’heure de lanternes et de dagues
et nous fûmes voir… Un homme était là, étendu et perdant son sang
par une affreuse blessure. Il nous vit. Nous lui demandâmes si nous
pouvions lui être utiles.

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