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Les Aveux: Nouvelle Traduction Des Confessions

Titel: Les Aveux: Nouvelle Traduction Des Confessions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Frédéric Boyer
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pas à entendre sur moi, dans
l’admiration d’autrui, un avis différent du mien ? Non que son intérêt
me touche, mais ce qui me plaît en moi m’est plus agréable quand cela
plaît à un autre. Oui, d’une certaine façon, je ne me sens pas admiré
quand on ne partage pas ma propre estime de moi. Car ou bien on
admire en moi ce qui me déplaît, ou bien on admire trop ce qui me plaît
le moins. Comment alors ne pas douter de moi ?
    62.
    Vérité, avec toi j’ai compris. Je ne dois être sensible à l’admiration
qu’on me porte que si elle est utile à mon prochain, et non à moi. Je ne
sais pas si j’en suis déjà là. J’en connais moins sur moi-même que toi. Je
t’en supplie, mon Dieu, dénonce-moi à moi-même, pour que j’avoue à
mes frères, qui prieront pour moi, toutes les déchirures découvertes en
moi. Mais si je ne dois être sensible à l’admiration qu’on me porte que
si elle est utile à mon prochain, pourquoi suis-je moins sensible aux critiques injustes que reçoit quelqu’un qu’à celles qu’on adresse ? Pourquoi l’injure est plus mordante contre moi que contre un autre, alors
qu’elle est tout aussi injuste ? Ça aussi je l’ignore. La seule réponse possible serait que je suis mon propre séducteur, que je ne fais pas la vérité
avec toi, ni dans mon cœur ni dans ma langue.
    Éloigne de moi cette maladie, Seigneur.
    Ce qui sort de ma bouche ne doit pas devenir l’huile du péché sur ma
tête.
    63.
    Je suis si bas, si pauvre.
    Meilleur quand je gémis en secret : je ne m’aime pas.
    Et quand je cherche ta compassion pour réparer mes défections. Les
perfectionner jusqu’à atteindre la paix que l’arrogance ne voit pas.
    Mais chacun de nos discours et chacune de nos actions publiques
représentent un test très dangereux : notre amour-propre, qui nous fait
aimer l’admiration des autres, nous pousse à collectionner et à mendierleurs suffrages. Test puissant même quand je me le reproche, du fait
même de me le reprocher. Et en critiquant une vaine admiration, on en
vient souvent à s’admirer d’autant plus vainement. Mais il n’y a pas de
sujet d’admiration dans la critique même de l’admiration puisqu’en
s’admirant encore, on ne la critique plus.
    64.
    En nous, oui en nous, il y a, dans ce genre de test, une autre perversion : le narcissisme creux de certains, mal ou pas du tout aimés des
autres, et qui n’ont aucun goût de leur plaire. Tu as horreur de leur narcissisme. Ils prennent pour objets d’amour des objets qui n’en sont pas.
Ou ils s’attribuent tes propres objets d’amour. Ou ils s’accordent le
mérite de tes objets d’amour. Qu’ils reconnaissent comme un don de toi
mais qu’ils ne sont pas prêts à partager. Ils jalousent au contraire les
dons que tu fais aux autres.
    Mon cœur tremble, tu vois, dans tous ces dangers et ces peines. J’ai
compris que tu préférais guérir mes plaies plutôt que de m’épargner les
coups.
    65.
    Jusqu’où suis-je allé sans toi pour m’apprendre ce que je devais éviter et ce que je devais chercher ? oh vérité. J’ai soumis à ton examen,
comme je pouvais, mes perceptions sommaires.
    Mes sens ont exploré les confins du monde extérieur. Je me suis fait
l’observateur de la vie de mon corps, et de mes sens eux-mêmes. Je me
suis enfoncé à l’intérieur de ma mémoire. Immensités multiples. Étonnamment remplies d’innombrables trésors. Spectacle redoutable. Sans
toi, je n’ai rien pu distinguer. Rien de tout cela n’était toi. Mais moi non
plus, l’explorateur. J’ai tout parcouru. Je me suis efforcé de distinguer
chaque chose et de les estimer chacune à sa valeur. Étudier leur transmission sensorielle (certaines perceptions étaient inextricablement liées
à moi). Identifier chaque sens et les énumérer. Grâce à l’abondant travail de la mémoire, exercer certaines perceptions, en reléguer certaines,
en exhumer d’autres… Mais non, dans cette activité, moi, ou plus exactement la force qui me faisait agir, ce n’était pas toi. Tu es plutôt la
lumière permanente que je consultais pour connaître l’existence d’une
chose, son être, sa valeur. Je t’entendais enseigner et ordonner. J’aime
faire ça souvent. Dès que je le peux, je me libère de mes dures obligations pour me réfugier dans ce plaisir.
    Mais dans tout ce que je passe en revue, en te consultant, je ne me
trouve de lieu sûr qu’en toi. Recueil de toutes mes dispersions :

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