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Les années folles

Les années folles

Titel: Les années folles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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la table.
    – Et vous, p’ pa, qu’est-ce que vous en pensez ? demanda
Clément en tournant la tête vers son père qui, jusqu’alors, n’avait pas
prononcé un mot.
    – Penses-y
ben comme il faut avant de te décider, se contenta de dire Eugène Tremblay à
son fils aîné. Tu feras ce que tu voudras.
    Là-dessus, le père de famille quitta la pièce et entra dans sa chambre
à coucher pour sa sacro-sainte sieste du dimanche après-midi.
    –  Ce serait
pas bien fin de ta part de le laisser travailler tout seul tout l’hiver, chuchota
Claire à son frère.
    – Aie,
la grande, mêle-toi donc de tes affaires ! s’emporta Clément, tiraillé par
l’indécision.
    – En plus, moi,
je suis pas un coton, intervint Gérald. Si Clément est pas là, je suis capable
de prendre sa place.
    – Toute une
aide ! se moqua l’aînée en tournant le dos à ses deux frères.
    – Claire, arrête
de faire étriver tes deux frères et viens laver la vaisselle avec nous autres, l’invita
sa mère à mi-voix.
    – Vous
direz à p’ pa que j’ai attelé pour aller faire un
tour chez les Dupré dans le Petit-Brûlé, dit le jeune homme avant de quitter la
maison.
    Au milieu de l’après-midi,
Eugène venait à peine de finir sa sieste quand il vit arriver chez lui Wilfrid
et Marthe Giguère. Après avoir retiré leur manteau, le maire et sa femme s’installèrent
à la table de cuisine. Pendant que Thérèse parlait de ses projets de
courtepointes avec sa sœur et sa fille Claire à une extrémité de la table, les
deux beaux-frères s’entretenaient de l’élection du nouveau marguillier pour
remplacer Ludger Parenteau le lendemain soir. Il en avait été largement
question à la fin de la grand-messe.
    – J’ai parlé
tantôt à Tit-Phège Turcotte, dit le maire. Tu le connais comme moi : il
aime ça fouiner. Il est allé jaser dans le groupe de ton voisin après la
grand-messe.
    – Ah oui ?
    – Il paraît
qu’on parlait pas mal du prochain marguillier. Veilleux avait l’air pas mal sûr
d’être nommé sur le conseil de fabrique. Il paraîtrait que le curé lui a
presque promis la place.
    – Elle serait
bonne, celle-là ! ne put s’empêcher de s’exclamer Eugène, immédiatement en
proie à la jalousie. Mais ça serait pas surprenant, avec son cousin !
    Les
femmes cessèrent de parler entre elles pour écouter ce que les hommes disaient.
    – Ça se
pourrait ben qu’il soit nommé, reprit le grand homme maigre en passant ses
doigts dans sa chevelure clairsemée.
    – Dans ce
cas-là, je peux te garantir que le curé en entendrait parler en maudit, reprit
son beau-frère.
    – Veilleux a
tout de même l’âge et il a jamais été marguillier, lui fit remarquer le maire, se
faisant l’avocat du diable.
    – Ouais !
Je le vois déjà trônant comme un petit coq dans le premier banc en avant de l’église
ou en train de passer la quête durant la messe, dit Eugène, mi-figue mi-raisin.
    – C’est sûr
que ce serait ben à ton tour d’être sur le conseil, reconnut Wilfrid.
    – Ça pourrait
être ton tour aussi, fit Eugène, magnanime. Si t’étais nommé, ça me dérangerait
pas pantoute.
    – Pour te
dire ben franchement, j’ai déjà ben assez des troubles de la mairie, dit le
maire, sans cacher tout à fait son envie de devenir le prochain marguillier.
    – En tout cas,
le curé est ben mieux de se watcher demain soir quand le conseil va se
réunir pour l’élection. Tout le monde sait dans la paroisse que c’est lui qui
accepte ou non celui que les marguilliers proposent.
    De toute évidence,
Thérèse en avait assez entendu et elle laissa éclater sa colère.
    – Vous deux, ça
va faire ! s’écria-t-elle. Monsieur le curé nommera bien qui il voudra et
c’est pas à vous autres de lui dire ce qu’il a à faire. Vous viendrez pas débiner
un prêtre dans ma maison.
    – Whow, la Dame
de Sainte-Anne ! Fâche-toi pas, dit son mari en riant jaune. On faisait
juste parler.
    – Si ça vous
fait rien, j’aimerais mieux que vous parliez d’autre chose.
    – Thérèse
a raison, approuva Marthe. On dirait que vous êtes en train de virer fous avec
cette histoire-là.
    Les
Tremblay ne revirent Clément qu’à l’heure du train, à la fin de l’après-midi. Quand
il pénétra dans l’étable, vêtu de ses habits de travail, il s’arrêta un instant
auprès de son père occupé à laver les bidons de lait qui seraient utilisés pour
la traite.
    – J’ai

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