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Les chevaliers du royaume

Les chevaliers du royaume

Titel: Les chevaliers du royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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tentèrent de séparer les belligérants. Comme ils prenaient des coups des deux côtés, ils firent claquer leur fouet. Fous de rage, les Maraykhât se jetèrent sur eux pour les faire tomber de selle. Un corps à corps brutal s’engagea, des lames furent brandies, du sang coula.
    Soudain, un cri strident retentit dans le ciel, et un éclair bleu-gris frappa l’un des Maraykhât à la poitrine. L’homme porta la main à son cœur et la regarda. Elle était tachée d’un sang épais. Il n’eut pas le temps de s’étonner et s’effondra, mort. On hurla de plus belle, puis un nouveau cri tomba du ciel.
    Un faucon pèlerin tournoyait sous la voûte céleste, et plongeait vers la terre son regard aux yeux d’or. Il ouvrit le bec, en quête d’une proie, étendant ses ailes au-dessus des combattants. Généralement, ce genre d’oiseau ne volait pas la nuit. Était-il enchanté ?
    Les Zakrad firent silence. Les Maraykhât se regardèrent avec inquiétude, et regagnèrent leur camp. Morgennes, qui s’était dissimulé au milieu d’une ligne de chevaux entravés, attendit quelque temps, pour se faire oublier. Il reprenait son souffle, quand il entendit un tintement de clochettes. D’où venait-il ? Non loin de lui, entouré d’une dizaine de tentes plus petites, se trouvait un grand chapiteau de toile carré : probablement la tente de Matlaq ibn Fayhân. Une rafale de vent souleva le rabat en poil de chameau, dévoilant une petite table basse, où des gobelets étaient posés – ainsi qu’une carafe de cristal. Puis le rideau retomba. Le cœur de Morgennes battit à tout rompre. Il y avait, à quelques pas, de quoi étancher sa soif. « Trop facile », se dit-il.
    Le tintement se fit entendre à nouveau. Il tourna la tête, et vit venir dans sa direction une jeune femme montée sur une chamelle. La bête, blanche à l’origine, avait été barbouillée de noir avec de la suie prise au cul d’un chaudron. Elle portait sur son poitrail une clochette de bronze, qui sonnait au gré de sa démarche chaloupée.
    La tunique de la chamelière était de soie noire et luisait dans l’obscurité. Elle reflétait tout ce qui brillait à l’entour : lueurs de braseros ou de torches, qui se consumaient dans ses plis.
    L’oiseau de proie glapit une nouvelle fois. La jeune femme leva les yeux, le chercha parmi les étoiles, et, quand elle l’eut repéré, tendit le bras. L’oiseau fondit vers elle et se posa sur son poing fermé en l’enserrant délicatement. Sa maîtresse lui parla alors dans un drôle de langage, fait de sons gutturaux et de notes aiguës, de sifflements et de chuintements. Le faucon l’écoutait en penchant la tête, et répondait parfois – aussi docile qu’un serin. La jeune femme et l’oiseau s’entendaient si bien qu’ils semblaient de même race, de même sang.
    Le vent chassa les nuages, et une clarté lunaire les illumina d’une aura vaporeuse. La clochette tinta pour la troisième fois. Morgennes avait l’impression d’assister à une cérémonie religieuse, et de violer un interdit. Profitant du retour des nuages, il se glissa subrepticement dans la tente de Matlaq ibn Fayhân.
    La tente était profonde, avec un mât d’ivoire en son milieu. Un luminaire en forme de palmier diffusait une lumière cuivrée. Le mobilier était simple : quelques coussins brodés, une table basse, un coffre, un paravent. Tous ornés de versets du Coran. Le paravent était composé de trois volets de buis sculptés : de superbes gravures représentaient un aigle gigantesque – l’oiseau Roc, dont Les Mille et Une Nuits avaient conté les exploits. Sur l’un des panneaux, l’oiseau Roc emportait un éléphant dans les airs pour l’abandonner au sommet de la plus haute montagne d’Arabie.
    Quand Morgennes entra, un paon qui faisait la roue replia sa queue et s’enfuit en gloussant vers le fond de la tente, jetant sur la toile des reflets colorés. La soif de Morgennes en fut ravivée. Ses yeux ne quittaient pas la carafe de cristal. Il avait si soif qu’une flasque d’alcool de laine eût été pour lui ambroisie. Morgennes saisit la carafe et l’inclina vers l’un des gobelets. Vide ! Sa main fut prise de tremblements. Pour un peu, il aurait tordu le cou du paon et se serait gorgé de son sang. Il avait des envies de meurtre, qu’il ne s’expliquait pas. Il regarda les gobelets ; ils étaient vides aussi. De rage, Morgennes balaya la table d’un revers de main. Gobelets et

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