Les années folles
liste, il y a pas de problèmes. Remarque
qu’il y aurait les Tougas qui devraient être capables de mieux se débrouiller
avec leurs grands garçons, mais ils sont mous tous les deux.
– Ça marche
comme ça, fit le marguillier en se levant. Est-ce qu’on va vous voir, vous ou l’abbé
Martel, demain ?
– Je vais
essayer d’aller faire un tour demain avant-midi, promit le curé Lussier. Mais
je vais au moins vous envoyer ma nouvelle servante pour donner un coup de main.
Oublie pas de dire à Germain Fournier qu’on a besoin de lui demain.
Sur
la promesse de s’en souvenir, le président de la fabrique quitta le presbytère
et rentra chez lui.
Le lendemain, le
soleil se leva dans un ciel sans nuage. Il faisait un froid sec et tous les
rangs de Saint-Jacques-de-la-Rive étaient bien dégagés. La première tempête de
la saison, la semaine précédente, avait laissé des bordures de près de trois
pieds de hauteur bien balisées par des branches de sapin.
Dès le début de l’avant-midi,
on pouvait entendre les clochettes des attelages de ceux qui avaient entrepris
la tournée des fermes pour ramasser la nourriture et les vêtements que les gens
destinaient aux pauvres de la paroisse.
Dans la classe
unique de l’école du village, les pupitres avaient été repoussés le long des
murs et déjà quelques femmes et jeunes filles, sous la direction de Thérèse Tremblay,
triaient ce qui avait été apporté là durant la semaine. On attendait avec une
certaine fébrilité l’arrivée de la première sleigh chargée de provisions pour
commencer la préparation des paniers de Noël.
Un peu plus tôt, Jérôme
Veilleux était venu conduire sa sœur Céline avant de retourner à la ferme
paternelle. La mère, légèrement grippée, n’avait pu quitter la maison. Par
ailleurs, il n’était pas question qu’Ernest Veilleux fasse la tournée pour la
guignolée. Il y avait de trop fortes chances pour qu’il se retrouve face à face
avec son voisin, Eugène Tremblay.
Par ailleurs, ce
dernier avait toujours résisté aux efforts de sa femme, Thérèse, de le faire
participer à cette œuvre paroissiale pour les mêmes raisons. S’il ne s’était
pas opposé à ce que son fils Clément aille faire la tournée après avoir laissé
sa mère à l’école du village, il n’était pas question qu’il prenne une part
active à cette activité charitable. Bref, les deux ennemis irréconciliables ne
voyaient aucun inconvénient à ce que les leurs participent à la guignolée
pourvu qu’on ne les oblige pas à se côtoyer.
Lorsque Gabrielle
Paré était entrée dans la classe, Thérèse Tremblay, prévenue le matin même par
Agathe Cournoyer, présenta la jeune fille aux personnes présentes. Un peu
intimidée par la dizaine de personnes présentes, l’orpheline se mit au travail discrètement,
se contentant d’écouter les autres échanger des remarques souvent humoristiques. À Thérèse Tremblay et à une autre dame du
même âge s’étaient jointes quatre jeunes filles d’une vingtaine d’années et
deux hommes maintenant occupés à transporter les boîtes trop lourdes.
En pénétrant dans
l’école du village quelques minutes plus tôt, Germain Fournier avait craint
durant un instant être le seul homme au milieu de toutes ces femmes. Il avait
rougi violemment quand toutes les têtes s’étaient tournées dans sa direction à
son entrée. Heureusement qu’il avait alors aperçu Albert Desrosiers, le fils d’un
cultivateur du rang Saint-Paul, en train d’empiler des bûches près du poêle. Le
jeune célibataire s’était immédiatement dirigé vers lui. Quand Honoré Beaudoin
s’était arrêté chez lui, la veille, pour lui demander de venir aider, sa
première réaction avait été de se trouver une excuse pour ne pas y aller.
– T’auras pas
à faire la tournée, s’était empressé de lui expliquer le marguillier. T’auras
juste à donner un coup de main à l’école du village et ce sera pas long. Chacun
fait sa part, Germain. En plus, ça te donnera la chance de jaser avec tes voisins.
Il y en a plusieurs qui vont venir. Immédiatement, Germain avait songé qu’il y
avait de fortes chances que Céline Veilleux soit présente et il avait promis d’être
là.
Ce matin-là, il
avait soigné sa toilette après avoir déjeuné. Il avait bien fait. Céline
Veilleux était le premier visage qu’il avait aperçu en entrant dans l’école. Son
cœur avait fait un bond en la
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