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Les Aveux: Nouvelle Traduction Des Confessions

Titel: Les Aveux: Nouvelle Traduction Des Confessions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric Boyer
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voient mais ils n’ont pas la capacité de s’interroger.
Ils n’ont pas la raison habilitée à juger les messages des sens. Les
hommes ont eux la capacité de s’interroger. Leur intellect leur fait
voir dans la création la part invisible de Dieu. Mais à aimer le visible,
ils deviennent dépendants, et cette dépendance leur enlève la capacité
de juger. Or le visible ne répond qu’aux interrogations produites par
un jugement. La beauté du visible dit toujours la même chose, que ce
soit à celui qui ne fait que la voir ou à celui qui l’interroge tout en la
voyant. Ou bien elle apparaîtrait différemment aux deux. Mais en
apparaissant de la même manière aux deux, elle est muette pour l’un
et parle au second. Ou plutôt, elle parle pour tous mais les seuls à
comprendre sont ceux qui, dans l’intériorité, confrontent cette parole
extérieure à la vérité.
    Et la vérité me dit : ton Dieu n’est ni la terre ni le ciel ni aucun corps.
C’est même ce que dit leur nature. Il suffit de voir qu’une masse pèse
moins dans une partie qu’en son tout.
    Âme, déjà, tu es bien supérieure, si je peux parler ainsi. Tu animes la
masse du corps en lui donnant la vie, ce qu’aucun corps ne garantit à
un autre. Mais ton Dieu est pour toi la vie de ta vie.
    11.
    Qu’est-ce que j’aime quand j’aime mon Dieu ?
    Qui est-il tout au-dessus de mon âme ?
    Je ferai l’ascension jusqu’à lui en passant par mon âme elle-même.
Au-delà de ma propre puissance avec laquelle je m’accouple à ce corps
dont je communique la vie à tout l’organisme.
    Non, ce n’est comme ça que je découvrirai mon Dieu. Sinon le cheval et le mulet sans intelligence le découvriraient aussi, car la même
puissance fait vivre leur corps.
    Il existe une autre puissance qui fait non seulement de moi une chair
vivante mais aussi un être sensible – réalisation du Seigneur qui a commandé à l’œil non pas d’entendre, à l’oreille non pas de voir, mais que
je puisse voir avec le premier, et entendre avec la seconde. Et à chacun
des autres sens sa mission appropriée selon sa situation et sa fonction.
Et moi, dans l’unité de mon esprit, j’accomplis grâce à eux leurs
diverses fonctions. Mais j’irai également au-delà de cette puissance en
moi qui est également dans le cheval et le mulet qui sont eux aussi des
êtres sensibles.
    12.
    J’irai encore au-delà de cette puissance naturelle.
    Je poursuis ma lente ascension vers celui qui m’a fait. J’atteins les
immenses prairies, les vastes palais de la mémoire où se trouvent les trésors des images innombrables importées par la perception de toutes
sortes d’objets.
    Est entreposé là tout ce que notre intelligence développe, réduit ou
modifie de quelque façon, à partir de la perception sensible. Et d’autres
choses encore déposées là, conservées, que l’oubli n’a toujours pas
absorbées et englouties.
    J’y suis. Je réclame de voir ce que je veux. Pour certaines choses c’est
immédiat, pour d’autres la recherche est plus longue. Comme s’il fallait
les extraire d’entrepôts plus secrets. Certaines affluent en bande alorsmême qu’on en avait demandé et cherché une autre. Elles font irruption avec l’air de dire : c’est peut-être nous que tu cherches… La main
de mon cœur les chasse du visage de ma mémoire jusqu’à ce qu’émerge
de l’obscurité ce que je cherche. Sortie de sa cachette, la chose se présente à moi. D’autres, en répondant à l’appel, se mettent en rangs
impeccables. Celles qui ouvrent la marche disparaissent pour céder la
place aux suivantes, et en disparaissant sont cachées pour reparaître
quand je le voudrai. C’est exactement ce qui se passe quand je raconte
quelque chose de mémoire.
    13.
    Il y a là, distinctes et classées par catégories, toutes les choses qui se
sont imposées chacune par une voie particulière. Par les yeux : la
lumière, toutes les couleurs et les formes des corps ; par les oreilles : les
sons en tous genres ; par le nez : toutes les odeurs ; par la bouche : toutes
les saveurs. Et par la sensibilité du corps : ce qui est dur, mou, chaud
ou froid, mœlleux ou rugueux, lourd ou léger. Que ce soit extérieur ou
intérieur au corps. Toutes ces choses, l’esprit les garde à sa disposition
pour, si besoin, les réutiliser dans les profonds recoins de la mémoire,
et dans le secret de je ne sais quels indescriptibles replis. À chacune sa
porte

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