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Les années folles

Les années folles

Titel: Les années folles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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se réveiller
et de venir la voir…

Chapitre 16
Un début d’année mouvementé
    Au
début de la seconde semaine de janvier, de petites chutes de neige quotidiennes
vinrent couvrir le verglas tombé au début du mois. Le mercure se maintint alors
résolument autour des - 15, - 20 degrés. Quand le vent se levait, la
température chutait encore plus brutalement, condamnant les gens à s’enfermer
dans leur maison où le poêle, même chauffé à blanc, avait peine à maintenir un
peu de chaleur. La consommation de bois était alors effarante et les cordes de
bûches entassées dans les remises fondaient littéralement.
    Dans
la plupart des foyers de Saint-Jacques-de-la-Rive, il n’était pas question de
rester des journées entières près du poêle à ne rien faire. Aussitôt que le
vent tombait, les hommes s’habillaient, attelaient les chevaux aux traîneaux et
prenaient la direction de leur « terre à bois ». Bûcher et scier dans
le sous-bois, dans la neige à mi-jambes, exigeaient alors une endurance peu
commune. Il n’était pas rare de voir revenir les hommes à l’heure du midi, les
pieds et les mains insensibilisés par le froid et la moustache couverte de
glace. Ils mangeaient et, après une courte sieste, ils repartaient jusqu’à la
tombée de la nuit. C’était le prix à payer pour avoir suffisamment de bois de
chauffage pour l’année.
    Pendant ce temps, les
femmes ne demeuraient pas inactives, loin de là. Après avoir accompli leurs
tâches ménagères habituelles, la plupart d’entre elles travaillaient à tricoter,
à coudre ou à confectionner des catalognes et des courtepointes avec de vieux
tissus soigneusement lavés et découpés.
    Le vendredi
avant-midi, Ernest Veilleux décida d’aller avec son fils Jérôme chez Murray, à
Pierreville, pour se procurer quelques poches de moulée. Le temps plus doux de
cette journée nuageuse se prêtait bien à ce déplacement. Le père et le fils
partirent peu après le déjeuner et leur attelage couvrit sans trop de mal les
cinq milles les séparant de la petite municipalité voisine. Ils ne
rencontrèrent pas d’accumulations importantes de neige sur la route, même s’il
avait neigé la nuit précédente.
    À sa sortie du
magasin Murray, Ernest tomba nez à nez avec Georges Dufresne, un cousin de sa
femme, un des nombreux organisateurs du parti conservateur dans le comté de
Nicolet.
    – Viens boire
un remontant à l’hôtel avant de t’en retourner, l’invita le gros homme à la
mine débonnaire. J’ai toute une nouvelle à t’annoncer.
    – J’aimerais
ben, fît Ernest, mais j’ai mon gars avec moi et
il est trop jeune pour entrer chez Traversy.
    –  Laisse faire Traversy. Il dira rien si
ton garçon boit juste une liqueur.
    Les
deux hommes, suivis par l’adolescent, traversèrent la rue et pénétrèrent dans l’hôtel.
Il n’y avait dans la taverne que deux clients assis à l’une des petites tables
disposées un peu partout dans la grande pièce chichement éclairée.
    Traversy était un bât iment
en bois à un étage, paré d’un large balcon sur deux côtés. L’été, Léopold
Traversy mettait une vingtaine de bonnes chaises berçantes sur le balcon à la
disposition tant des clients de sa taverne du rez-de-chaussée que des locataires
des dix chambres de son hôtel, par ailleurs fort bien tenu.
    – Comme ça, tu
connais pas la nouvelle ? demanda Georges Dufresne en se laissant tomber
sur une chaise après avoir commandé deux bouteilles de bière et une boisson
gazeuse.
    – Quelle
nouvelle ? demanda le cultivateur avec une certaine impatience.
    – Taschereau
a déclenché des élections générales hier soir.
    – En plein
hiver ? fit Ernest Veilleux, surpris. C’est ben la première fois que je
vois ça ! Qu’est-ce qui pressait tant ? Pourquoi il a pas attendu au
printemps ou à l’été, comme ça s’est toujours fait ?
    – Les quatre
ans sont passés, Ernest. Oublie pas que Gouin a été élu en 19. Taschereau a été
nommé à sa place quand son beau-père a lâché pour le fédéral.
    – C’était
juste un rouge de moins, railla Ernest avec un sourire mauvais.
    – Avec tout
ça, Taschereau a encore jamais été élu premier ministre. Je pense qu’il a hâte
de se faire nommer par le peuple.
    – Il aurait
pu attendre à la fin du printemps avant de manger une volée, répéta Ernest
Veilleux. Es-tu ben sûr qu’il déclenche pas les élections en plein hiver parce
qu’il

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