Les conquérants de l'île verte
parler dans la plaine et
comment étaient ses armes. Il montra la lance que lui avait donnée Sreng, et il
répondit : « C’est un homme rude, puissant, armé de fortes armes que
j’ai rencontré. Il est grand et hardi, il n’éprouve aucune crainte, aucune
frayeur devant qui que ce soit. Et je doute fort que son peuple nous livre sans
combat la moitié de l’Irlande. – Il faut donc nous préparer à une mortelle
bataille, dirent les gens des tribus de Dana. Fabriquons des lances et des
épées et construisons des forteresses où nous réfugier en cas de besoin. »
Ils envoyèrent également leurs trois magiciennes, Bobdh,
Macha et Morrigane vers Tara, lesquelles parvinrent sans encombre au mont des
Otages. De là, elles déversèrent des averses de magie druidique, des nuages
denses de brouillard et de violentes pluies de feu, avec des gouttes de sang
qui tombaient sur la tête des guerriers. De sorte que, pendant trois jours et
trois nuits, les Fir Bolg ne purent trouver aucune tranquillité, aucun repos,
et ils avaient le cœur empli d’angoisse.
« La magie de nos druides est mauvaise, dirent-ils
enfin, puisqu’ils ne peuvent nous protéger de la magie des tribus de Dana. –
Nous vous protégerons ! » s’écrièrent les druides des Fir Bolg.
Ils firent des incantations autour de la colline de Tara et
arrêtèrent la magie des tribus de Dana. Alors, les Fir Bolg tinrent conseil et
décidèrent de s’apprêter au combat. Ils assemblèrent leurs troupes en un même
lieu, avec tous leurs chefs, tous leurs nobles et tous leurs rois, et ce lieu
était alors nommé la Plaine de Lia.
Quand ils virent les Fir Bolg ainsi rassemblés, les gens des
tribus de Dana réunirent toutes leurs troupes et, se dirigeant vers cette
plaine, y prirent position. Trois de leurs druides furent envoyés vers les
Hommes-Foudre pour leur proposer le partage de l’Irlande au nom de leur commune
origine, puisque les Fir Bolg et les gens des tribus de Dana étaient tous des
descendants de Nemed.
Les trois druides arrivèrent bientôt à la tente d’Éochaid,
fils d’Erc, roi suprême de l’Irlande. On leur offrit des trésors et des
présents et on leur demanda ce qu’ils voulaient. Ils dirent qu’ils étaient
venus auprès du roi suprême pour lui proposer de partager l’Irlande. Les Fir
Bolg leur répondirent qu’ils n’accepteraient jamais ce partage et qu’ils ne
donneraient jamais la moitié de l’île à quiconque se présenterait ainsi.
« Eh bien, dirent les trois druides de Dana, sachez que
vous devrez nous combattre. Quand donc décidez-vous de livrer bataille ? –
Il nous faut un délai, répondirent les Fir Bolg. Nous devons préparer nos
lances, nos épées, et fabriquer de solides boucliers pour nous protéger. »
Les trois druides retournèrent auprès des gens de Dana et
leur annoncèrent que jamais les Fir Bolg n’accepteraient de leur donner une
moitié de l’Irlande. Et les gens de Dana comprirent qu’il leur fallait
s’attendre à de sanglantes luttes, car leurs adversaires étaient tout aussi
braves et courageux qu’eux-mêmes.
Quinze jours et un mois après le début de l’été, au milieu
de la journée, tel était le moment qu’on avait fixé pour la rencontre et la
bataille dans la Plaine de Lia. Les troupes s’ébranlèrent aux premiers rayons
du soleil. Munies de leurs boucliers revêtus d’ornements peints, de leurs
lances majestueuses et royales, de leurs javelots de combat et leurs épées
brillantes, elles se firent face. Fatach, le poète des Fir Bolg, s’avança
devant les siens pour chanter leur colère et la gloire de leurs ancêtres. Ayant
dressé un pilier de pierre au milieu de la plaine, il s’y adossa, tandis que
Cairpré, le poète des tribus de Dana, dressait son propre pilier à l’autre
extrémité de la plaine et s’y adossait lui-même pour chanter le courage des
guerriers de son peuple. C’est depuis ce temps que la Plaine de Lia fut appelée Mag-Tured , c’est-à-dire la « Plaine des
Piliers » [46] .
Alors, le combat commença, violent et impitoyable. Des coups
si mortels furent échangés entre les bataillons que se brisèrent les boucliers
de part et d’autre et que les lances furent tordues, les épées brisées. La
clameur devint effroyable, et l’activité que déployaient les guerriers dans toute
la plaine était décuplée par le nombre d’exploits qu’accomplissait chacun. À la
fin du jour, toutefois, les hommes des tribus
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