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Les années folles

Les années folles

Titel: Les années folles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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les manches de sa chemise relevées sur ses bras
maigres, était en train de se laver les mains couvertes de plâtre.
    – Puis, docteur,
comment va le père ? demanda-t-il au vieux médecin.
    – Il va s’en
tirer. Il a une jambe cassée et je viens de lui faire un plâtre jusqu’à
mi-cuisse. Normalement, dans une quarantaine de jours, je devrais être capable
de le lui enlever.
    – Bon.
    – Mais c’est
pas mal plus grave pour le petit, ajouta Courchesne en baissant la voix.
    Pendant
que les deux hommes s’entretenaient à voix basse près de l’évier, Yvette ne put
contenir ses cris de détresse.
    – Docteur !
Docteur ! Venez vite ! cria Céline.
    Albéric
Courchesne retourna dans le salon précipitamment et s’approcha du sofa sur
lequel le petit garçon était étendu. Ce dernier avait enfin les yeux grands
ouverts, mais ils ne regarderaient jamais plus personne. Le médecin prit le
pouls d’Adrien et secoua la tête avant d’abaisser ses paupières du bout des
doigts.
    – Il est
parti, se contenta-t-il de dire en remontant doucement la couverture jusqu’au
menton du petit.
    Yvette
s’effondra totalement et fut la proie d’une véritable crise. Ses deux filles
durent l’entraîner de force dans la cuisine où Albéric Courchesne l’obligea à
prendre un calmant. Sorti de sa torpeur par les cris de détresse de sa femme, Ernest
appelait de sa chambre pour savoir ce qui se passait chez lui.
    – Occupez-vous
de votre mère pendant que je vais aller parler à votre père, dit Antoine
Lussier aux enfants.
    Le
docteur Courchesne s’esquiva après avoir signé le certificat de décès de l’enfant.
Le curé Lussier prit une longue inspiration et pénétra dans la chambre. Il y
demeura une dizaine de minutes. Il n’y eut pas d’éclat. Quand le prêtre sortit
de la pièce en laissant la porte ouverte derrière lui, Jérôme alla voir si son
père avait besoin de quelque chose. Il le découvrit, tassé au fond de son lit, le
visage blanc, les yeux secs et les dents serrées.
    – Maudite vie
de chien ! se contenta-t-il de répéter à plusieurs reprises, la voix méconnaissable,
en frappant le matelas à coups redoublés.
    Pendant ce temps, Antoine Lussier s’était assis aux côtés d’Yvette dans
la cuisine.
    –  C’est pas
juste ! C’est pas juste ! répéta-t-elle en s’essuyant les yeux avec
un mouchoir qu’elle avait tiré de sa manche.
    – Il faut
croire que Dieu avait d’autres desseins pour ton garçon, lui dit doucement le
cousin de son mari. Le devoir d’une bonne chrétienne est d’accepter la volonté
divine. Tu te rappelles que l’Évangile dit que les enfants appartiennent pas
aux parents, ils ne leur sont que prêtés.
    – Il avait
juste neuf ans, monsieur le curé !
    – Dieu a dit
qu’il viendrait nous chercher comme un voleur. L’âge a rien à voir. Rappelle-toi
que t’es une mère et que tes autres enfants comptent sur toi pour les aider à
passer cette épreuve.
    – C’est vrai que
Jean-Paul et Léo sont pas encore revenus de l’école, dit Yvette en semblant
reprendre pied dans la réalité. Et les autres… Il faut avertir Marcelle, Maurice
et Albert.
    – Si
vous le voulez, m’man, je vais aller reconduire monsieur le curé au presbytère,
dit Jérôme. Si vous me donnez le numéro de téléphone du couvent de Marcelle à
Sorel, je peux l’appeler du magasin général.
    – C’est ça et
tu lui diras d’appeler Maurice et Albert à Montréal, fit sa mère en faisant un
effort méritoire pour se secouer.
    – Il faudrait
aussi prévenir les Desfossés, lui rappela doucement le curé Lussier.
    – Pour ça, il
faudrait en parler à mon mari…
    Soudain,
Yvette se rendit compte qu’elle ne s’était pratiquement pas souciée d’Ernest
depuis que le docteu r.
    Courchesne lui
avait appris la gravité de la blessure de son Adrien.
    – Mon Dieu !
s’écria-t-elle en se levant après s’être encore essuyé les yeux. Je sais même
pas s’il a été soigné, ce pauvre Ernest.
    Yvette
entra dans la chambre, suivie par son fils Jérôme.
    – Tu sais
pour Adrien ? demanda-t-elle, en luttant contre son envie de se remettre à
pleurer.
    – Ouais, murmura
son mari. J’aurais dû t’écouter. J’aurais jamais dû l’amener avec nous autres
dans le bois, ajouta-t-il, apparemment tiraillé par les remords.
    – Ce qui est
fait est fait, le coupa sa femme. On pourra pas le ressusciter. Là, j’ai
demandé à Jérôme de

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