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Les chevaliers de la table ronde

Les chevaliers de la table ronde

Titel: Les chevaliers de la table ronde Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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très mal équipé alors
que ton adversaire était parfaitement armé ! » En entendant ces paroles,
Gauvain se mit à rire. Puis il dit : « En vérité, qui veut récolter
un autre blé que celui qu’il a semé, ou qui attend d’une femme autre chose que
ce qu’elle est par nature, n’a pas de sagesse ! Ta compassion ne visait
pas à préserver ma vie ou mon honneur, elle avait une tout autre source. Je n’ai
plus aucune raison de t’écouter et je te laisse en tête à tête avec toi-même ! »
    Sur ce, Gauvain bondit dans la forêt, suivi par les lévriers
qui aboyaient joyeusement. Il abandonnait ainsi la jeune femme et ne sut jamais
ce qui lui était arrivé par la suite. Il reprit la bonne direction, méditant
sur l’aventure qu’il venait de vivre et se promettant d’être vigilant à l’avenir
à propos de la fausseté de certaines femmes. Et, après avoir chevauché
longuement, toujours en compagnie de ses chiens, il se trouva bientôt aux alentours
immédiats de la forteresse de Kaerlion sur Wysg où résidait son oncle, le roi
Arthur.
    Cette nuit-là, Arthur était au lit avec Gwendolen. Tout à
coup, celle-ci se réveilla et dit à Arthur : « J’ai eu un songe. Un
jeune étranger est en ce moment même sur le chemin de Kaerlion, et je sais que
ce jeune étranger prouvera une valeur supérieure à la tienne. J’ai vu qu’il me
donnait un anneau d’or et qu’il me présentait deux chevaux qu’il avait conquis
en combat singulier. » Ainsi parla Gwendolen, et Arthur en fut grandement
troublé. Car le roi, en ce temps-là, avait coutume de se mesurer avec tous ceux
qui avaient la prétention d’entrer dans sa forteresse sans y avoir été invités
par lui, afin d’y être acceptés comme ses compagnons. Or, comme Gwendolen
venait de se rendormir, Arthur sortit du lit bien doucement, de façon à ne pas
troubler son sommeil, fit préparer son cheval et ses armes, franchit la porte
de Kaerlion et s’en alla au hasard dans la forêt.
    C’est près d’un ruisseau en crue qu’il rencontra un jeune inconnu
qu’accompagnaient quelques lévriers de bonne race. Arthur défia le jeune
chevalier, et celui-ci, qui était en train de boire dans le ruisseau, se
redressa bien vite, saisit son bouclier et son épée et se mit en garde. Tous
deux se battirent avec ténacité au milieu du gué. Au bout d’un certain temps, Arthur
fut désarçonné et l’inconnu, sans plus s’occuper de lui, saisit le cheval du
roi par la bride et l’entraîna dans les profondeurs de la forêt, toujours suivi
par ses chiens.
    Mais Arthur ne savait pas que le fidèle Kaï, inquiet de voir
son frère de lait sortir en pleine nuit sans compagnon, l’avait suivi et avait
assisté au combat. N’écoutant que sa bravoure, Kaï se précipita vers le jeune
inconnu et le provoqua sans délai. L’autre se mit en garde et lui rendit coup
pour coup et Kaï ne fut pas plus heureux qu’Arthur : il fut lui-même
désarçonné ; et l’inconnu, sans plus s’occuper de lui, saisit son cheval
par la bride et l’emmena avec lui dans la forêt.
    Arthur et Kaï étaient bien ennuyés et honteux d’avoir été déconfits
de telle sorte. En plus, ils étaient tombés dans le gué et se trouvaient
mouillés jusqu’aux os. En maugréant, ils rentrèrent à pied dans la forteresse, un
peu avant l’aube, tous deux fourbus et la mort dans l’âme. Arthur regagna sa
chambre où il pensait pouvoir prendre un peu de repos, mais Gwendolen s’était
réveillée. Quand elle vit arriver le roi tout trempé, elle lui demanda ce qui s’était
passé. Arthur n’aurait jamais voulu lui avouer qu’il venait de se faire désarçonner
par un jeune inconnu qui lui avait pris son cheval. Aussi inventa-t-il une
histoire : ne pouvant dormir, il était allé se promener aux abords de la
forteresse et il était tombé dans une fontaine en se penchant pour boire. Gwendolen
fit semblant de le croire, car elle se doutait bien que son rêve était pour
quelque chose dans l’aventure d’Arthur. Mais celui-ci se recoucha et s’endormit.
    Tôt le matin, alors que le roi dormait encore, un jeune
homme de bonne allure, au regard franc et loyal, aux vêtements richement ornés,
se présenta à la cour. On le fit entrer, et c’est Gwendolen qui le reçut. Alors,
le jeune homme, après s’être incliné devant la femme, lui remit un anneau d’or
et lui présenta deux chevaux qu’il disait avoir conquis en combat singulier. Gwendolen
se

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