Les Conjurés De Pierre
réfléchissant.
Sans donner d’explication, il prit sa lanterne, traversa l’allée centrale et disparut dans celle d’en face. Afra resta à l’affût dans l’obscurité.
Elle l’entendit soudain qui marmonnait au fond de la bibliothèque.
Afra tâtonna dans le noir le long des étagères pour aller chercher sa chandelle près de son lit de fortune. Il était grand temps. Il ne restait plus qu’un centimètre avant qu’elle ne soit complètement consumée. Elle alluma une deuxième bougie et partit à la recherche de frère Dominique.
Elle croisa le vieil homme à mi-chemin. Il semblait furieux.
— On devrait interdire aux simples d’esprit de s’occuper de livres, maugréa-t-il en tendant à Afra un petit livre avec deux grossiers fermoirs.
— Qu’est-ce ?
Elle ouvrit le livre et lut le titre écrit dans une jolie écriture. Castulus a roma – Alchimia UNIVERSALIS .
— Autrefois, on arrivait à s’y retrouver ici, marmonna le moine en colère, il me suffisait de deux secondes pour mettre la main sur un livre. Comment s’appelle le nouveau bibliothécaire, m’avez-vous dit ?
— Jakob Luscinius.
— Un homme affligeant !
— Vous le connaissez ?
— Pas en personne. Mais celui qui traite les livres comme ce Luscinius, ne peut être qu’un homme affligeant. Puis, il ajouta sans transition : dans cette Alchimia, vous trouverez une recette pour fabriquer cette solution qui révèle l’encre. Mais vous devez m’excuser maintenant. Le jour va bientôt se lever.
Afra voulut retenir l’homme, mais elle se ravisa, elle lui aurait fait courir trop de risques.
Avant de refermer la porte, le vieil homme lui chuchota :
— Femme, je reviens dans sept jours, essayez de vous procurer cette solution d’ici là. Nous reparlerons du document plus tard, si vous le souhaitez.
Si elle le souhaitait ! Frère Dominique lui apparaissait comme un signe du ciel. Il était totalement désintéressé. Quel avantage pourrait tirer du parchemin cet homme reclus dans l’asile de fous de Saint-Trinitatis ? L’or et les richesses ne seraient d’aucune utilité à ce vieux sage.
Elle était retournée s’allonger sur sa couche et essayait de trouver le sommeil lorsqu’elle fut à nouveau saisie d’une profonde inquiétude.
Comme mue par une voix intérieure, elle se leva pour aller rechercher le parchemin.
Elle se dirigea à la lueur de sa bougie jusqu’au fond de la salle, elle aurait pu y aller les yeux fermés. Elle connaissait le titre du livre dans lequel elle avait glissé le parchemin aussi bien que le Notre Père : Compendium theologicae veritatis .
Une fois arrivée à la hauteur de l’étagère, elle éleva sa bougie. L’étagère était vide. Les cinq rayonnages étaient vides. Les livres avaient disparu avec, entre autres, celui qui contenait le parchemin. Afra mit du temps à mesurer les conséquences de sa découverte.
Elle éleva sa chandelle dans toutes les directions. Mis à part cette étagère désormais vide, rien n’avait bougé depuis la fois dernière. Elle ne pouvait imaginer que le livre soit sorti de la bibliothèque. Luscinius l’avait certainement rangé à un autre endroit.
Prime allait commencer, frère Jakob ne tarderait pas à arriver, elle pourrait alors lui demander des renseignements. Mais elle se ravisa et se lança sans attendre dans la recherche du c ompendium . Comment aurait-elle pu dire à Luscinius, sans se trahir, qu’elle cherchait précisément cet ouvrage ? Non, elle devait le trouver avant que le manchot surgisse.
Il est normalement extrêmement simple de trouver un livre parmi d’autres classés dans l’ordre alphabétique par nom d’auteur.
Encore faut-il connaître son nom !
Seulement voilà, la plupart des livres de cette bibliothèque étaient des ouvrages anonymes. Si encore ils avaient été classés par taille, la recherche eut été moins laborieuse. Afra était loin de saisir le classement de frère Jakob. Trouver le c ompendium revenait à chercher une aiguille dans une botte de foin. Comme elle devait s’y attendre, sa recherche fut vaine.
Luscinius arriva au lever du jour avec une cruche d’eau et du pain qu’il avait, sous un prétexte quelconque, mendié à la cuisine.
Afra avait l’air désemparé.
— Où sont passés les livres qui se trouvaient tout au fond sur l’étagère ? demanda-t-elle au manchot sur un ton agressif.
— Vous parlez des copies des ouvrages de théologie ?
— Les
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