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Les Amours qui ont fait la France

Les Amours qui ont fait la France

Titel: Les Amours qui ont fait la France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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se levèrent.
    — Je crois opportun de profiter de l’occasion qui nous réunit, dit le prélat ami d’Isabeau, pour demander au roi Charles, qui vient d’avoir vingt ans, de régner par lui-même.
    Cette déclaration, qui fut acclamée, stupéfia les oncles du roi. Avant même qu’ils n’aient eu le temps de répondre, Charles se retourna vers eux en souriant, et, les ayant remerciés d’avoir gouverné la France pendant sa minorité, leur dit « qu’il se rendait au conseil qu’on lui donnait »…
    Les régents quittèrent la salle dans un état de fureur qui les empêchait de parler.
    Le lendemain, le cardinal de Laon était empoisonné.
     
    La mort de son ami ne troubla point la reine Isabeau. Elle se dit qu’il était impossible d’enregistrer des profits sans accepter quelques pertes, et, après avoir salué d’un sourire la mémoire du digne ecclésiastique, elle pensa avec ivresse à cette première réussite.
    La défaite des régents lui ouvrait pratiquement les portes du pouvoir. Elle allait, en effet, dicter désormais sa volonté au pauvre Charles VI qui lui était entièrement soumis. Cette pensée la remplit d’une joie immense et elle alla fêter sa victoire sur un lit bien solide avec Bois-Bourdon. Puis elle convia le duc de Touraine, qui devait avoir sa part de réjouissance, et lui donna, à son tour, le meilleur d’elle-même…
    Dans la semaine qui suivit l’assemblée de Reims, Charles VI, sur les conseils d’Isabeau, transforma profondément la cour. Tous les courtisans qui avaient été plus ou moins complices des détournements commis par les régents furent chassés. Il ne resta plus que quelques chevaliers – dont Bois-Bourdon, naturellement –, le duc de Bourbon et le duc de Touraine.
    Celui-ci eut même droit aux remerciements du roi :
    — Cher frère, c’est grâce à vous que j’ai pu me débarrasser de la lourde tutelle de mes oncles. En récompense, je vais envisager d’augmenter votre apanage.
    Malgré toutes ces gentillesses, Isabeau craignait que le roi ne soupçonnât les liens qui l’unissaient au jeune duc. Aussi conseilla-t-elle à son amant de chercher une épouse.
    Louis fixa son choix sur Valentine de Milan, fille de Galéas Visconti et d’Isabelle de France, sœur de Charles V. Ce qui fait dire au marquis de Sade, historien d’Isabeau de Bavière, « que le duc de Touraine avait des sentiments qui ne sortaient pas de sa famille, puisqu’il avait sa cousine pour femme et sa belle-sœur pour maîtresse… ».
    Ce mariage ne changea en rien, bien entendu, les rapports des deux amants, si ce n’est qu’il exigea de leur part une prudence supplémentaire.
     
    Ses relations extra-conjugales n’empêchaient pas la reine de se montrer une bonne et ardente épouse. Pendant les deux premières années de son mariage, elle avait même donné le jour à un garçon et à une fille ; ce dont lui avait su gré Charles VI.
    Le roi lui conservait d’ailleurs toute sa tendresse du premier jour. Bien qu’il se laissât entraîner parfois par son penchant pour la galanterie, puisque le chroniqueur de Saint-Denis nous parle de « ses appétits charnels, auxquels il se livrait contrairement aux devoirs du mariage », Charles VI se montrait plein d’attentions pour sa femme. Il lui faisait sans cesse des cadeaux magnifiques, qui tous étaient ornés d’un C et d’un I entrelacés, lettres qui se retrouvaient sur les bijoux, les vêtements les plus intimes de la reine, et jusque sur les ferrures de ses jarretières…
    Bref, malgré leur infidélité réciproque, ils s’aimaient bien tous les deux, et, un jour de 1389, le roi décida qu’Isabeau ferait son entrée officielle dans Paris et serait sacrée à Notre-Dame.
    Des fêtes extraordinaires marquèrent cet événement.
    La reine partit de Saint-Denis en litière, entourée des dames de sa cour. Les princes et les gentilshommes qui conduisaient les dames étaient à pied, et toutes les princesses portaient au front des couronnes d’or et de pierreries.
    Le cortège entra dans Paris par la porte Saint-Denis, où, d’après un chroniqueur, « la foule était si grande qu’on eût cru que tout le royaume se fût assemblé pour voir la cérémonie ».
    Froissart, qui vint à Paris spécialement pour ces fêtes, nous dit qu’en entrant dans la capitale la reine vit qu’on avait représenté, sous la voûte de la bastide Saint-Denis, un ciel tout étoilé et, « dans ce ciel, de jeunes

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