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Les Conjurés De Pierre

Les Conjurés De Pierre

Titel: Les Conjurés De Pierre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philipp Vandenberg
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avait-il pas dit qu’elle ne devait s’en servir qu’en cas d’extrême détresse ? N’était-ce pas providentiel qu’elle ait caché le parchemin dans la bibliothèque des dominicains ?
    Le soir tombait sur la ville. Afra frissonnait en arrivant à la porte du couvent. De l’église montaient les psaumes monotones des vêpres.
    Afra dut frapper plusieurs fois à la porte avant qu’on vienne lui ouvrir. Jakob Luscinius, le bibliothécaire manchot, passa la tête dans la porte entrebâillée.
    — Les visites sont plutôt rares à cette heure-là, dit-il en guise d’excuses. Le frère portier et les moines sont tous aux vêpres dans l’église.
    — Dieu merci ! répondit Afra, je n’aurai donc pas besoin de donner d’explication. Laissez-moi entrer !
    Luscinius hésita avant d’obtempérer.
    — Suivez-moi et dépêchez-vous. Les vêpres se terminent. Si on me voit avec vous, on me flanquera à la porte. Que voulez-vous donc à une heure si tardive ?
    Afra ne répondit pas, elle se tut jusqu’au moment où ils arrivèrent dans la bibliothèque. Là, elle lui chuchota à l’oreille :
    — Frère Jakob, vous n’avez tout de même pas oublié que je vous ai sorti voilà peu d’une passe difficile.
    Le manchot, embarrassé, avançait en laissant pendre l’unique bras qui lui restait.
    — Oui, naturellement. Je suis bien heureux de ne plus demander la charité et de n’être plus la risée de tous. Vous me comprenez.
    — Je vous comprends très bien, frère Jakob, je ne veux pas vous causer d’ennuis. Mais je me trouve dans une situation dramatique : mon mari est en prison, il est accusé du meurtre de Werinher Bott. Je ne sais quelle crapule a mis le feu à ma maison. J’ai tout perdu. Il ne me reste que ce que je porte sur moi. Je ne sais plus que faire. Hébergez-moi quelques jours jusqu’à ce que je sache et que j’y vois un peu plus clair.
    l e manchot semblait embarrassé et inquiet.
    — V ous rêvez complètement ! La règle de l’ordre des dominicains est extrêmement stricte. l es femmes ne sont autorisées à pénétrer dans le couvent que dans des circonstances exceptionnelles. Il est impensable qu’on puisse vous trouver là.
    — Aucun des moines ne s’apercevra que le diable s’est introduit dans le couvent, répondit Afra avec une pointe d’ironie dans la voix. Je ne pourrais trouver meilleure cachette qu’ici, au milieu de ces montagnes de livres. De plus, tu m’as dit toi-même que quasiment personne ne fréquente cette bibliothèque.
    — Oui, c’est vrai…
    — Je ne te causerai pas d’ennui, frère Jakob, je te le promets.
    Afra s’assit sur une pile d’in-folios poussiéreux, cala la tête entre ses mains et ferma les yeux.
    En la voyant ainsi accablée, Luscinius comprit qu’il serait vain de vouloir la convaincre de quitter les lieux. Le manchot devait se résoudre à offrir l’hospitalité à une femme – au moins pour quelques jours.
    — Bon, d’accord, finit-il par dire, la règle de saint Dominique prescrit la pauvreté et la dévotion. Il n’est indiqué nulle part que l’on doit refuser un toit pour la nuit à celui qui n’en a pas. Vous pouvez rester. Si jamais on vous découvre, nous ne nous connaissons pas. Vous vous seriez introduite ici en cachette.
    Afra tendit sa main au bibliothécaire :
    — Entendu. Ne vous faites pas de soucis !
    Jakob Luscinius sembla rassuré. Avant de refermer la porte derrière lui, il se retourna encore une dernière fois et dit à Afra d’une voix étouffée :
    — Femme, soyez prudente avec la chandelle. Vous savez que le feu prend vite dans une bibliothèque. À demain, à prime.
    Afra écouta attentivement ses pas s’éloigner. Elle alla s’installer tout au bout d’une allée transversale au milieu d’un fouillis inextricable de livres. Elle écarta une douzaine d’in-folios aux reliures en bois recouvert de cuir. Puis elle choisit quelques recueils de parchemins et quelques livres reliés dans une peau d’agneau très tendre qu’elle disposa en guise de matelas. Pour l’oreiller, elle préféra un épais volume d’Armandus de Bellovisu  [11] dont le parchemin était particulièrement souple : De declaratione difficilium terminorium tam theologiae quam philosophae ac logicae. Ses connaissances en latin ne lui permirent pas de traduire cet interminable titre.
    L’ouvrage ne l’intéressait du reste que dans la mesure où il était plus moelleux que les autres.
    Elle avait

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