Les chasseurs de mammouths
creuse, faite d’une plaque d’ivoire détachée d’une défense de mammouth.
— On appelle ça des pelles, dit-il.
Ayla acquiesça d’un signe. Elle s’était servie, pour le même
usage, d’os plats et de morceaux de bois d’élan, mais ses pelles n’avaient pas
de manches.
— Heureusement, reprit le chef, le temps est resté au beau
un moment, après votre départ. Même ainsi, nous n’avons pas creusé aussi
profond que d’habitude. La terre est déjà dure, par-dessous. L’année prochaine,
nous pourrons approfondir un peu, faire des fosses à provisions, peut-être même
un bain de vapeur, quand nous reviendrons de la Réunion d’Été.
— N’avais-tu pas l’intention de partir à la chasse, quand
le temps serait meilleur ? dit Jondalar.
— La chasse au bison a été très fructueuse, et Mamut ne trouve
pas grand-chose par la Recherche. Il voit seulement, semble-t-il, les quelques
bisons que nous avons manqués, et ils ne valent pas la peine qu’on se mette à
leur poursuite. Nous avons décidé d’occuper le temps à construire cette
dépendance pour les chevaux, puisque Ayla et sa jument nous avaient été si
utiles.
— Pioche et pelle rendent travail plus facile, Talut, mais
est beaucoup travail, beaucoup creuser, fit Ayla, surprise et émue.
— Nous avions beaucoup de monde, Ayla. Ils ont presque tous
trouvé l’idée excellente et ils voulaient aider... pour que tu te sentes la
bienvenue.
La jeune femme dut soudain fermer les paupières pour retenir les
larmes de gratitude qui menaçaient de déborder.
Encore intrigué par la méthode de construction, Jondalar examinait
les murs.
— Vous avez creusé aussi sous les plates-formes, il me
semble, remarqua-t-il.
— Oui, pour les supports principaux, répondit Talut.
Il désignait les six énormes défenses de mammouth, calées à la
base par des os plus petits – vertèbres et phalanges –, et dont
les pointes étaient dirigées vers le centre. Elles étaient régulièrement
espacées le long du mur, de chaque côté des deux paires qui formaient les
issues. Les longues défenses courbes constituaient la structure essentielle de
l’habitation.
Pendant que Talut, chef des Chasseurs de Mammouths, poursuivait
ses explications sur la construction de cette habitation semi-souterraine, Ayla
et Jondalar se sentirent de plus en plus impressionnés. C’était bien plus
complexe qu’ils ne l’auraient jamais imaginé. A mi-distance entre le centre et
les défenses qui servaient de supports s’élevaient six poteaux de bois :
des arbres débarrassés de leur écorce et ébranchés, auxquels on avait laissé
une fourche au sommet. A l’extérieur, soutenus par le bas du talus, on avait
enfoncé dans le sol des crânes de mammouths, calés par d’autres
ossements : omoplates, os du bassin, vertèbres et plusieurs os longs,
placés aux endroits stratégiques, tibias ou côtes. La partie supérieure du mur,
qui consistait principalement en omoplates et os du bassin, mêlés de défenses
plus petites, se fondait avec le toit, lui-même porté par des poutres disposées
entre le cercle extérieur de défenses et le cercle intérieur formé par les
poteaux. La mosaïque d’ossements, tous choisis avec soin, certains retaillés
pour s’insérer précisément à leur place, était solidement attachée aux défenses
et créait une muraille incurvée dont les éléments s’ajustaient comme les pièces
d’un puzzle.
On trouvait du bois, en petites quantités, dans les vallées des
cours d’eau, mais, pour construire, les os de mammouths étaient plus abondants.
Toutefois, les carcasses des mammouths tués à la chasse ne constituaient qu’une
petite part des ossements utilisés. L’essentiel des matériaux était choisi dans
les prodigieuses accumulations d’os qui se formaient dans le méandre de la
rivière. Ils en trouvaient même sur les steppes voisines, là où les animaux
nécrophages avaient fait leur besogne sur les carcasses. Mais les vastes
plaines leur procuraient surtout des matériaux d’une autre sorte.
Chaque année, les troupeaux migrateurs de rennes perdaient leurs
bois pour laisser place à la ramure de l’année suivante. Chaque année, les bois
étaient ramassés. Pour compléter la construction, les ramures des rennes
étaient liées les unes aux autres et formaient un solide support au toit en
coupole, au centre duquel un trou était ménagé pour laisser échapper la fumée.
Des branches
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