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Les chevaliers du royaume

Les chevaliers du royaume

Titel: Les chevaliers du royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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l’attendait en haut des marches. Emmanuel le suivit en prenant soin de ménager sa monture, affaiblie et qui perdait du sang. Quand il ne fut plus qu’à quelques pas de l’arche, le cavalier blanc s’effaça pour lui céder le passage, laissant voir derrière lui huit autres cavaliers, également vêtus de blanc. Emmanuel pénétra alors sur une esplanade naturelle, qui donnait, à droite, dans le vide d’un précipice et, à gauche, sur une porte de pierre sertie dans le flanc de la montagne. En face de lui, deux meurtrières servaient d’observatoire à un arbalétrier.
    — Bienvenue à El Khef ! dit un homme emmailloté de chaînes et monté sur un cheval rouge.
    — À qui ai-je l’honneur ? demanda Emmanuel.
    — On m’appelle le Ressuscité, dit le cavalier.
    — Je n’en connais qu’un, et ce n’est pas vous. Qui êtes-vous ? Que voulez-vous ?
    — Nous l’avons dit à tes amis, mais ils ne nous ont pas écoutés. Aucun mal pourtant ne leur aurait été fait s’ils avaient obéi.
    Sa voix, sa figure, rappelaient quelqu’un à Emmanuel. Qui donc était cet homme, et où l’avait-il vu ?
    — Que leur avez-vous fait ? demanda-t-il, le poing crispé sur son épée.
    — Tu le sauras bientôt ! répliqua le cavalier noir en jetant aux pieds d’Emmanuel les têtes tonsurées de trois hommes – des Hospitaliers !
    L’un des cavaliers blancs s’approcha lentement d’Emmanuel, lance en avant.
    Emmanuel fit faire un pas de côté à sa monture, et dévia le coup avec le plat de son épée. D’autres cavaliers s’avancèrent à leur tour, menaçants. Emmanuel recula, mais en bas de l’escalier des cris enflammés l’alertèrent : les Assassins montaient à l’assaut des marches, cimeterre à la main !
    Soudain, deux carreaux partirent en même temps de l’une des meurtrières et lui traversèrent le bras droit. Emmanuel manqua tomber de selle et lâcha son épée, qui disparut dans le gouffre à côté de lui.
    Cependant les assauts de ses adversaires ne faiblissaient pas. Emmanuel para un deuxième coup de lance avec son bouclier, en esquiva un troisième en se penchant sur la droite, si bas qu’il vit couler au-dessous de lui le fleuve al-Assi – le « fleuve rebelle », dont on disait qu’il coulait à l’envers, de la mer vers la montagne.
    Le quatrième coup de lance lui ouvrit la cuisse, un cinquième atteignit son destrier au poitrail, et les genoux de son cheval ployèrent. Qu’il ait tenu jusque-là relevait déjà du miracle, tant sa souffrance était grande et profondes ses blessures.
    La situation n’était pas mauvaise, elle était sans espoir. Les cavaliers blancs le harcelaient de coups de lance, les Assassins poussaient des hurlements, et l’arbalétrier l’ajustait à nouveau.
    Emmanuel regarda une dernière fois le cavalier noir, et le reconnut. Alors il s’écria :
    — Ma mort ne t’appartient pas !
    Et se précipita dans le vide avec sa monture.
    Le mystérieux cavalier blanc s’approcha du précipice et les regarda s’abîmer dans le fleuve, où Emmanuel et son cheval disparurent dans une gerbe d’écume. Alors il ôta son heaume, et s’emplit les poumons de l’air du soir – c’était un jeune homme d’à peine dix-huit ans, et qui malgré son âge avait accompagné Kunar Sell à Damas. Il s’appelait Simon, et serrait si fort le vexillum de saint Pierre qu’il en avait les jointures des mains blanches, aussi blanches que les reflets courant à la surface de l’al-Assi.

16.
    Enitere ergo, miles Christi !
    (« Lève-toi donc, soldat du Christ ! »)
    (Gerbert d’Aurillac, Correspondance.)
    Morgennes était assis dans une cuve en bois à l’intérieur garni d’un drap et se passait sur le haut du corps un pain de savon d’Alep que l’étuvéeur lui avait remis, avec la consigne de n’en rien laisser : « Ordre du frère commandeur », avait-il déclaré. Il se savonna le torse, les bras, puis le visage, la barbe et les cheveux. Cela fait, il se redressa, se lava le ventre, les jambes et les pieds. Enfin il se rassit, songeur, et mordit dans la cuisse d’un chapon qu’un auxiliaire avait posé sur une table non loin de lui.
    « Que cet instant dure le plus longtemps possible. » Voici ce dont il rêvait. Un bain de toute une vie.
    Il ferma les yeux, savourant l’étrange action du savon sur sa peau. Il avait l’impression que des anges le caressaient, et ses paupières se firent de plus en plus lourdes. La

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