Les chasseurs de mammouths
mais il resta au Camp pour ne
pas les ralentir. Tronie aussi, avec Nuvie et Hartal. Sauf, de temps à autre,
pour une expédition où les enfants eux-mêmes pouvaient se rendre utiles, elle n’allait
plus chasser, elle non plus. Tornec était le seul chasseur du Foyer du Renne,
comme Frébec était le seul du Foyer de la Grue. Fralie et Crozie restèrent au
Camp, avec Crisavec et Tasher.
Tulie s’était presque toujours arrangée pour partir à la chasse,
même du temps où elle avait des enfants en bas âge, et le Foyer de l’Aurochs
était bien représenté. Mis à part la Femme Qui Ordonne, Barzec, Deegie et
Druwez partaient aussi. Brinan fit de son mieux pour convaincre sa mère de l’autoriser
à les accompagner mais, avec sa sœur Tusie, il fut laissé aux soins de Nezzie,
avec la promesse qu’il serait bientôt assez grand.
Le groupe de chasseurs gravit la pente, et, dès qu’ils se
trouvèrent en terrain plat, Talut leur fit presser le pas.
— Je crois, moi aussi, que la journée est trop belle
pour qu’on la perde, déclara Nezzie, en reposant sa coupe d’une main ferme.
Elle s’adressait au petit groupe qui, après le départ des
chasseurs, s’était rassemblé autour du feu allumé dehors. Tout le monde
achevait le repas du matin en dégustant une infusion.
— Les grains sont mûrs et secs, et j’ai envie, depuis un
bon moment, d’aller en faire une dernière récolte. Si nous nous dirigeons vers
le bouquet de sapins, près du petit ruisseau, nous pourrons aussi ramasser les
graines des cônes, si nous en avons le temps. Quelqu’un veut-il venir ?
— Fralie ne devrait pas aller aussi loin, j’en suis sûre,
dit Crozie.
— Oh, mère, protesta sa fille. Une promenade me fera du
bien. Quand le temps va se gâter, nous serons tous obligés de rester enfermés.
Cela viendra bien assez tôt. J’aimerais t’accompagner, Nezzie.
— Alors, il vaut mieux que j’y aille moi aussi, pour t’aider
à t’occuper des enfants, déclara Crozie, comme si elle s’imposait un grand
sacrifice.
En réalité, l’idée d’une sortie la tentait. Tronie, elle, ne
cacha pas son plaisir.
— Quelle bonne idée, Nezzie. Je pourrai caser Hartal dans
ma hotte, et ça me permettra de porter Nuvie quand elle sera fatiguée. Passer
une journée dehors : voilà qui me plairait par-dessus tout.
— Je me chargerai de Nuvie. Tu n’auras pas besoin d’en
porter deux, dit Manuv. Mais je ramasserai les graines de cônes, je pense, et
je vous laisserai récolter le grain.
— Je crois que je vais, moi aussi, vous accompagner,
Nezzie, décida Mamut. Peut-être Rydag accepterait-il de tenir compagnie à un
vieil homme. Il m’apprendra peut-être d’autres signes d’Ayla, puisqu’il est si
doué pour ça.
— Toi, très bon pour signes, Mamut, exprima Rydag avec ses
doigts. Toi apprendre vite. Toi peut-être apprendre à moi.
— Nous nous enseignerons peut-être l’un l’autre, répondit
Mamut dans le même langage.
Nezzie souriait. Le vieillard n’avait jamais traité l’enfant d’esprits
mêlés autrement que les autres enfants du Camp, sinon pour prendre en
considération sa faiblesse, et il l’avait souvent aidée à prendre soin de
Rydag. Un lien tout particulier semblait exister entre eux. Nezzie soupçonnait
Mamut de vouloir les accompagner afin d’occuper le petit garçon pendant que les
autres travailleraient. Il veillerait aussi, elle le savait, à ce que personne,
sans le vouloir, ne pressât Rydag d’avancer plus vite qu’il ne le pouvait. S’il
voyait l’enfant faire des efforts exagérés, il ralentirait lui-même et mettrait
sa lenteur sur le compte de son grand âge. Cela lui était déjà arrivé.
Quand tout le monde fut réuni avec des paniers, des peaux à
étendre sur le sol, des outres pleines d’eau et les vivres nécessaires pour le
repas de midi, Mamut plaça devant la voûte d’entrée, à même la terre, la
statuette d’une femme aux formes pleines, sculptée dans l’ivoire. Il prononça
quelques mots qu’il était le seul à comprendre, fît quelques gestes d’invocation.
Tous les habitants du Camp allaient être absents, l’abri serait désert. Il
priait l’Esprit de Mut, la Grande Mère, de garder et protéger leur habitation
en leur absence.
Nul ne tenterait de violer cette « défense d’entrer »
signifiée par l’effigie de la Mère placée sur le seuil. A moins de nécessité
absolue, nul n’oserait affronter les conséquences qui
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