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Les années folles

Les années folles

Titel: Les années folles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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jusqu’à la fin du printemps suivant.
    Lorsque Jérôme eut
terminé son travail, on lava le plafond, les murs, les fenêtres et le parquet
avant l’heure du dîner. Après le repas, on replaça dans la cuisine d’hiver tout
ce qui avait été transporté le printemps précédent dans la cuisine d’été. Ce n’est
que vers la fin de l’après-midi qu’on finit de ranger et de nettoyer la cuisine
d’été et qu’on laissa le poêle de la pièce s’éteindre.
    Le
soir même, Yvette crut bon de préciser à tous les membres de sa famille qu’il
était pas question que qui que ce soit laisse traîner des choses dans la
cuisine d’été.
    –  Je vous
préviens qu’on n’a pas travaillé comme des folles à la nettoyer pour rien, dit-elle
sur un ton sévère. Toutes vos cochonneries, vous les laisserez dans la remise.
    Pendant
que Léo, Adrien et Jean-Paul faisaient leurs devoirs à un bout de la table, Céline
et Anne discutaient à voix basse en tournant, encore une fois, les pages du
catalogue de Simpsons-Sears. À plusieurs reprises durant la journée, les deux
jeunes filles avaient tenu à voix basse des conciliabules qui s’éteignaient
aussitôt que leur mère entrait dans la pièce où elles travaillaient.
    – Avez-vous
fini avec vos messes basses ? avait fini par leur demander Yvette, excédée.
Qu’est-ce que vous avez tant à vous raconter toutes les deux ?
    – Rien, m’man.
On parlait juste de mode.
    Leur
mère leur jeta un regard sévère, plein de suspicion. Yvette se serait sûrement
plus inquiétée si elle avait remarqué la disparition de ses ciseaux du tiroir
de sa vieille machine à coudre Singer.
    Le soir venu, après
la prière commune, tout le monde regagna sa chambre. Anne attendit quelques
minutes que toute la maison soit endormie pour quitter sa chambre à coucher sur
le bout des pieds. Elle alla s’emparer de la petite lampe à huile déposée sur
un guéridon, près de l’escalier. On la laissait là à la disposition de ceux qui
avaient besoin de s’éclairer pour aller aux toilettes au bout de la remise, durant
la nuit.
    De retour dans la
chambre, l’adolescente alluma la lampe et la déposa sur l’unique bureau de la
pièce avant de s’asseoir sur le lit qu’elle partageait avec sa sœur.
    – Es-tu sûre
qu’il nous arrivera rien ? demanda-t-elle à voix basse à sa sœur aînée.
    – Qu’est-ce
que tu veux qu’il nous arrive ? rétorqua cette dernière.
    –  P’ pa sera pas content pantoute quand il va
nous voir arrangées comme ça.
    – Puis
après, reprit Céline qui faisait de réels efforts pour afficher une assurance
qu’elle était loin d’éprouver. Qu’est-ce que tu veux qu’il nous fasse ? Il
pourra tout de même pas recoller nos cheveux.
    – On pourrait
en manger toute une !
    – Écoute. Si
t’as trop peur, laisse faire, fit sa sœur sur un ton méprisant, en plaçant la
lampe à huile devant le miroir rectangulaire suspendu au-dessus du bureau.
    La
jeune fille saisit les ciseaux dissimulés sous son oreiller. Elle s’assit
devant le miroir et elle détacha ses longs cheveux bruns bouclés qui
descendaient très bas dans son dos . Après
un bref moment d’hésitation, elle saisit une longue mèche et la coupa. Puis, comme
emportée par son élan, Céline Veilleux se mit à couper elle-même sa magnifique
chevelure sous les yeux de sa jeune sœur, muette d’admiration devant tant de
courage. Après une dizaine de minutes de travail, il ne lui resta plus qu’à
couper son toupet.
    À la vue de l’amoncellement de cheveux sur
le bureau et sur le parquet, Céline sembla saisir soudain toute la portée de
son geste. Un peu tremblante, elle déposa les ciseaux devant elle sur le bureau
et mit ses cheveux dans une vieille taie d’oreiller avant de se lever.
    Aussitôt, sa sœur
prit sa place devant le miroir.
    – Envoye !
Coupe les miens aussi, ordonna-t-elle à Céline. Tu seras pas toute seule à être
à la mode demain matin quand on va se lever.
    – T’es sûre
que c’ est
ce que tu veux ? lui
demanda sa sœur, hésitante.
    – Grouille, sacrifice !
Je suis pas pour passer toute la nuit sur la chaise.
    En
quelques instants, la chevelure de l’adolescente alla rejoindre celle de sa sœur
dans la taie d’oreiller. À la fin de l’opération, l’une et l’autre n’eurent
pas le cœur de s’admirer très longtemps dans le miroir tant elles étaient
énervées d’avoir osé passer outre à l’interdit de

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