Les chasseurs de mammouths
voûte céleste, dévoilant les
reliefs de la végétation enchevêtrée. Elle sentit une fourrure chaude qu’on
posait sur ses épaules. Elle s’en enveloppa et des bras l’enlacèrent
par-derrière.
— Tu as froid, Ayla. Tu es restée dehors longtemps, dit
Ranec.
— Je n’arrivais pas à dormir.
— Qu’est-ce qui ne va pas ?
— Je ne sais pas. J’ai un mauvais pressentiment, mais je ne
peux pas l’expliquer.
— Je te sens mal à l’aise depuis la Cérémonie de l’Invocation,
Ayla. Est-ce que je me trompe ? demanda Ranec.
— Je n’y avais pas pensé, mais tu as peut-être raison.
— Pourtant, tu n’y as pas participé. Tu t’es contentée d’y
assister.
— Je ne voulais pas participer, mais je ne sais plus. Il s’est
peut-être passé quelque chose, dit Ayla.
Après s’être restaurés, les chasseurs plièrent le camp et se
remirent en route. Ils tentèrent d’abord de contourner les marais, mais cela
exigeait un long détour et ils y renoncèrent. Talut et certains maîtres de
chasse sondèrent des yeux l’épais fourré marécageux enveloppé dans un
brouillard froid et débattirent avec d’autres chefs du chemin à suivre. Ils
optèrent finalement pour le passage qui semblait le plus praticable.
Le sol détrempé céda la place à une boue tremblotante. De
nombreux chasseurs ôtèrent leurs bottes et avancèrent nu-pieds dans l’eau
vaseuse. Ayla et Jondalar conduisaient les chevaux inquiets avec de multiples
précautions. Des lianes et les longues barbes des lichens gris-vert pendaient
des bouleaux rabougris, des saules et des aulnes nains, si serrés qu’on aurait
dit une jungle arctique. Il fallait faire attention où l’on mettait les pieds.
En l’absence de sol ferme, les arbres étaient mal enracinés et poussaient en
formant des angles les plus inattendus, rampaient même, parfois. Les chasseurs
éprouvaient les pires difficultés à se frayer un chemin parmi les troncs morts,
les broussailles, les arbustes entremêlés, les racines cachées sous l’eau et
les branches qui piégeaient les pas sans méfiance.
La progression était lente, épuisante. En milieu de matinée, ils
firent une halte pour se reposer. Tout le monde était en sueur. Reprenant sa
route, Talut accrocha une branche particulièrement tenace d’un aulne et dans
une explosion de colère rare, il attaqua furieusement l’arbre à la hache. Le
liquide rouge suintant de l’entaille de l’arbre blessé apparut à Ayla comme un
signe de mauvais augure.
Enfin, ils retrouvèrent le sol ferme sous leurs pieds. De
grandes fougères, des herbes à hauteur d’homme poussaient sur la riche
clairière à la lisière du marais.
Ils obliquèrent vers l’est pour éviter les terres humides,
remontèrent les flancs de la dépression où stagnaient les marais et arrivèrent
en vue du confluent d’une grande rivière et de son affluent.
Talut, Vincavec et les autres chefs des Camps s’arrêtèrent pour
consulter leurs cartes gravées dans l’ivoire et firent encore quelques marques
sur le sol.
A proximité de la rivière, ils traversèrent une forêt de
bouleaux. Pas ces bouleaux robustes et élancés des forêts tempérées, mais des
arbres rabougris par les conditions climatiques rigoureuses. Comme taillé,
modelé en toutes sortes de formes étonnantes, chaque arbre avait une grâce
particulière, fragile, mais les branches frêles, pendantes, étaient trompeuses – Ayla
essaya d’en briser une, elle était dure comme un tendon – et sous le
vent elles fouettaient la végétation environnante.
— On les appelle les « vieilles mères ».
Ayla se retourna et vit Vincavec.
— C’est bien trouvé. Cela rappelle qu’on ne doit jamais
sous-estimer la force d’une vieille femme. Ceci est un bosquet sacré et les
bouleaux protègent les somuti, poursuivit Vincavec, le doigt pointé vers le
sol.
Les petites feuilles vertes et tremblantes des bouleaux
laissaient passer des taches de soleil qui dansaient légèrement sur le tapis de
feuilles épais.
Ayla remarqua, pointant sous la mousse au pied de certains
arbres, de gros champignons rouges mouchetés de blanc.
— Ce sont ces champignons que vous appelez les
somuti ? demanda-t-elle. Ils sont vénéneux. On peut mourir si on en mange.
— Oui, bien sûr, à moins de connaître les secrets de
préparation. Mais seuls ceux qui ont été élus peuvent impunément explorer le
monde des somuti.
— Ont-ils des vertus
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