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Les conquérants de l'île verte

Les conquérants de l'île verte

Titel: Les conquérants de l'île verte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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à un fils. Quand ton peuple viendra pour détruire
le tertre, envoie un message pour me prévenir, afin que je puisse me mettre à
l’abri, ainsi que ton troupeau. Et, toi-même, tu pourras revenir ici quand tu
le voudras. Maintenant, pars vers les tiens. »
    Après avoir cueilli des primeroses, de l’ail sauvage et des
fraises, Néra s’en revint vers la forteresse. Il lui semblait avoir séjourné
trois jours dans le tertre. Or, en arrivant dans la maison, il trouva Ailill et
Maeve, ainsi que leurs familiers, autour du chaudron. « As-tu accompli ce
que j’ai demandé ? dit Ailill. – Oui, répondit Néra, mais il m’est arrivé
d’étranges aventures. Je suis allé dans un beau pays où se trouvaient de grands
trésors, des pierres précieuses, de riches ornements, de bonnes nourritures et
des breuvages enivrants. Mais ceux qui y vivent viendront, la prochaine nuit de Samain , vous tuer et brûler la forteresse, à moins que
vous n’alliez vous-mêmes, la veille, détruire le tertre. – Certes, dit Ailill,
nous irons sans faute avant qu’ils ne viennent nous attaquer. Il est bon que tu
aies fait ce voyage, ô Néra. Tu auras mon épée à la poignée d’or en récompense
de ce que tu as fait. »
    Trois jours avant Samain , Ailill
avertit Néra qu’il était temps pour lui d’aller, comme convenu, protéger la
femme et ses biens. Néra revint donc dans le tertre, et la femme lui souhaita
la bienvenue. « Rends-toi maintenant dans la maison du roi, lui dit-elle,
car je suis allée là-bas chaque jour porter un fagot de bois à ta place, en
prétendant que tu étais malade. Et voici ton fils. »
    Néra prit son fils dans ses bras, puis il alla porter un
fagot de bois à la maison du roi, comme si de rien n’était. Ensuite, il
rassembla son troupeau et sortit du tertre avec la femme et son fils.
    La veille de Samain , Ailill et Maeve
rassemblèrent les hommes de Connaught et allèrent assaillir le tertre. Après
l’avoir détruit, ils emportèrent toutes les richesses qu’il recélait. Et voilà
comment Ailill et Maeve eurent la couronne de Briun qui leur conférait la
suprématie sur tous les autres peuples de l’Irlande.
    Quant à Néra, il repartit dans le tertre avec sa femme, son
fils et son troupeau, et il y vécut depuis lors. [97]
    En ce même temps, dans le Munster, régnait un roi nommé
Failbé qui avait deux fils, Rib et Ecca. Ayant eu le malheur de perdre sa
femme, leur mère, il avait épousé une jeune fille de grande beauté qu’on
nommait Ebliu. Or, cette Ebliu jeta ses regards sur le cadet des fils, Ecca, et
elle en devint follement amoureuse. Elle était pleine d’attentions envers lui
et lui manifestait tant d’intérêt qu’il finit par s’apercevoir que cette
affection, loin d’être celle qu’une mère porte à son fils, était entachée de
désir.
    Il fit alors ce qu’il fallait pour éviter de se trouver en
présence d’Ebliu, car il ne voulait pas causer le moindre tort à son père. Il
s’en allait fréquemment à la chasse avec les jeunes gens de son âge et rentrait
le plus tard possible à la maison royale. Mais c’était là peine perdue, car
Ebliu le guettait, et elle s’arrangeait toujours pour l’approcher dans des
attitudes qui ne laissaient aucun doute sur les tourments d’amour qui
l’accablaient. Ainsi advint-il qu’Ecca se laissa prendre à la séduction d’Ebliu
et partagea sa couche.
    Cela dura un certain temps sans que personne se fût aperçu
de rien. Mais, un jour, le roi Failbé, rentrant à l’improviste, surprit sa
femme et son fils alors qu’ils étaient ensemble au lit. Sa douleur et sa colère
furent si grandes qu’il envisagea d’abord de tuer les deux coupables. Puis, il
se calma et se contenta de les maudire en leur ordonnant de quitter
immédiatement le Munster.
    Ainsi Ecca, fils de Failbé, quitta-t-il le pays de son père
en compagnie d’Ebliu, avec tous les serviteurs qui leur étaient attachés. Et
son frère aîné, Rib, qui ne s’entendait guère avec le roi Failbé, le suivit
aussi.
    La troupe des exilés se dirigea vers le nord, espérant par
là trouver un lieu agréable pour y résider. Mais les druides qui les
escortaient leur dirent qu’il ne serait pas bon que les deux frères fussent
ensemble dans la même résidence.
    Ils décidèrent donc de se séparer et, tandis qu’Ecca
continuait sa route vers le nord, Rib et ses gens s’en allèrent vers l’est.
Après une longue errance, ils découvrirent un

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