Les chasseurs de mammouths
trouvé. Mais peut-être
a-t-il su que j’aurais ce pouvoir. Je me demande si c’était ce qui le rendait
si triste...
Mamut hocha la tête.
— C’est possible, mais il y a plus important : cet
endroit était beaucoup plus dangereux que je ne l’avais imaginé. J’ai essayé d’en
parler avec une certaine légèreté, afin de ne pas inquiéter le Camp. Si nous
étions restés absents plus longtemps, nous n’aurions plus été en mesure de
revenir. Et notre retour ne s’est pas opéré grâce à nos seules forces. Nous
avons été aidés par... par quelqu’un qui éprouvait un désir... si violent de
nous voir revenir qu’il a surmonté tous les obstacles. Quand une force de
volonté aussi résolue se concentre sur un seul but, aucune frontière ne peut
lui résister, sauf, peut-être, la mort elle-même.
Ayla, visiblement troublée, fronçait les sourcils. Mamut se
demanda si elle avait identifié celui qui les avait ramenés ou si elle
comprenait pourquoi une telle concentration de volonté pouvait être nécessaire
à sa sauvegarde. Elle finirait par le savoir, mais ce n’était pas à lui de l’informer.
Elle devrait le découvrir par elle-même.
— Je ne retournerai jamais en ce lieu, poursuivit-il. Je
suis trop vieux. Je ne veux pas que mon esprit s’égare dans ce vide. Un jour,
quand tu auras encore développé tes pouvoirs, il se peut que tu désires y
retourner. Je ne te le conseille pas, mais, si tu pars, assure-toi d’une
puissante protection. Assure-toi que quelqu’un t’attend, quelqu’un qui soit
capable de te rappeler.
En gagnant sa plate-forme de couchage, Ayla chercha Jondalar du
regard. Mais il avait battu en retraite quand Ranec avait apporté l’infusion et
il se tenait maintenant à l’écart. Lorsqu’il avait senti qu’Ayla était en
danger, il n’avait pas hésité à aller vers elle mais il n’était plus très sûr de
ce qui l’avait poussé. Elle venait d’accorder sa Promesse au sculpteur mamutoï.
Quel droit avait-il, lui, de la tenir entre ses bras ? Et tout le monde,
apparemment, savait ce qu’il fallait faire, lui apportait des fourrures, des
boissons chaudes. Il avait eu l’impression, sur le moment, que, sous l’effet de
son immense amour pour elle, il avait pu l’aider de quelque étrange manière. En
y réfléchissant, il commençait à en douter. Sans doute, à ce moment, Ayla se
trouvait-elle déjà sur le chemin du retour, se disait-il. C’était une simple
coïncidence. Je me suis trouvé là, voilà tout. Elle ne s’en souviendra même
pas.
Ranec alla trouver Ayla, quand elle eut fini de s’entretenir
avec Mamut. Il la supplia de venir partager son lit, non pour s’accoupler, mais
seulement pour lui permettre de la tenir dans ses bras, de la réchauffer. Elle
refusa : elle se sentirait mieux dans son propre lit, insista-t-elle. Il
finit par accepter son refus mais il demeura longuement éveillé, sous ses
fourrures. Il réfléchissait. Jondalar avait eu beau quitter le Foyer du
Mammouth, l’intérêt qu’il portait à Ayla ne s’était pas éteint pour
autant : tout le monde s’en rendait compte. Ranec, lui, était parvenu à l’ignorer.
Toutefois, il fie pouvait plus nier les sentiments violents que le grand
étranger entretenait encore à l’égard de la jeune femme. Pas après l’avoir vu
conjurer la Mère de lui laisser la vie.
Jondalar, il n’en doutait pas, avait joué un rôle décisif dans
le retour d’Ayla, mais Ranec se refusait à croire qu’elle lui rendît ses
sentiments. Au cours de cette même soirée, elle s’était Promise à lui. Ayla
allait être sa compagne, elle partagerait son foyer. Il avait eu peur pour
elle, lui aussi, et la seule idée de la perdre, que ce fût par quelque péril ou
bien au profit d’un autre, ne faisait qu’accroître son désir.
Jondalar vit Ranec rejoindre la jeune femme. Il respira plus
librement lorsque ensuite l’homme à la peau sombre revint seul à son foyer.
Néanmoins, il se tourna sur le flanc, ramena les fourrures sur sa tête. Quelle
différence cela faisait-il qu’elle partageât ou non sa couche, cette
nuit-là ? Elle finirait par le rejoindre. Elle s’était Promise à lui.
29
Ayla faisait généralement le compte de ses années à la fin de l’hiver,
avec la saison du renouveau, et le printemps de la dix-huitième année était
resplendissant d’une profusion de fleurs des champs et du vert tout frais des
feuilles nouvelles. On l’accueillit comme
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