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Les années folles

Les années folles

Titel: Les années folles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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paternelle
dès qu’il eut avalé la dernière bouchée de son repas.
    – Il a pas l’air
dans son assiette aujourd’hui, dit Eugène en montrant son fils aîné à sa femme.
    – Céline s’en
va rester quelque temps chez une cousine, à Montréal, expliqua Thérèse en
jetant un coup d’œil au jeune homme par la fenêtre.
    Moins d’une heure plus tard, une automobile, rendue grise par la
poussière du chemin, passa devant la maison des Tremblay avant d’entrer dans la
cour de la ferme des Veilleux. Quelques minutes plus tard, le même véhicule
repassa sur le rang Sainte-Marie et Clément salua de la main son amie de cœur
qui, elle aussi, lui envoya la main au passage. Quand le nuage de poussière
soulevé par le véhicule eut retombé, le jeune homme rentra dans la maison et
monta dans sa chambre.

Chapitre 23
Les grandes décisions
    Les
arbres avaient échangé leurs bourgeons pour des feuilles au vert tendre qui
bruissaient à la moindre brise. Comme par miracle, l’herbe s’était mise à
pousser. Le soleil chaud de ce début de mois de mai rendait les odeurs de
fumier de plus en plus entêtantes. On finissait d’épandre ce dernier dans les
champs et déjà, certains cultivateurs avaient commencé à retourner le sol.
    Dans les maisons, le
grand ménage du printemps avait débuté quelques jours auparavant. Partout, on s’apprêtait
à em ménager dans les cuisines d’été pour la belle
saison. Mais avant de s’y installer, il fallait d’abord nettoyer à fond la
pièce où on allait vivre jusqu’au milieu de l’automne suivant. En outre, il
était nécessaire de laver à fond les plafonds et les murs de toutes les pièces
de la maison, pièces salies autant par le chauffage de l’hiver que par la fumée
de pipe.
    Chez les Tremblay,
Thérèse venait à peine de terminer le lavage du salon avec l’aide de Claire ce
mardi matin là quand elle aperçut son mari revenant de chez le forgeron Crevier
avec le boghei dont il avait dû faire réparer une roue.
    – Ah non, pas
encore ! s’exclama Thérèse en voyant l’attelage s’arrêter devant la porte
de la cuisine d’été.
    – Qu’est-ce
qu’il y a, m’man ? demanda Claire en tordant la guenille avec laquelle
elle finissait de laver le parquet du salon.
    – Viens voir,
l’invita sa mère. Je pense que ton père a encore changé de cheval.
    – C’est pas
vrai ! s’écria à son tour la jeune fille en se penchant à la fenêtre.
    Le boghei était
attelé à un gros cheval noir qui renâclait et piaffait pendant que son maître l’attachait
au garde-fou du balcon. Thérèse et Claire sortirent sur le balcon.
    – Vous avez
vu ? demanda Eugène, tout fier de leur montrer l’animal à côté duquel il
se tenait. Je viens de faire une batèche de bonne affaire.
    – J’ai vu, répondit
Thérèse sans aucun enthousiasme, les mains sur les hanches. On dirait bien que
t’apprendras jamais rien, Eugène Tremblay. Je suppose que t’as échangé notre
Mémaine pour ça. Où est-ce que t’as trouvé cette picouille-là ?
    – D’abord, Thérèse
Durand, ce cheval-là, c’est pas une picouille, répliqua son mari, piqué au vif
par la remarque de sa femme. Il s’appelle Piton et il a juste cinq ans, trois
ans de moins que Mémaine. Je viens de l’échanger à un cultivateur de
Saint-Gérard.
    – C’est ça, se
moqua sa femme, sarcastique. Je suppose aussi que tu vas me dire que tu viens
de faire un échange extraordinaire, comme les autres fois.
    – En plein ça,
plastronna son mari, en donnant une grande tape à la croupe de sa nouvelle bête
qui broncha légèrement.
    – Bien, voyons !
Tous les ans, c’est la même histoire depuis qu’on est mariés. Chaque printemps,
il faut que tu changes un de nos deux chevaux… et chaque fois, tu nous reviens
avec un animal vicieux ou malade.
    – Torrieu, exagère
pas ! se fâcha le cultivateur. Tu sauras que je viens d’une famille de
maquignons. Chez les Tremblay, on connaît ça, les chevaux. Celui qui va nous
voler est pas encore au monde.
    – Bien oui. C’est
pour ça que ta Mémaine était malade plus souvent qu’à son tour depuis que tu
nous l’avais ramenée en échange de notre Prince qui lui, était en parfaite
santé. En tout cas, Eugène, viens surtout pas te plaindre que t’as de la misère
avec ce cheval-là. Il est noir comme l’enfer et il m’a l’air nerveux sans bon
sens.
    – Tu vas voir,
il va être le meilleur de nos deux chevaux et,

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