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Les chevaliers du royaume

Les chevaliers du royaume

Titel: Les chevaliers du royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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long du mur, les scènes se succédaient, racontant l’histoire de la Vraie Croix, telle qu’elle était connue à l’époque où le Saint Bois avait été apporté là.
    — Nous sommes ici au cœur de ce qui fut jadis la résidence privée de la reine Meyem, ou Marie, épouse de Chosroès, le puissant roi des Perses, et fervente chrétienne.
    Morgennes admirait les détails des mosaïques, qui illustraient dans leur dernière partie la façon dont la reine Marie avait convaincu Chosroès et son général en chef, Chahrbaraz, d’attaquer Jérusalem afin d’y prendre la Vraie Croix et les autres reliques.
    On y voyait, chose étonnante, le militaire torturer un ecclésiastique – le patriarche Sophrone, certainement – pour lui faire dire où il avait caché la Vraie Croix et les Instruments de la Passion. Mais, le plus surprenant de tout, c’étaient les trois dernières mosaïques, qui racontaient en des teintes éclatantes comment Chahrbaraz, après avoir quitté le service de la reine Marie, avait été remplacé dans son cœur par ce même patriarche Sophrone, qui avait souffert le martyre. Celui-ci avait conseillé à la souveraine de faire fabriquer une réplique de la Vraie Croix dans le même bois que celui de l’arbre à partir duquel elle avait été taillée, à l’époque de la Crucifixion : « Afin que la Vraie Croix demeure à tout jamais cachée et que nul n’ait l’idée de partir à sa recherche. »
    L’avant-dernière scène montrait donc le basileus Héraclius recevant une « fausse » Vraie Croix ; et la dernière, Sophrone et Marie coulant des jours heureux dans ce sanctuaire que la reine s’était fait aménager dans un endroit caché de tous, l’oasis de la Main, à l’abri des hommes.
    — Zénobie est la descendante directe de la reine Marie, poursuivit Guillaume. Et j’ai longtemps pensé que l’Emmurée n’était autre que Marie elle-même ; cela dit, je n’en ai aucune certitude.
    — Comment être sûr que c’est bien la Vraie Croix ?
    — Je crains que l’on ne le puisse pas. D’ailleurs, c’est secondaire. Venez voir…
    Morgennes se demandait ce que Guillaume allait bien pouvoir lui montrer d’autre, quels incroyables mystères allaient encore lui être révélés.
    L’ancien archevêque de Tyr se dirigea vers une petite porte en bois située dans le quart supérieur gauche de la salle, entre deux mosaïques où, pour l’une, sainte Hélène découvrait la Vraie Croix au sommet du mont du Crâne, et, pour l’autre, Constantin donnait l’ordre d’y bâtir le Saint-Sépulcre.
    La porte pivota sur des gonds vieux de plusieurs siècles dans un léger chuintement dû à l’humidité : le bois était gonflé. La petite pièce dans laquelle ils s’apprêtèrent à pénétrer était baignée de vapeurs qui s’échappèrent avec un bruit aigu dans la première salle. La torche que tenait Guillaume grésilla, mais ne s’éteignit pas. Simplement, une brume épaisse étouffa sa lumière, lui conférant un aspect irréel.
    Morgennes entra et fut aussitôt environné de moiteur. De fines gouttes d’eau ruisselèrent sur sa cotte de mailles, alourdissant ses parties de cuir et de coton piqué.
    Une forme vague se détachait au milieu de la pièce, dont les murs et le plafond se perdaient dans un obscur brouillard. C’était un arbre, un sycomore, immense, épais, et comme douloureusement meurtri. Ses branches se cognaient aux murs et au plafond, y ouvrant par endroits des fissures, où leurs extrémités disparaissaient. Enfin, son âge, son poids, le faisaient se pencher vers le sol, recouvert de feuilles. Le sycomore avait quelque chose d’Atlas, le Titan condamné par Zeus à porter le ciel.
    — L’arbre dont on a fait la Vraie Croix, déclara Guillaume.
    Il passa la main sur les formes chenues du vieil arbre, montrant où celui-ci avait été taillé, et de quelle manière il avait cicatrisé. Le moule d’une croix apparaissait en creux dans le tronc et les branches, y formant une profonde blessure où un filet de sève suppurait. Avec le temps, la plaie s’était agrandie au lieu de s’obstruer, comme une main qui s’ouvre au lieu de se fermer.
    — Connaissez-vous les « cagots » ? demanda Guillaume, la paume poisseuse du sang de l’arbre.
    — Non, je ne crois pas…
    — Ce sont les descendants des Juifs qui firent la Vraie Croix. Des menuisiers, comme Joseph. Mais celui-ci est béni de Dieu, alors qu’eux sont

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