Les Amazones de la République
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La belle affaire⦠Pas ça, et surtout, pas à nous ! Chacun imagine bien que lâécoutant dâune oreille distraite, François Mitterrand devait naturellement avoir lâesprit â et lâÅil â bien ailleurs : dans des contrées plus érogènes et à portée de main. Oui, il se serait volontiers mis en congé du monde quâelle lui faisait parcourir pour visiter son pied-à -terre.
Détrompons-nous ! Car à peine lâeut-il quittée ce soir-là que François Mitterrand téléphona à quelques-uns parmi les capitaines dâindustrie de ses amis, dont le P-DG dâElf Aquitaine, Loïk Le Floch-Prigent, afin de leur faire part des remarques et des informations que venait de lui donner la journaliste.
Une autre fois et de la même manière, Mitterrand convoqua à lâÃlysée, dans son bureau, une brochette de militaires et de diplomates au garde à vous, afin quâils entendent ce que la journaliste avait à leur dire à propos du génocide du Rwanda et de lâattitude des pays occidentaux, comme du rôle trouble joué par la France dans ce pays ravagé. Tel le disciple dâune Pasionaria transformée en géopoliticienne prophétique ou en pythie, François Mitterrand lâécoutait pieusement : elle eût fait tourner les tables et changer lâeau en vin quâil nâen aurait pas été plus étonné que cela. Mitterrand lâavait dans la peau !
Celui qui lui adressait, de temps à autre, de volumineux bouquets de fleurs bleus et blancs â les couleurs préférées de la jeune femme â, était « gourmand de lâailleurs », confie simplement la femme qui témoigne de la grande tristesse dâun homme qui, voyant le monde changer sous ses yeux, savait que, la maladie le gangrenant, il nâen verrait jamais les nouveaux contours. Il arriva à ces deux tourtereaux, dont les plumes ne sâentrelacèrent jamais â toujours si lâon en croit la « femelle » â, de rester côte à côte de longues heures durant à bavarder sur un canapé, tels deux collégiens engourdis.
« Jâaurais eu vingt ou vingt ans de moins, ma douce Marine, notre histoire en eût été sans doute différenteâ¦Â », lui glissa-t-il un jour, bourrelé de regrets. François Mitterrand, qui dînait tous les dimanches soir chez les Burguburu, y croisait fréquemment la journaliste. Sâéclipsant en général un peu plus tôt, il allait se poster à sa fenêtre ou sur son balcon, selon les saisons, guettant le départ de celle à qui il adressait alors un signe de la main.
Marine lui plaisait. Mais sâil lâaurait entreprise dix ans plus tôt avec panache, il nâen avait plus le souffle. Ballotté par cent désirs futiles il y a encore dix ans, lâhomme vivait de souvenirs et de regrets. Vestiges de ses années de collectionneur, ces déjeuners avec quelques-uns de ses vieux compagnons, dans ses fiefs dâAuvergne. Là où, dans une atmosphère aux allures de troisième mi-temps de rugby, François Mitterrand et quelques anciens pistolets de son premier cercle évoquaient le passé et leurs palmarès.
Il arriva à Marine Jacquemin dâêtre conviée à ces tablées, où le truculent Michel Charasse assurait le spectacle : ne le supportant pas, la journaliste trouvait toujours une échappatoire afin dâéviter de croiser le ventripotent sénateur, dont les saillies à forte connotation sexuelle réjouissaient ces garçons. Une trombe de rire se déversait sur la table. Et Marine soupirait intérieurement : tapi derrière une fausse bonhomie, ce rusé petit sénateur et ancien sicaire de la mitterrandie sâamusait à rabaisser lâhumanité â et les femmes â pour être plus grand.
François Mitterrand lâavait deviné. Alors, pour se faire pardonner et la voire à sa guise, il lui offrit, en guise de viatique, une place à demeure à ses côtés, dans sa suite, lors des nombreux voyages quâil fit à lâétranger, durant ce quinquennat. Câest ainsi que, lors dâun voyage officiel effectué au Turkménistan, auquel avait été conviée une équipe de TF1, Marine
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