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Les chevaliers du royaume

Les chevaliers du royaume

Titel: Les chevaliers du royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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pas, et partira de lui-même en France, dans quarante jours.
    — Il a déjà trahi Dieu !
    — Les voies du Seigneur sont impénétrables.
    La conversation prenait un mauvais tour. Beaujeu se rembrunit. Il n’avait pas envie d’une dispute avec le frère chapelain, qui était en quelque sorte, ici, comme le légat du pape. Un personnage important.
    — Beau doux frère, dit doucement le frère commandeur, permettez-moi seulement de vous rappeler ce que disait l’inspirateur de notre ordre, saint Augustin : « Beaucoup se croient en dedans de l’Église qui sont en dehors ; et beaucoup se croient en dehors qui sont en dedans. » Laissons à Morgennes ces quarante jours de répit. Je me demande d’ailleurs s’ils ne lui seront pas plus difficiles à vivre que les années d’enfermement qui l’attendent en France.
    Des frères entrèrent alors par la porte des cuisines. Ils venaient servir la collation du matin, que les frères de Provence, de France et d’Angleterre, les plus nombreux au krak des Chevaliers, seraient les premiers à prendre. Un second service, juste après, serait donné pour les autres langues. C’est alors qu’une voix de harpie monta de la cour du château, non loin de la chapelle.
    — Morgennes est à moi ! criait Fémie. Vous n’avez pas le droit de me le prendre !
    Les frères commandeur et chapelain se hâtèrent vers la source de ces glapissements, suivis de leurs serviteurs, écuyers, frères sergents et clercs.
    Dans la cour, le soleil brillait si fort que tous marchaient tête baissée. Fémie – puisqu’il s’agissait d’elle – ne paraissait pas s’en soucier. Massada cherchait à la calmer, maniant tour à tour le sarcasme et le compliment.
    Après tout, Morgennes était à lui – même s’il l’avait payé avec les bijoux de sa femme.
    — Que se passe-t-il encore ? demanda le frère commandeur.
    — Elle prétend que vous n’avez pas le droit d’envoyer Morgennes en France, et qu’il lui appartient, répondit Massada.
    — Mes bijoux ! mugit Fémie. J’ai donné tous mes bijoux pour l’avoir !
    — Morgennes n’aurait jamais dû être acheté si cher, dit Beaujeu. Au mieux pouvait-on donner un couteau d’arme et un ceinturon, c’est la règle.
    — Il est à moi ! dit Fémie. À Damas, je l’ai acheté à Damas !
    — Il n’appartient qu’à Dieu, et à l’Hôpital le temps de son court séjour sur terre, coupa sèchement le frère chapelain. En y entrant, il s’est lui-même donné à notre ordre, à Dieu et à Notre Dame ! Qui êtes-vous à côté d’eux pour vouloir le reprendre ? !
    — Si vous voulez, l’ordre peut vous dédommager, dit le frère commandeur, qui cherchait à se montrer conciliant. Combien l’avez-vous payé ?
    — Tous mes bijoux ! fulmina Fémie. Et mon mari a laissé ce marchand de malheur poser ses mains sur moi et se servir lui-même !
    — Il lui en a laissé un ! protesta Massada.
    — Cent besants suffiront-ils à vous dédommager ?
    — Je veux mes bijoux ! Je veux Morgennes ! beugla Fémie.
    — Qu’on aille lui chercher pour cent besants de bijoux au trésor, ordonna le frère commandeur à son écuyer. Apportez-les-moi vite, que cette malheureuse se calme.
    — Pardonnez-moi beau doux frère commandeur, se risqua Massada, mais, si je puis me permettre, il y avait pour beaucoup plus de cent besants de bijoux sur ma femme. Je le sais, c’est moi qui les lui avais offerts ! En outre, le frère Morgennes m’avait assuré que vous me donneriez plus de cent fois ce que j’ai dépensé pour l’acheter…
    — N’êtes-vous pas ce marchand juif nommé Massada, qui faisait commerce de reliques à Nazareth et que les Templiers recherchent pour avoir osé dérober à leur connaissance, ainsi qu’à celle de l’archevêque de Jérusalem, l’âne de Pierre l’Ermite ?
    — Cent besants d’or iront très bien, ronronna Massada. C’est parfait, tout à fait suffisant. Peut-être même un peu trop.
    — Alors disons quatre-vingts besants d’or…
    — Quatre-vingts besants d’or, très bien, dit Massada tout à la fois mécontent, gêné et honteux.
    — Les Juifs, commenta le frère chapelain, ça ne peut pas s’empêcher de marchander…
    Massada et Beaujeu firent comme s’ils n’avaient pas entendu.
    L’affaire semblait réglée, quand le frère infirmier s’en vint trouver le sire de Beaujeu.
    — Beau doux frère commandeur, Raymond de Tripoli s’est

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