Les chasseurs de mammouths
vieillard et le petit garçon.
— Savait tout ce que savait mère. Avait souvenirs de mère
et de grand-mère.
Elle prit quelques pierres au foyer, les rapprocha du lit de
Mamut, saisit quelques braises à l’aide de deux baguettes, les posa sur les
pierres chaudes, aspergea le tout d’une poudre de racine de mélianthe. Elle
alla chercher des couvertures pour le chaman, afin de le garder au chaud. Mais,
pendant qu’elle les bordait autour de lui, il se redressa sur un coude pour la
dévisager pensivement.
— Les gens du Clan sont différents des autres d’une manière
qui n’est pas généralement comprise. Ce n’est pas le fait qu’ils ne parlent
pas, ou que leur manière de s’exprimer n’est pas la même. C’est leur façon de
penser qui est un peu particulière. Si Uba, la femme qui m’a soigné, était la
grand-mère de ton Iza et si elle a appris son art à partir des souvenirs de sa
grand-mère et de sa mère, toi, Ayla comment as-tu appris ? Tu n’as pas de
souvenirs du Clan.
Mamut vit Ayla rougir d’embarras, il l’entendit étouffer une
exclamation. La jeune femme baissa les yeux.
— En aurais-tu donc ? demanda-t-il.
— Non, n’ai pas souvenirs de Clan, dit-elle.
— Mais ?
Elle releva les yeux vers lui.
— Veut dire quoi, « mais » ? dit-elle.
Elle avait une expression méfiante, presque apeurée. Ses
paupières s’abaissèrent de nouveau.
— Tu n’as pas de souvenirs du Clan, mais... tu as autre
chose, n’est-ce pas ? Quelque chose qui te vient du Clan ?
Ayla gardait la tête baissée. Comment pouvait-il savoir ?
Elle n’en avait jamais parlé à personne, pas même à Jondalar. Elle avait peine à
se l’avouer à elle-même mais elle n’avait jamais été tout à fait la même,
après...
— Est-ce en rapport avec ton talent de Femme Qui
Guérit ? insista Mamut.
Elle releva la tête sur un signe de dénégation.
— Non, dit-elle.
Ses yeux le suppliaient de la croire.
— Iza m’apprend. Étais très jeune, pas encore âge de Rugie,
je crois, quand elle commence. Iza savait n’avais pas souvenirs mais elle force
à me rappeler, elle force à dire encore et encore, et, enfin, n’oublie plus.
Elle est très patiente. Certains disent inutile m’apprendre : trop
stupide, pas moyen retenir. Elle dit non, suis seulement différente. Ne veux
pas être différente. Force à retenir. Répète seule, encore et encore, même
quand Iza pas apprendre. Apprends à retenir, à ma manière. Force à apprendre
vite, pour que les autres pas penser suis stupide.
Rydag ouvrait des yeux ronds, immenses. Plus que personne, il
comprenait exactement ce qu’Ayla avait pu éprouver mais il ignorait que quelqu’un
comme Ayla eût pu ressentir cela.
Mamut la regardait avec stupeur.
— Ainsi, tu t’es mis en mémoire les souvenirs du Clan, tels
que les conservait Iza ? C’est un véritable exploit. Ils remontent à des
générations en arrière, n’est-ce pas ?
Rydag, à présent, écoutait avec une attention soutenue : il
allait apprendre, il le sentait, quelque chose de très important pour lui.
— Oui, répondit Ayla, mais n’ai pas appris tous souvenirs.
Iza pas capable enseigner tout ce qu’elle savait. Elle dit elle ne sait pas
même tout ce qu’elle sait mais elle enseigne comment apprendre. Comment faire
expériences, comment essayer avec prudence. Quand suis plus âgée, elle dit je
suis sa fille, guérisseuse de sa lignée. Je demande comment je peux être de sa
lignée ? Ne suis pas vraie fille. Pas même de Clan. N’ai pas souvenirs.
Elle dit alors ai autre chose, aussi bien que souvenirs, peut-être mieux. Iza
pensait étais née dans lignée de guérisseuses des Autres, meilleure lignée,
comme lignée d’Iza était meilleure. Est pourquoi suis guérisseuse de sa lignée.
Elle disait serais meilleure, un jour.
— Sais-tu ce qu’elle voulait dire ? Connais-tu le don
que tu possèdes ? questionna Mamut.
— Oui. Je crois. Quand quelqu’un malade, vois maladie.
Regarde yeux, couleur visage, sens souffle. Réfléchis. Quelquefois sais par
regard. Quelquefois sais questions à poser. Et fais médecine pour aider. Pas
toujours même médecine. Quelquefois nouvelle, comme bouza dans lotion pour
arthrite.
— Ton Iza pourrait bien avoir raison. Les meilleurs
guérisseurs possèdent ce don, déclara le Mamut.
Une idée se présenta à son esprit. Il poursuivit :
— J’ai remarqué une différence entre toi et les
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