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Les chevaliers du royaume

Les chevaliers du royaume

Titel: Les chevaliers du royaume Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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journée était pourtant loin d’être terminée. Il inspira une profonde bouffée d’air humide et se sentit empli d’un curieux bonheur, tranquille et égoïste. Depuis combien de temps n’avait-il pas dormi en paix ? Depuis qu’il avait quitté la France, se dit-il. Une nuit, pourtant, en Égypte… Soudain, un cri lui fit rouvrir les yeux : des sentinelles se hélaient sur les remparts.
    Puis il entendit d’autres cris, des cavalcades, des grincements de herses qu’on soulève, des portes qu’on ouvre et des appels à l’aide.
    Il se leva dans son bain, raide comme un piquet, quand la porte de l’étuve s’ouvrit : quelqu’un venait à grands pas dans sa direction. Une ombre traversait les vapeurs épaisses, écartant sur son passage les draps suspendus dans la pièce pour préserver l’intimité des baigneurs. Méfiant, Morgennes chercha son épée de l’autre côté de la cuve, ne la trouva pas, s’inquiéta, puis se rappela qu’il n’en avait plus. Qu’importe, il se battrait avec ses poings s’il le fallait. Il prit un peu d’eau dans ses mains, s’en aspergea le visage et sortit de la bassine.
    — Reste assis, Morgennes, profite de ton bain, c’est peut-être le dernier.
    C’était Alexis de Beaujeu.
    — Quelles nouvelles t’amènent ? l’interrogea Morgennes.
    — Frère Emmanuel n’est pas rentré, et le convoi chargé de nous apporter l’or n’est pas arrivé non plus.
    — Penses-tu qu’ils ont été attaqués ?
    — Malheureusement, je ne le pense pas, répondit Beaujeu. Je le sais. Un frère sergent de la patrouille vient d’arriver à l’instant…
    — Qu’a-t-il dit ?
    — Rien. Il est mort. Son cheval l’a mené jusqu’à nous.
    Morgennes pâlit et demanda :
    — Emmanuel ?
    Beaujeu remua tristement la tête, silencieux, tandis que Morgennes se séchait sans mot dire avec un drap de serge, avant d’enfiler sa chemise, ses braies et ses chausses.
    — Je veux voir ce mort, est-ce possible ?
    — Oui, si je t’accompagne.
    — Allons-y.
    Comme Morgennes se hâtait vers la porte de l’étuve, Beaujeu l’arrêta.
    — Un instant, Morgennes. Je t’ai dit que j’avais à te parler.
    — Qu’y a-t-il ?
    — Tu partiras ce soir à la recherche de la Vraie Croix.
    — Dieu tout-puissant, je t’en serai éternellement reconnaissant !
    — Officiellement, tu es parti demander à Saladin de te délier de ton serment d’allégeance à la religion mahométane.
    — C’est entendu, frère commandeur. Mais pourquoi tant de précautions ?
    — Je crains qu’il n’y ait un traître chez nous…
    — Tu soupçonnes quelqu’un en particulier ?
    — Non.
    — Qui peut avoir intérêt à nous voler l’argent de la rançon ?
    — Les Templiers, bien sûr. Mais ce ne sont pas les seuls…
    Beaujeu parlait à voix basse et sur un ton grave. Il tenait dans sa main le poignet de Morgennes, et le serrait à lui faire mal, mais Morgennes ne sentait rien.
    — Tu souffres à nouveau de la lèpre, n’est-ce pas ?
    Morgennes ne répondit rien, et ce silence était plus éloquent qu’une longue péroraison sur ce qu’il éprouvait – ou justement, n’éprouvait plus.
    — Lorsque je t’ai vu hier soir, poursuivit Beaujeu, je me suis dit : « Loués soient le Seigneur et même ces mystérieuses larmes d’Allah qui ont pris sous leur protection le beau doux sire Morgennes ! » Mais tu n’es plus des nôtres, et tu n’as plus ton épée. Quand la maladie a-t-elle recommencé ?
    — Quand j’étais en prison, à Damas.
    — Leurs médecins n’ont rien vu ?
    — Le mal de lèpre n’a ouvert qu’un œil. Il se réveille à peine. Pourtant, je le sens en moi qui s’agite et s’apprête à renaître. La règle de l’ordre me laisse quarante jours. C’est assez pour mener ma mission à son terme. De retour en France, j’intégrerai une mésèlerie de l’Hôpital.
    — Il faut partir ce soir, c’est déjà trop que d’être venu là…
    — Mais je ne saigne pas, ce mal ne se transmet qu’…
    — Je sais ce que disent les Mahométans ! D’ailleurs, regarde-moi : ai-je peur de te prendre la main ? Et Tripoli ! Il t’aurait baisé sur la bouche s’il en avait eu la force !
    — Je sais, dit Morgennes.
    — Assez bavardé. Prends Massada, Fémie et l’enfant avec toi.
    — Il en sera fait selon tes ordres, beau doux frère commandeur.
    Comme ils allaient sortir de l’étuve, Beaujeu reprit :
    — Retrouve

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