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Les amours blessées

Les amours blessées

Titel: Les amours blessées Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jeanne Bourin
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interrogations qui m’occupaient l’esprit me donnaient d’alarme.
    À Blois, mes parents m’accueillirent avec affection, mais non sans marquer quelque surprise.
    — Je ne m’attendais pas à votre visite, Cassandre, reconnut ma mère. Vous ne nous aviez pas informés de votre intention de quitter Courtiras où je croyais que vous vous plaisiez tant.
    Il n’avait jamais été facile de lui en faire accroire…
    J’évoquai ma solitude, l’abandon d’un époux que je voyais de moins en moins…
    À une petite lueur au fond du regard maternel, je devinai que mes explications ne devaient pas sembler convaincantes.
    — J’aurais pensé, voyez-vous, Cassandre, que l’absence d’un mari envers lequel vous n’avez jamais témoigné le moindre attachement vous serait plutôt délivrance que nostalgie, remarqua-t-elle du ton sans concession que je connaissais si bien. Mais, puisque vous avez jugé bon de venir nous rendre visite, ce n’est pas nous qui nous en plaindrons. Vous revoir nous est, chaque fois, une joie.
    J’appris sans tarder que d’autres soucis agitaient ma famille. Jacquette, la femme de mon frère Jean, venait de faire une nouvelle fausse couche. Elle ne parvenait à mener à terme aucune grossesse. Tout le monde craignait qu’elle ne réussît jamais à donner un héritier aux Salviati.
    — Décidément, soupira ma mère, il doit être dit que je ne verrai pas mes petits-enfants avant de m’en aller ! Jacquette semble incapable de nous offrir autre chose que des déceptions et vous demeurez stérile après six ans de mariage !
    La remarque me fit mal. C’était la première fois qu’une observation de ce genre me blessait ainsi. D’ordinaire, j’évitais de m’appesantir sur une carence dont je ne souffrais pas réellement. Trop occupée par mes affaires de cœur, je n’avais pas le temps de déplorer une privation que je ne considérais d’ailleurs en rien comme définitive. Le véritable obstacle à un quelconque projet de maternité résidait à mes yeux dans la personne du père et non dans la venue de l’enfant… Fallait-il que je sois devenue vulnérable pour accuser soudain le coup à propos d’une phrase qu’on m’avait déjà assez souvent adressée !
    — Je vais vous faire préparer votre ancienne chambre de jeune fille, enchaîna ma mère. Vous la trouviez à votre gré autrefois.
    — Ce sera parfait, balbutiai-je.
    Dans les heures qui suivirent mon retour, je constatai que la vie ne m’avait pas attendue entre les murs de la demeure paternelle. Antoine et François partis vers des emplois et des charges, mes trois plus jeunes sœurs bientôt bonnes à marier, Nourrice impotente, Jacquette gâtée par son mari et capricieuse à l’excès, mes parents déshabitués de ma présence, assez embarrassés du fardeau supplémentaire que je représentais pour eux, tout se liguait afin de me faire sentir le passage du temps ainsi que l’inopportunité de mon arrivée à Blois.
    Dès le lendemain, je me rendis chez les Musset.
    Ils habitaient Grande-Rue un bel hôtel superbement restauré.
    Je retrouvai Marie, ses vertugades de simple drap tanné qui lui donnaient l’aspect d’une brioche rebondie, ses yeux de velours brun, son allant, son amitié.
    Elle me fit asseoir près d’elle dans la grande salle du premier étage de sa maison, sur une banquette à haut dossier garnie d’épais coussins de tapisserie.
    — Si vous êtes venue, me dit-elle sans hésiter, c’est que la situation n’est plus tenable à Courtiras.
    — Vous aviez sans doute raison de me mettre en garde…
    — J’avais raison, bien sûr, mais qu’est-ce que cela change pour vous ?
    J’allais tout lui dire de mon tourment quand la porte s’ouvrit sur son époux. Claude de Musset rentrait du bailliage où il siégeait. Son habituelle amabilité souriante l’avait quitté. Il paraissait hors de lui.
    — Je viens d’apprendre que le nouveau pape Jules III a critiqué sans ménagements notre Roi devant l’ambassadeur de France auprès du Saint-Siège ! s’écria-t-il après m’avoir rapidement saluée. Il a été jusqu’à parler d’excommunier Henri II et de le priver de ses États, ce qui est inouï ! Il a même dit à Mendoza qui représente à Rome Charles Quint, qu’il octroierait ensuite le royaume de France au prince Philippe, le propre fils de l’Empereur ! C’est une infamie !
    Chacun savait que les rapports du Roi et du pape s’étaient détériorés

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