Les conquérants de l'île verte
des
oiseaux qui me paraissait le plus noble. Maintenant, ô druide, lève-toi et
emploie ta science et ta magie pour nous dire ce que tout cela signifie. »
Cesard se leva devant le roi d’Irlande et, grâce à sa
connaissance des choses cachées, il prit la parole en ces termes :
« J’ai une nouvelle pour toi et pour tous les hommes de cette île :
des guerriers sont venus de la mer, des guerriers nobles et hardis qui ont
franchi le grand océan pour venir jusqu’à nous. Ils apportent avec eux la mort
et la destruction, car ils sont gens habiles en fait de magie et d’incantation.
Ils jetteront sur vous des nuages druidiques qui vous égareront et, dans chaque
combat que vous mènerez contre eux, vous serez les plus faibles. Sache donc, ô
roi d’Irlande, que l’heure est venue où les Hommes-Foudre cesseront d’être les
maîtres de cette île. »
À ces mots du druide Cesard, les Fir Bolg envoyèrent des
espions surveiller les gens qui étaient venus de la mer. Leur mission
accomplie, les espions les informèrent que la troupe des nouveaux arrivés était
la plus belle qu’on eût jamais vue dans le monde, tant pour l’aspect que pour
l’armement, pour l’équipement que pour la musique, pour le jeu que pour la
façon de se comporter. Elle était également, à les en croire, la plus
terrifiante, car ses guerriers paraissaient tous avoir une grande science des
arts et des techniques du druidisme et de la magie.
Les Fir Bolg tinrent conseil dans le palais royal de Tara.
« C’est un grand désavantage pour nous que de ne pas savoir d’où est venue
cette armée, ni ce qu’elle a l’intention de faire en Irlande. Envoyons vers eux
Sreng, fils de Sengann. C’est un homme rude et de grande taille qui connaît
très bien les arts et les sciences. Il ira trouver les étrangers et parlera
avec eux. Il leur demandera qui ils sont et ce qu’ils veulent. »
Sreng, fils de Sengann, se leva et se prépara à partir. Il
prit son puissant bouclier rouge-brun, ses deux lances en bois très épais, son
épée qui étincelait, son casque à quatre cornes et sa lourde massue de fer.
Ainsi équipé, il prit congé de l’assemblée royale et se dirigea vers l’endroit
où s’étaient retranchés les gens des tribus de Dana, sur le territoire de
Connaught.
Les gens de Dana le virent arriver dans la plaine, et ils
s’étonnèrent fort de sa grande taille et de son horrible aspect. « Voici
un homme seul qui vient vers nous, dirent-ils. Il ne peut être qu’un messager
envoyé pour nous demander qui nous sommes et ce que nous voulons. Mais nous ne
savons pas de quelle race il est, peut-être de celle des Fomoré. Que Bress,
fils d’Élatha, aille s’entretenir avec lui. Bress est de sang royal, mais son
père est un Fomoré : il pourra sûrement le comprendre et nous dire ensuite
ce qu’il en est. »
Bress, fils d’Élatha, prit son bouclier, son épée et ses
deux grandes lances, puis il sortit du camp des tribus de Dana et s’avança dans
la plaine à la rencontre de Sreng, fils de Sengann. Ils allèrent l’un vers
l’autre jusqu’à ce que l’intervalle qui les séparait leur permît de s’adresser
la parole. D’abord, ils se regardèrent avec autant d’attention que de
curiosité. Pour chacun d’eux, l’armement et l’équipement de son vis-à-vis
avaient quelque chose de surprenant. Trouvant étranges les deux grandes lances
de Bress, Sreng planta son bouclier dans la terre de façon à se protéger le
corps et le visage. Bress tint de même son bouclier devant lui et salua Sreng.
Sreng le salua à son tour, et tous deux comprirent qu’ils parlaient le même
langage et qu’ils avaient donc des ancêtres communs. « Je me réjouis
d’entendre un discours aussi plaisant que le tien, dit Bress. Je vois bien que
tes ancêtres sont de la race de Nemed, béni soit-il dans nos mémoires. – J’éprouve
autant de plaisir que toi en constatant que nous sommes de même race et de même
sang, répondit Sreng. Mais sache que nous sommes des hommes redoutables et que
nous n’avons jamais reculé devant des ennemis, quels qu’ils soient. – Il en va
de même pour nous, continua Bress. Sache également que, lorsqu’on la provoque,
notre colère est grande contre nos ennemis, et que personne n’a jamais eu
raison devant nous. – Certes, dit Sreng, je comprends que tu es d’un peuple
courageux. Si jamais nos armées devaient s’affronter, ce serait la mort assurée
pour les uns
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