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Les Conjurés De Pierre

Les Conjurés De Pierre

Titel: Les Conjurés De Pierre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philipp Vandenberg
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tisserand. La vie n’est pas simple pour une femme seule. Les hommes, l’évêque y compris, nous considèrent comme des proies faciles.
    Afra s’interrogea sur les allusions de Gysela. La Kuchler aurait-elle entendu parler des avances que lui avait faites l’évêque perfide ? Avant même qu’Afra ait trouvé une réponse, Gysela intervint :
    — Il essaie avec toutes celles qu’il invite. Vous n’avez pas fait exception.
    L’évêque, le banquet et les fâcheuses conséquences : Afra ruminait ses idées noires. Elle avait encore des comptes à régler avec Wilhelm von Diest, qui avait toutefois le pouvoir et les moyens de la sortir de cette mauvaise passe.
    Mais à quel prix ? La vie avait beau ne pas avoir été tendre avec elle, sa conscience lui interdisait de se conduire comme une prostituée.
    — Vous feriez peut-être mieux de quitter Strasbourg pour un temps, lui dit subitement la Kuchler.
    Afra hésita avant de répondre :
    — C’est mon intention en effet.
    — Je cherche quelqu’un pour m’accompagner à Vienne. Je préférerais voyager en compagnie d’un homme. Mais la route est facile et ma voiture n’est pas très chargée. Je crois que deux femmes pourraient s’en sortir.
    — Vous allez à Vienne ? demanda Afra surprise. Vous passez donc par Salzbourg !
    — Parfaitement.
    — Quand partez-vous ?
    — Les chevaux sont déjà attelés. Ma voiture m’attend derrière la cathédrale.
    — C’est le ciel qui vous envoie ! s’écria Afra, ravie. Je dois me rendre de toute urgence dans cette région. De toute urgence, vous m’avez entendue !
    — Je n’y vois aucun inconvénient, fit la Kuchler. Mais pourquoi donc êtes-vous si pressée d’aller là-bas ?
    Afra n’eut pas le temps de répondre que déjà le changeur revenait avec une petite bourse en peau et comptait les florins sur le guichet.
    — Vous avez l’intention de faire un long voyage, lui fit remarquer Gysela à la vue de la somme retirée. Ma marchandise ne vaut pas tant d’argent.
    Après en avoir terminé avec Afra, le changeur se tourna vers la Kuchler :
    — Qui êtes-vous ? Quel est votre nom et quel est le montant de vos avoirs ?
    — Donnez-moi dix florins.
    Le changeur leva les bras au ciel en se lamentant. Dès le matin, sortir de si grosses sommes de ses coffres ! Il disparut en marmonnant et en ronchonnant.
    Les deux femmes se donnèrent rendez-vous une heure plus tard sur l’aire des attelages.
    N’ayant plus rien à se mettre sur le dos, Afra devait trouver des vêtements et le minimum nécessaire pour voyager.
    8

Un jour et une nuit
    El les étaient affamées, assoiffées et, en prime, épuisées au point de ne pouvoir quasiment plus se tenir assises sur la banquette. Arrivant de l’ouest, elles virent d’abord surgir face à elles la chaîne escarpée du Kegel devant laquelle se dessina progressivement la ville entourée de ses fortifications.
    La faim, la soif et la fatigue s’évanouirent subitement. Gysela lança ses chevaux au grand trot sur les dernières lieues, comme jamais elle ne l’avait fait pendant ces neufs jours de voyage. Afra, inquiète, se cramponnait fermement à son siège.
    Malgré la robustesse et l’endurance des bêtes que la Kuchler manœuvra avec dextérité, le voyage de Strasbourg à Salzbourg avait duré deux jours de plus que prévu. Un orage avec des pluies diluviennes les avait surprises en Souabe.
    Gysela, craignant que sa marchandise soit mouillée, avait préféré s’abriter dans une ferme abandonnée aux environs de Landsberg.
    Lorsqu’elles s’étaient remises en route le lendemain, les chemins étaient détrempés et, à plusieurs reprises, les roues s’étaient embourbées jusqu’au moyeu.
    Des branches tombées leur avaient barré en plusieurs endroits le passage.
    Le soleil automnal se cachait déjà derrière le Mönchsberg, plongeant dans l’ombre la petite ville de Salzbourg située dans une cuvette entre la montagne et la Salz. Elle devait plus son charme au paysage magnifique qui l’entourait qu’aux bâtisses qui s’y trouvaient. Mis à part la grande forteresse quasiment imprenable surplombant la ville, quelques couvents de part et d’autre du fleuve et quelques maisons bourgeoises cossues, la bourgade n’avait aucun intérêt.
    Salzbourg devait son influence à sa situation géographique. Les plus grandes routes du nord vers le sud et de l’est vers l’ouest se croisaient à cet endroit. De surcroît, la

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