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Les compagnons de la branche rouge

Les compagnons de la branche rouge

Titel: Les compagnons de la branche rouge Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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violemment le petit garçon, je préfère
mon propre nom, Sétanta, fils de Sualtam. – Ne dis pas cela, mon garçon, répliqua
doucement le druide, tu as choisi toi-même ton propre nom. De sorte que, dorénavant,
non seulement tous les hommes d’Ulster mais tous ceux d’Irlande t’appelleront
Couhoulinn, et ce nom sera répété par les générations futures lorsqu’elles
vanteront tes mérites et tes prouesses. – Dans ce cas, maugréa le petit garçon,
j’y consens. Puis, peu importe le nom qu’on me donnera. »
    Dès lors, on n’appela plus Sétanta, fils de Sualtam, que
Couhoulinn, eu égard au fait qu’après avoir tué le chien du forgeron, il avait
juré d’être son fidèle protecteur, et ce quand il n’avait même pas six ans. L’exploit
d’avoir, à un âge si tendre, vaincu le plus redoutable chien de guerre que l’Irlande
eût jamais connu, un chien qu’aucune foule n’osait approcher tant sa hargne et
sa violence étaient redoutées de tous, valut à l’enfant une renommée qui ne
cessa de croître, car il eut ensuite d’innombrables occasions de prouver qu’il
était un héros.
    En ce temps-là, le druide Cavad dispensait son enseignement
à ses élèves dans une clairière, au milieu de la forêt, à l’est d’Émain Macha, où
il avait construit une petite forteresse à l’abri des loups et des animaux
sauvages. Les druides, en effet, possédaient une grande science qu’ils
transmettaient à leurs disciples. Nombre de jeunes gens venaient donc les
trouver et les prier de les admettre et de les faire bénéficier de leurs
connaissances. Là, ils apprenaient une multitude de vers, pendant une période
qui pouvait durer jusqu’à vingt années. Les druides enseignaient leur savoir de
manière orale, car ils prétendaient qu’il fallait se garder de confier à l’écriture
les secrets de la nature, non seulement pour éviter de les divulguer ou les
révéler à n’importe qui, mais également afin de mieux cultiver sa mémoire. Ainsi,
les disciples des druides étaient-ils tenus d’apprendre par cœur l’essentiel de
la doctrine et des anciennes traditions [78] . Mais comme cet
apprentissage réclamait beaucoup d’efforts et de patience, certains disciples
se décourageaient et s’en allaient au bout de quelques mois, voire quelques
semaines.
    Ainsi donc, Cavad avait pris avec lui une centaine de jeunes
gens, mais il n’en restait à l’époque que huit capables de suivre son
enseignement.
    Or, un jour où l’un des huit le questionnait sur ce que
présageait de faste ou de néfaste un signe apparu au même instant, Cavad
répondit : « Si un petit garçon prend les armes aujourd’hui, il s’attirera
honneur et gloire, mais sa vie sera brève et de peu de durée [79] . »
    Or, Couhoulinn, qui non loin de là s’entraînait à des jeux d’adresse,
entendit la question du disciple et la réponse du maître. Jetant aussitôt tous
ses jouets, il regagna Émain Macha et pénétra droit dans la chambre du roi
Conor.
    « Que tous les biens qui se trouvent en Ulster soient
en ta possession, roi des guerriers ! s’écria-t-il. – Oh !… tu tiens
le discours de quelqu’un qui veut demander quelque chose ! dit Conor en
riant. Quelle est donc ta requête, mon petit ? – Eh bien, voici : je
veux revêtir les armes de tes guerriers. – Vraiment ? reprit Conor. M’est
avis que ce brusque désir t’a été inspiré par quelqu’un qui savait les choses. Qui
donc te l’a révélé ? – Le druide Cavad. Il a dit que le garçon qui
revêtirait aujourd’hui pour la première fois ses armes de guerre en tirerait
honneur et gloire, quitte à abréger sa vie. – Il avait sans doute de bonnes
raisons pour le faire, car je le sais incapable de tromper quiconque par un
mauvais jugement ou une prophétie douteuse. »
    Et, sur ce, il donna deux lances, une épée et un bouclier au
petit Couhoulinn, qui se mit à les secouer et les manier tant et si bien qu’il
les réduisit en pièces. Alors, Conor alla quérir deux autres lances et les lui
remit, ainsi qu’un autre bouclier et une autre épée. Couhoulinn les saisit, les
secoua, les mania, les brandit, les éprouva, et les mit en pièces à leur tour. Et
des dix-sept lots d’armes qui se trouvaient pour l’heure en la forteresse d’Émain
Macha, et que Conor destinait aux jeunes gens qui se signaleraient par leur
adresse et leur audace, honneur entre tous prisé, entre tous célébré, aucun des
dix-sept ne

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