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Les Amours qui ont fait la France

Les Amours qui ont fait la France

Titel: Les Amours qui ont fait la France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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fiancée sur le seuil du château. Bientôt, précédant les chariots officiels, des cavaliers porteurs d’oriflammes parurent au détour du chemin, entourés d’une foule bruyante. Tout Compiègne, en effet, voulait assister à l’arrivée de leur future reine.
    À cinquante pas du château, le cortège s’immobilisa, et une cavalière d’une extraordinaire beauté s’avança, seule, vers le roi. Il se fit alors un grand silence.
    Philippe comprit que c’était Agnès et la contempla avec un ravissement mêlé de crainte.
    « Dieu, qu’elle est belle et que ses yeux sont brillants ! pensait-il. Pourvu que mon aiguillette ne se noue pas encore… »
    Souriante, Agnès s’approchait au pas lent de son cheval couleur de feu et considérait avec curiosité ce roi dont on lui avait tant parlé.
    Émerveillée, elle découvrit qu’il était beau malgré sa calvitie, que sa stature était imposante, et qu’il émanait quelque chose de majestueux de toute sa personne. Puis elle fut fascinée par le regard à la fois tendre et dominateur de Philippe.
    « Il doit être fort, pensait-elle naïvement, et il ferait bon se coucher avec lui… »
    Bref, quand elle descendit de cheval, elle était amoureuse…
     
    Le mariage fut célébré le lendemain en grande pompe. À la fin de la cérémonie, une foule nombreuse, massée sur le parvis de l’église, acclama le couple royal. Tout le monde remarqua alors que Philippe Auguste souriait – et son bonheur fit plaisir aux braves gens sans malice.
    — Comme il est heureux, dit une femme, d’avoir une aussi jolie reine à mignoter…
    — S’il y arrive !… lança quelqu’un en ricanant.
    Il y eut un immense éclat de rire, et un gros homme s’écria :
    — Oui, oui ! parce qu’il n’a pas l’air d’être très fort au jeu du pousse avant, notre gentil sire…
    Le mot eut du succès, et bientôt tout le bon peuple de Compiègne se demanda si le roi pourrait ou ne pourrait pas, comme on disait alors, planter son mai…
    Philippe Auguste traversa la ville sans soupçonner la part d’ironie qu’il pouvait y avoir dans les acclamations et conduisit Agnès, vêtue d’une longue robe en fils d’or, jusqu’au château.
    Quand le soir arriva, quelques personnes pieuses se mirent à prier pour que le roi de France sortît victorieux de toutes ses entreprises, cependant que la plupart des habitants de Compiègne s’installaient dans une taverne, pour y passer la nuit à vider des brocs de vin blanc en se racontant des obscénités…
    Le lendemain matin, un garde du château, soudoyé, entra en courant dans la salle où les consommateurs, qui avaient bu et chanté jusqu’à l’aube, somnolaient sur les tables. Il les réveilla d’un mot :
    — Victoire !
    Il y eut alors un brouhaha, et le garde, très entouré, s’écria de nouveau, avec un grand sérieux :
    — Victoire ! Le roi a pu !
    Aussitôt, on lui demanda s’il était sûr du fait. Il prit un air offensé :
    — J’étais derrière la porte…
    Puis il expliqua que les choses s’étaient admirablement passées et que le drap qui prouvait la virginité d’Agnès avait été promené dans le château.
    Bientôt, tout Compiègne fut au courant. D’une fenêtre à l’autre, les gens s’interpellaient :
    — Vous savez, le roi a pu !
    — Vive le roi !
    Des groupes se formaient dans la rue, commentant l’événement. On vida des pichets de vin, on trinqua et, à midi, tout le monde était d’accord pour dire que la nouvelle allait faire très bon effet à l’étranger…
     
    Philippe Auguste et Agnès eurent une lune de miel qui émerveilla le bon peuple toujours sentimental. Le roi ne quittait pas la nouvelle reine. On les voyait ensemble à la chasse, aux tournois, aux assemblées de poètes. On les applaudissait, les trouvères composaient sur leur bonheur des chansons dithyrambiques et l’on finissait par oublier complètement Ingeburge, qui continuait à pleurer dans son couvent.
    La pauvre avait été mise au courant du remariage de Philippe Auguste. Elle savait qu’il était passionnément épris d’Agnès, et cela lui causait « très grande douleur ». Des jours entiers, elle sanglotait en se demandant ce qu’elle avait pu faire pour que le roi lui vouât une haine aussi féroce, alors qu’elle l’aimait tant.
    Parfois, soutenue par une confiance extraordinaire, elle reprenait espoir et imaginait Philippe Auguste entrant dans sa cellule et l’invitant

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