Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les autels de la peur

Les autels de la peur

Titel: Les autels de la peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Margerit
Vom Netzwerk:
haine de la Révolution, ils attendaient leurs amis émigrés et les Allemands, afin de leur donner la main en attaquant les patriotes. Or, les Autrichiens venaient d’opérer leur jonction, sur les frontières du nord et du nord-est, avec les Prussiens et l’armée des princes. 25 ooo Autrichiens assortis de 4 000 émigrés menaçaient Lille. 17 000 impériaux et 5 000 hommes de Condé s’apprêtaient à envahir l’Alsace. 80 000 Prussiens, avec un corps de Français traîtres, marchaient par le Luxembourg sur la Lorraine, en direction de Longwy. On risquait d’être pris bientôt entre ces 13o ooo assaillants et l’ennemi intérieur.
    Claude, quant à lui, estimait nécessaire d’aller vite pour frapper les coupables mais aussi pour acquitter les innocents. Le Comité de surveillance ne pouvait pratiquer qu’un tri grossier sur le vu des dénonciations. On arrêtait bien des gens qu’après instruction le tribunal relâcherait comme il avait relâché le colonel d’Affry. Le régime n’avait certes pas besoin de grossir le nombre de ses adversaires en se rendant odieux à d’honnêtes citoyens victimes de vengeances personnelles, de jalousies ou de l’envie. Il importait à la justice, d’abord, mais tout autant à l’intérêt national, que toute personne arrêtée fût jugée dans les vingt-quatre heures, déclara Claude dans un rapport verbal que le Comité l’avait chargé de faire à l’Assemblée municipale. Les tribunes applaudirent, Marat le premier, dans celle que le Conseil général lui avait attribuée spécialement. Hébert se leva et dit : « Le temps presse. Je demande que Mounier-Dupré aille sur-le-champ répéter son rapport, en notre nom, au garde des sceaux, puisqu’il est trop occupé pour venir à nos séances. » En effet, on ne voyait plus guère Danton à la Commune.
    Claude se rendit donc à la Chancellerie, où, lui annonça-t-on, le ministre était en train de présider le conseil de la magistrature (ce fut, du reste, la seule fois qu’il s’y contraignit). Desmoulins recevait quelqu’un, il donna néanmoins l’ordre d’introduire le citoyen accusateur public. « Tu tombes bien, dit-il en allant au-devant de lui. Je te… te présente mon parent Fouquier-Tinville, ancien procureur, un excellent patriote. » C’était un homme de quarante-cinq ans environ, grand, aux épaules carrées, noir de cheveux et de sourcils qu’il avait très relevés,
    le visage plein, plutôt blême, le front bas, fuyant, le nez, le menton fortement dessinés. Camille poursuivait : « Si tu quittes ta fonction, elle pourrait… hon, hon… aller à mon parent.
    — Mille regrets ! Ma fonction d’accusateur public reviendra de droit au citoyen Faure. Il l’a parfaitement remplie durant plusieurs mois comme substitut de Robespierre, t’en souviens-tu ? Et il la remplit encore depuis que je suis occupé à la Commune. Si l’on m’envoie à la Convention, les électeurs nommeront sûrement Faure à ma place au tribunal.
    — C’est juste, reconnut Camille. Eh bien, mon bon Fouquier, nous… nous trouverons quelque chose au tribunal extraordinaire. Il y a maint poste à pourvoir.
    — Je viens justement vous en parler, à Danton et à toi, de la part du Conseil général. »
    Le nommé Fouquier-Tinville se retira en marquant bien qu’il comptait sur les bons offices de son parent. « On s’en découvre, de la famille, quand on est au pouvoir ! observa Camille en riant. Bah ! celui-là n’est pas mauvais bougre. Un… un ancien robin qui a mal réussi. Je le caserai. Nous sommes quelque peu cousins de cousins, et il… il nourrit une nombreuse famille, paraît-il. » Claude passa au sujet qui l’occupait. Desmoulins lui dit tout de suite que son rapport n’avait plus d’objet : le nécessaire venait d’être fait pour compléter le tribunal extraordinaire et le mettre à même de fonctionner comme on était en droit de s’y attendre. Claude demanda des précisions qu’il transmettrait à la Commune. Il prenait quelques notes, lorsque Danton entra, portant encore aux épaules sa simarre de chancelier. « Regardez-moi ! dit-il en se drapant dans sa pourpre. N’ai-je pas l’air d’en empereur romain ?
    — Non, tu as l’air d’un homard, lui rétorqua Desmoulins avec un rire gavroche.
    — Et voilà ! Je me tue de travail, et même mes amis ne me prennent pas au sérieux. Ah ! mon bon Claude, tout était plus aimable quand nous n’avions

Weitere Kostenlose Bücher