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Les Amours qui ont fait la France

Les Amours qui ont fait la France

Titel: Les Amours qui ont fait la France Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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philosophes avaient l’habitude de fonder leur raisonnement sur une expérience…
     
    Quelques jours après leur arrestation, les trois princesses furent interrogées par une cour formée de hauts personnages. Marguerite comparut la première. Avant qu’elle n’ait eu le temps de nier, on lui apprit que son huissier de chambre, mis à la question, avait parlé. Puis, sans lui laisser le loisir de se reprendre, on lui annonça que Philippe d’Aulnay avait été arrêté. Elle chancela. C’est le moment que choisit un juge pour lui donner quelques précisions :
    — Ce chevalier, madame, après avoir subi quelques-unes de ces tortures dont il nous faut user avec les gens discrets, a fini par avouer qu’il était depuis trois ans votre amant.
    Marguerite, alors, s’effondra.
    — Vous savez, madame, ajouta le juge en la regardant dans les yeux, ce qui attend un chevalier lorsqu’il a osé séduire la femme de son suzerain. Ce crime de haute trahison est puni de mort lente et atroce.
    À la pensée que Philippe allait mourir, Marguerite éclata en sanglots, tomba à genoux et avoua tout.
    Blanche fit de même lorsqu’elle sut que Gautier avait parlé, lui aussi, sur le chevalet de torture.
    Quant à Jeanne, qui s’était reprise, elle se défendit pied à pied. Voulant se disculper complètement, elle prétendit qu’elle ne savait rien des agissements de Marguerite et de Blanche, qu’elle « n’était pas de leur cour ni en leurs secrets conseils appelée », et finalement demanda à voir le roi.
    Philippe le Bel la reçut.
    — Je jure, messire, que je suis prude femme ! s’écria-t-elle.
    Le roi lui assura qu’on allait faire ce que nous appelons aujourd’hui un « complément d’enquête » et lui dit :
    — Dame, nous saurons de ceci, et droit vous ferons, mais jusque-là, vous demeurerez par-devers nous.
    Après quoi, il la fit conduire, avec quelques égards, au château de Dourdan, où elle fut gardée prisonnière.
    Un traitement moins doux fut réservé aux deux coupables. Blanche et Marguerite, convaincues d’adultère, ne pouvaient espérer, il est vrai, la moindre indulgence. Elles furent tondues, vêtues de bure et incarcérées à Château-Gaillard, près des Andelys, dans d’humides cachots.
     
    Pendant ce temps, Philippe et Gautier d’Aulnay attendaient dans une prison de Pontoise que la sentence de mort lente qui les frappait fût exécutée.
    Un matin, des archers vinrent les chercher. Ils les conduisirent sur la place du Martroi où leur supplice devait avoir lieu, et où une foule immense les avait précédés, toute joyeuse d’assister à un spectacle à sensation…
    Lorsque le prévôt en grande robe fourrée eut pris place sur son estrade, un silence impressionnant s’établit, et les deux frères furent confiés aux bourreaux qui se mirent aussitôt au travail. En raison de la nature du crime commis, ils commencèrent par leur couper d’un coup de dague les parties génitales. Puis les malheureux furent écorchés vifs. Ce supplice, qui leur faisait pousser d’effroyables hurlements, dura près d’une heure. Ensuite de quoi, on les écartela, et comme, malgré toutes ces tortures, ils vivaient encore, on les fit traîner par des chevaux sur un chaume fraîchement coupé. Enfin, on les décapita et on suspendit au gibet par les aisselles leurs pauvres corps en loques [94] .
    Justice n’était cependant pas faite pour autant. L’huissier de chambre qui avait ménagé les entrevues amoureuses, les dames de la cour qui avaient aidé les princesses dans leurs intrigues, des hommes, des femmes soupçonnés d’avoir favorisé, ou simplement connu les choses, furent arrêtés, mis à la question et pendus. Un évêque, compromis par les aveux arrachés dans les tourments à l’une de ces victimes, se vit, sans savoir pourquoi, soumis à l’inquisition d’Avignon, accusé de sortilège et brûlé.
    Pendant des semaines, Philippe le Bel, animé par une sorte de rage, fit arrêter toute personne sur laquelle planait le moindre soupçon. Les chroniqueurs du temps nous disent « qu’on les pendait, qu’on les brûlait, qu’on en faisait périr par supplices secrets et qu’on en cousait dans des sacs qu’on jetait en rivière ».
    Bientôt, tous ceux qui de près ou de loin avaient approché les princesses se mirent à trembler de peur, et la terreur régna sur le Louvre jusqu’au jour de 1314, le 29 novembre exactement, où une nouvelle stupéfiante arriva

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