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Les Conjurés De Pierre

Les Conjurés De Pierre

Titel: Les Conjurés De Pierre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philipp Vandenberg
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et, subitement, il semblait avoir oublié toute la gravité de la situation. On aurait presque pu penser que ce document le faisait rire.
    — Comprenez-vous de quoi il s’agit ? demanda l’architecte à l’alchimiste.
    — Je n’en ai pas la moindre idée, répondit vivement Rubaldus, peut-être un peu trop vivement. Il faudrait vous renseigner auprès d’un théologien. De l’autre côté du fleuve, à Ulm, il y en a suffisamment qui traînent par-là.
    — Maître Rubaldus, n’avez-vous pas vous-même été moine autrefois ? demanda Ulrich, le regard empreint de sévérité.
    — Qui vous a dit cela ?
    — C’est ce qu’on dit à Ulm. Quoi qu’il en soit, vous devriez savoir ce que signifie Constitutum Constantini.
    —  Je n’ai jamais entendu ces mots ! 
    Sa réponse frisait la désinvolture. Et comme voulant se soustraire aux éventuelles autres questions, il s’avança vers la fenêtre et croisa les mains dans son dos en jetant un œil las au dehors.
    — L’unique explication que je puisse vous donner concerne le sang du Saint-Esprit. C’est ce que l’on appelle dans notre milieu l’encre sympathique qui disparaît juste après qu’on l’a utilisée et qu’on ne peut faire réapparaître qu’au moyen d’une solution particulière. À mon avis, ce petit bénédictin ne cherchait qu’à se rendre intéressant. Les bénédictins sont connus pour leur faconde. Persuadés d’être plus intelligents que les autres, ils couchent sur le papier leur moindre colique. N on, croyez-moi, cet écrit n’a pas plus de valeur que le parchemin sur lequel il est rédigé, affirma-t-il en retournant vers la table où se trouvait le document. Nous devrions le détruire avant qu’il ne cause quelque malheur.
    Afra s’interposa aussitôt :
    — De quel droit ? Il m’appartient et j’entends bien le conserver.
    Ils observèrent tous les trois le parchemin grisâtre, dont l’écriture avait déjà complètement disparu. Afra saisit le document, le replia précautionneusement et le glissa dans son étui.
    La traversée en sens inverse fut aussi silencieuse que l’aller. Le passeur affichait une apparente indifférence. Afra, désespérée, cherchait à se souvenir des circonstances dans lesquelles elle avait reçu le parchemin.
    À sa mort, son père avait laissé à chacune de ses cinq filles un souvenir. Bien qu’il ne fût pas riche, il s’estimait heureux que sa famille ne meure pas de faim dans des temps aussi difficiles. En tant qu’aînée, elle avait reçu cet étui. Il devait vraisemblablement lui incomber une responsabilité particulière, mais laquelle ? Son père étant mort subitement, il n’avait pas eu l’occasion de lui donner le moindre renseignement au sujet du parchemin.
    S’il l’avait fait, elle ne l’aurait pas oublié.
    — À quoi penses-tu ? lui demanda Ulrich en regardant le sillon que traçait la barque dans l’eau.
    Afra secoua la tête.
    — Je ne comprends absolument rien. Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ?
    Ulrich lui répondit après un long moment, à l’instant où ils allaient accoster :
    — Je peux me tromper, mais il me semble que quelque chose cloche dans cette affaire. Quand Rubaldus a traduit le texte, il s’est arrêté subitement, comme s’il ne comprenait pas. J’ai eu l’impression qu’il réfléchissait mais, par ailleurs, je voyais ses mains trembler.
    Afra regarda Ulrich :
    — Je n’ai rien remarqué. La seule chose qui m’ait contrarié c’est qu’il voulait détruire le parchemin. Comment a-t-il dit ? « Avant qu’il ne cause quelque malheur », ou quelque chose de ce genre ? Soit les informations qu’il contient revêtent une signification particulière, et, dans ce cas, nous devons veiller sur ce document comme sur la prunelle de nos yeux, soit il ne s’agit que du bavardage d’un prétentieux, et alors rien ne nous oblige à le détruire. J’ai trouvé le tout assez incompréhensible, dit-elle en soupirant. Je ne suis pas parvenue à en retenir le moindre mot. J’en ai déjà oublié la moitié. Et toi ?
    Ulrich afficha un sourire malicieux qu’Afra appréciait particulièrement chez lui. Il tendit sa main gauche à Afra et la retourna.
    Afra écarquilla de grands yeux en découvrant les notes couvrant sa paume. Ulrich haussa les épaules.
    —  C’est une habitude chez nous autres architectes. Ce que tu inscris sur ta main, tu ne peux ni le perdre ni l’oublier. Il te suffit ensuite

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