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Les chevaliers du royaume

Les chevaliers du royaume

Titel: Les chevaliers du royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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que le sable du désert. Elle s’envolait au gré d’un vent, qui commença à souffler, d’abord léger, puis de plus en plus fort En se soulevant, elle se plaquait sur le poitrail des chevaux, s’agglutinait à leurs flancs, se glissait entre les mailles et les plis des vêtements des quatre cavaliers. Quant à Babouche, elle avait pratiquement disparu dans un tourbillon de sable. Aussi Morgennes la souleva-t-il comme un chat par la peau du cou pour l’asseoir sur sa selle, contre lui. Cassiopée et Taqi avaient ralenti l’allure, invitant leurs compagnons à les imiter. Ils avançaient, leurs montures si étroitement collées les unes aux autres qu’un animal n’aurait pu s’immiscer entre elles. Il leur fallut, pour franchir ces vastes arpents de terre, chevaucher deux fois plus longtemps que pour les atteindre. Bientôt, la soif les brûla. Mais boire aurait été inutile, chaque gorgée risquant d’être suivie d’une bouffée de sable. Le mieux était de continuer, le visage à l’abri d’un keffieh.
    Au besoin, ils s’arrêteraient.
    Cet étrange voyage les amena non loin de Tibériade, le vent les déposant sur le rivage du lac. À l’ouest, les monts escarpés de la colline de Hattin s’étageaient vers le ciel, encadrant le petit monument bâti par Saladin pour célébrer sa victoire.
    Ils déroulèrent leur keffieh et le secouèrent dans la brise de l’après-midi pour en chasser le sable, puis allèrent se désaltérer au lac où quelques mois plus tôt l’armée de Saladin avait campé. Ensuite, Taqi s’élança en direction des Cornes de Hattin, faisant de grands gestes du bras pour appeler Morgennes.
    — Par ici, dhimmi, par ici !
    Morgennes talonna Isabeau, tremblant à la fois d’excitation et de crainte. Il se demandait s’il était possible de se trouver enfin si près du but. Dieu n’allait-il pas l’abuser une fois de plus, comme il l’avait abusé tant de fois, ici même, en jouant avec sa soif et sa vie ?
    — Il faut creuser là, signala Taqi.
    Il indiqua une surface de terre meuble, non loin d’un buisson de lauriers-roses. Morgennes contempla cet endroit un court instant, et porta son regard vers le lieu de la bataille, où de nombreux monticules d’os blanchis formaient un curieux paysage. Il ne les avait pas vus d’en bas, mais de ces hauteurs, on aurait dit des cratères, un semis de taches et de croûtes. Ils donnaient à la plaine un aspect lunaire. De nombreux corps paraissaient intacts, d’autres s’étaient desséchés. Des mollets qui n’avaient plus de jambe sortaient de chausses en lambeaux ; des squelettes à la cage thoracique défoncée avaient été vidés par des vautours et des essaims de mouches grasses. Leurs os brisés brillaient au soleil, formant au milieu du sable de luisants hiéroglyphes. Quelque part, parmi eux, se trouvaient ses anciens compagnons, ainsi qu’Arnaud de Roquefeuille – que Simon chercha en l’appelant par son nom.
    Se laissant tomber à genoux plus que s’agenouillant, Morgennes commença à gratter la terre, d’abord avec ses mains, puis à l’aide de son couteau d’arme. Simon, Cassiopée et Taqi l’aidèrent. Ils creusèrent avec un mélange d’impatience et de précautions sous les regards ébahis de Babouche, qui se reposait, langue pendante, à l’ombre de la grande croix où Renaud de Châtillon avait été crucifié.
    Enfin, Morgennes heurta de son couteau ce qui ressemblait à du bois, dégagea l’ensemble avec ses mains, et sortit de la terre une planche, longue d’un peu plus de quatre pieds pour dix pouces de largeur.
    — La Vraie Croix !
    Simon pleura, versant de chaudes larmes sur le Saint Bois, que Cassiopée regardait d’un œil indifférent. Morgennes se releva, et prit Taqi dans ses bras :
    — En vérité, tu es la plus noble personne que je connaisse. Comment te remercier ?
    — C’est moi, répondit Taqi, qui te remercie. Car tu nous rends un immense service, dhimmi. Mon oncle (la paix soit sur lui) avait vu juste : la Vraie Croix vous divise plus qu’elle ne vous unit. Maintenant, les Templiers et les Hospitaliers vont se battre jusqu’au dernier pour savoir qui l’a vraiment retrouvée…
    — Comment, fit Morgennes, ne me dis pas que… ce n’est pas celle-ci ?
    Taqi soupira. Puis il croisa les bras et s’appuya contre le chambranle de pierre du petit monument.
    — Entre avec moi, veux-tu. Nous dormirons ici ce soir. La nuit porte conseil.
    — Je ne dormirai

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